Décès d’Henri Martin : disparition d’un grand dirigeant communiste français, d’un grand militant internationaliste
PCF Paris 15, Emmanuel Dang Tran, 17 février 2015
Nous apprenons aujourd’hui le décès à l’âge de 88 ans de notre camarade Henri Martin.
Nous adressons toutes nos condoléances à ses proches.
Notre tristesse est profonde tant Henri a été un repère politique pour des générations de communistes, y compris dans ces dernières décennies de confusion et de remise en cause. La section du PCF Paris 15ème a eu la chance de profiter directement de l’apport politique exceptionnel de ce grand militant, dirigeant du PCF.
Car c’est peut-être cet aspect que nous retiendrons le plus de lui, celui dont nous lui serons le plus reconnaissant.
Car derrière le symbole, le résistant engagé dès l’adolescence, le héros si courageux de « l’affaire Henri Martin », de la lutte contre le colonialisme, pour l’amitié avec les peuples de l’Indochine libres, il y a un militant profondément rigoureux, marxiste et léniniste, communiste.
Quel écart entre le prestige du nom d’Henri Martin, honoré très au-delà des rangs communistes, chez tous les partisans de la liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes, par le peuple et l’Etat vietnamiens, et sa personnalité si humble, dévouée à l’organisation politique de la classe ouvrière, mais aussi si déterminée et organisée !
Quel écart mais quelle cohérence communiste profonde !
Des années de prison pour avoir dénoncé, si naturellement, les agissements de l’armée colonialiste, si contraire à son engagement prolongeant la résistance, sont devenus un vecteur de la lutte anticolonialiste en France, principalement menée par le PCF. Sous les ponts de France, on trouve encore, 60 ans après, des inscriptions peintes « Libérez Henri Martin ». Des peintures, des chants, des pièces de théâtre ont magnifié son sacrifice.
Mais Henri Martin est toujours resté avant tout un « simple » militant et un dirigeant communiste, membre du Comité central de 1956 à 1994, dans l’activité vers les entreprises, dans ce secteur si important qu’était la formation des militants et cadres du Parti.
Henri a été dirigeant de l’école centrale du PCF pendant plusieurs années pour le plus grand profit aussi bien des « élèves » que des « enseignants » communistes. Il nous a remis ses notes et programmes. La boussole de la lutte des classes ne le quittait jamais, comme celle de l’importance de l’organisation léniniste répondant au centralisme démocratique.
Quand tout cela a été remis en cause puis balayé par les dirigeants opportunistes, depuis la fin des années 80 ailleurs et en France, Henri a été de ceux qui ont posé le plus lucidement la question de la préservation de l’outil révolutionnaire. Fidélité au Parti, défense de l’outil historique irremplaçable, conscience de l’exigence de l’unité du mouvement révolutionnaire, mais opposition résolue aux liquidateurs qui en sont aussi issus : comment faire ?
Dans cette période ingrate, un camarade doté de cette histoire et de cette trempe, notamment à la direction de l’association des vétérans, malgré l’âge, Henri Martin a continué à défendre le Parti, en prenant position notamment aux congrès, en diffusant des tribunes, en continuant à militer localement.
Le Parti communiste ne peut être qu’un parti conservant en toute circonstance son indépendance de pensée et d’action au service de la classe ouvrière.
Voilà le message que nous retiendrons, reconnaissants à Henri pour tous ses actes dans tous les épisodes historiques traversés, à ce grand dirigeant du PCF, à notre cher camarade.
Je l’ai vu à Sidi Bel Abbès au moins trois fois il y a plus de 40 ans. Il jouait journal d’un fou. Magnifique.
Je l’ai revu à Alger sur le pont d’un bateau qui faisait le tour de la Méditerranée…pour la paix ! Des crétins avaient demandé à la ministre de la « Culture » de l’époque, de lui refuser le débarquement car il y avait des Israéliens sur ce navire de guerre roumain, transformé en théâtre ambulant sur « l’océan liquide »
Ils avaient omis d’expliquer que c’était des Israéliens qui militaient pour la cause palestinienne. Ils avaient omis surtout de dire qu’il n’avait pas voulu d’eux sur le bateau de la paix.
Comme je ne pouvais l’approcher et que le cinéaste Denis Butner, sur la terre ferme comme moi, filmait cette séquence, j’ai demandé à lui parler au téléphone, avant qu’il ne fasse son apparition sur le pont. Trop tard ! Il arriva sur la scène aménagée et fit un discours-poème, probablement improvisé, faisant l’éloge de la cause palestinienne ! Un discours vibrant, magnifique comme toujours ! Puis Martin fit donner le spectacle : un feu d’artifice extraordinaire. D’un seul coup, Alger fut illuminé par ce poète exceptionnel.
Je suis parti en maudissant la ministre et les cabotins qui l’ont empêché de débarquer.
Il y a un an ou deux j’ai trouvé son adresse et je lui ai écrit. Je lui ai rappelé « Journal d’un Fou, le beau théâtre de Sidi Bel Abbès. Fou de joie, il m’a répondu, alors qu’il ne me connaissait pas. Il m’a invité à le voir à Marseille, si un jour je passais par là.
Dans quelques jours je présenterais l’un de mes films dans mon ancien lycée et je rappellerais à mes anciens camarades de classe Journal d’un Fou » et Henri Martin. Je leur dirais qu’un grand homme, un homme immense est mort.