8 novembre 1954

La situation devient chaque jour plus sérieuse en Algérie. Plusieurs régions sont mises en état de siège, des villages entiers sont ratissés, des organisations dissoutes, des centaines d’hommes emprisonnés, des journaux démocratiques saisis ou suspendus. Les colonialistes et la presse à leur service poussent à une répression sans cesse accrue. Une telle situation préoccupe à juste titre la classe ouvrière et l’ensemble des Français.

Le Parti communiste français souligne que les événements qui se déroulent actuellement en Algérie résultent essentiellement du refus opposé par les gouvernants français aux revendications nationales de l’immense majorité des Algériens, ce refus s’ajoutant à une misère généralisée et croissante, conséquence directe du régime colonial qui sévit dans ce pays.

En prétendant nier l’existence en Algérie de problèmes politiques de caractère national, en s’obstinant à camoufler le régime colonial sous le vocable de « trois départements français », le gouvernement tourne le dos à la réalité algérienne et notamment à la volonté de tout un peuple de vivre libre et de gérer démocratiquement ses propres affaires.

Le Parti communiste français dénonce les mesures de violence prises pour tenter de briser le mouvement national algérien, qu’il s’agisse des véritables opérations de guerre actuellement en cours ou de la dissolution arbitraire du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques, prétexte à une répression encore accentuée. La politique de force pratiquée par le gouvernement ne résoudra pas davantage les problèmes qui se posent en Algérie qu’elle n’a résolu ceux qui se sont trouvés posés en Indochine, en Tunisie et au Maroc ; ainsi qu’il en a été dans ces divers pays, une telle politique ne peut qu’aggraver la situation et rendre les problèmes encore plus difficiles à régler.

En de telles circonstances, fidèle à l’enseignement de Lénine, la Parti communiste français, qui ne saurait approuver le recours à des actes individuels susceptibles de faire le jeu des pires colonialistes, si même ils n’étaient pas fomentés par eux, assure le peuple algérien de la solidarité de la classe ouvrière française dans sa lutte de masse contre la répression et pour la défense de ses droits.

Il demande aux travailleurs, à tous les démocrates de manifester leur solidarité agissante à l’égard des centaines de milliers de travailleurs algériens obligés de s’exiler en France parce que les conditions du colonialisme les empêchent de vivre dignement, eux et leurs familles, dans leur propre pays.

Les travailleurs, les démocrates, les patriotes français s’opposent d’autant plus vigoureusement à la politique férocement colonialiste pratiquée en Algérie et dans toute l’Afrique du Nord qu’elle est étroitement liée à la politique de renaissance du militarisme allemand. Elle tend, en effet, à faciliter l’implantation de l’impérialisme germanique sur le sol africain, suivant les projets « d’industries franco-allemandes en Afrique du Nord et au Sahara » annoncés par le Président du Conseil. Elle en est, par cela même, plus néfaste encore et plus contraire à l’intérêt français et à la cause de la paix.

Le Parti communiste français déclare avec force que la seule voie permettant de mettre un terme à la situation présente consiste :

1-      A arrêter immédiatement la répression et à ramener en France les troupes et les forces de police acheminées en Algérie depuis trois mois ;

2-      A reconnaître le bien-fondé des revendications à la liberté du peuple algérien ;

3-      A discuter de ces revendications avec les représentants qualifiés de l’ensemble de l’opinion publique algérienne : délégués de tous les partis et mouvements nationaux, délégués des organisations démocratiques, professionnelles et culturelles, personnalités.

4-      C’est là le seul moyen d’avancer vers une solution démocratique des problèmes qui se posent en Algérie ; une solution conforme à la volonté ou à l’intérêt de l’ensemble des hommes et des femmes vivant en Algérie, mise à part une poignée de profiteurs de la colonisation ; une solution assurant la défense des intérêts de la France, ceux-ci ne pouvant être garantis que si les relations entre les peuples algérien et français se situent dans un climat d’amitié et de confiance réciproques.

5-      Le Parti communiste français est ainsi, une fois de plus, l’interprête de l’internationalisme des travailleurs, inséparable de l’intérêt national.

LE PARTI COMMUNISTE FRANçAIS.

Le 8 novembre 1954