Pour l’année scolaire 2010/2011, le dévouement des personnels ne suffira pas à colmater les brèches ouvertes par le gouvernement dans l’Education nationale. L’absence des nouveaux manuels de seconde, les options non assumées, les classes supprimées au dernier moment n’auront été que la partie émergée de l’iceberg à la rentrée.

Depuis 2007, plus de 60.000 postes ont été supprimés, 16.300 le sont cette année, encore 16.000 doivent l’être en 2011. Pourtant, le nombre d’élèves augmente (+ 45.000 dans le secondaire). Quel sens cela peut-il avoir de ne remplacer qu’un professeur partant à la retraite sur deux ? De donner deux classes au jeune enseignant qui les remplace ? Dans les faits, cela revient à surcharger encore les classes, à supprimer des heures de cours, des offres de soutien, à menacer la scolarisation en maternelle avant 3 ans et même à 3 ans, à dégrader les conditions de travail des personnels. Au bout de plusieurs années, les tensions deviennent intenables.

La suppression de l’année de formation des nouveaux professeurs est l’un des plus mauvais coups de cette rentrée. Les jeunes diplômés se retrouvent seuls devant des classes souvent difficiles. C’est toute la transmission des expériences pédagogiques qui est menacée. Cette année aussi voit la quasi-disparition du service public d’orientation scolaire.

 

L’application des décrets Chatel sur le lycée commence aussi à produire ses effets néfastes. Certains enseignements comme les sciences économiques et sociales en seconde, bientôt l’histoire en terminale, sont vidés de leur contenu dans les nouveaux programmes. Dans un contexte de pénurie budgétaire organisée, « l’autonomisation » renforce les inégalités entre établissements à qui est « refilée » la responsabilité et le financement de plusieurs heures d’enseignement optionnelles. Il va y avoir des lycées pauvres et des lycées moins pauvres. La porte est ouverte à une dépendance vis-à-vis de donateurs privés.

Dans le même temps, la suppression de la carte scolaire accroît la ségrégation scolaire, la relégation de certains établissements, mal placés ou peu réputés, qui, perdant des élèves, perdent encore des moyens et se retrouvent dans une situation critique sur tous les plans. Détruire l’école, outil de la cohésion sociale, dans les quartiers difficiles, puis faire venir les « Kärcher » : on connaît la logique de Sarkozy.

 

Les personnels dénoncent cette politique qui « frappe le cœur même de leur identité professionnelle et du service public d’éducation ». Ils ont raison d’alerter les parents et le pays, d’appeler à une grève, exceptionnelle dès la rentrée (le 6 septembre dans le secondaire).

 

Les prétextes avancés par le gouvernement ne doivent pas cacher la nature de ses choix politiques.

 

Il n’y aurait plus d’argent dans les caisses de l’Etat et c’est pour cela qu’il faudrait tailler dans le vif de ce qui forme l’avenir de notre pays ? C’est faux !

De l’argent pour l’école, il y en a ! 16.000 emplois supprimés à l’école sont censés faire « économiser » 400 millions d’euros par an au budget de l’Etat. Il faut mettre en rapport cette somme avec, pour ne prendre qu’un exemple, les 11 milliards d’euros par an de cadeaux au patronat consentis avec la suppression de la taxe professionnelle. Le coût de la participation française à la guerre US en Afghanistan s’élève à 600 millions d’euros par an.

 

Le pouvoir, au service du patronat et de la finance, cherche à déstructurer l’éducation nationale. Cela correspond à leurs intérêts à court terme. Ils sont contradictoires avec ceux de la Nation. Au niveau européen, la « stratégie de Lisbonne » fixée en 2000 sert de feuille de route à ces politiques dans chaque pays.

 

Affaiblir l’offre publique d’éducation, c’est le moyen de développer un secteur privé marchand, de faire des profits sur le dos des familles.

Affaiblir l’école laïque et républicaine, c’est ensuite un choix de société pour l’avenir, celui du déclin, de la liquidation financière de pans entiers de l’activité de notre pays.

Réduire à un « socle commun minimal » les moyens et les contenus des enseignements, l’accès au savoir et à la culture générale, c’est menacer la liberté, l’adaptabilité, l’esprit critique des citoyens de demain.

Le développement économique et social du pays appelle au contraire des générations mieux formées, polyvalentes, créatives. Il est significatif de voir les pays émergents développer rapidement leur secteur éducatif public. Le contraire de la voie choisie par les dirigeants français.

La dévalorisation des bacs professionnels (en 3 ans au lieu de 4), les menaces générales sur les lycées professionnels correspondent ainsi précisément aux objectifs du patronat et du gouvernement de suppressions de centaines de milliers d’emplois dans l’industrie et d’abandon de filières productives entières.

 

Face à cette politique, devant la situation d’urgence créée à cette rentrée, nous soutenons entièrement les revendications des enseignants et personnels de l’éducation nationale en grève le 6 septembre 2010.

 

Nous demandons

l’annulation des suppressions de poste, le lancement d’un plan de recrutement massif de personnels fonctionnaires

l’abrogation des décrets Chatel sur le lycée

le rétablissement et l’amélioration de la formation professionnelle des enseignants

le rétablissement d’une carte scolaire

le maintien du caractère national des enseignements

 

Les moyens existent ! L’argent pour l’école, pas pour la guerre ! L’argent pour l’école, pas pour les dividendes des actionnaires !

 

Nous demandons aussi l’interdiction des financements publics (collectivités locales), hors de l’obligation légale pour le secteur privé sous contrat, aux institutions privées et la suppression du « crédit d’impôt » au soutien scolaire privé. Il représenterait plusieurs centaines de millions  sur les 1,7 milliard que coûte au budget de l’Etat la « niche fiscale » pour l’emploi de personnel à domicile par les ménages les plus aisés.

 

Les missions et les principes de l’Education nationale, égalité, recherche de la réussite pour tous, pluralisme, laïcité sont la condition du développement de l’individu, du citoyen, de la société et de la réponse aux besoins économiques de notre pays.

 

Le 6 septembre pour l’éducation nationale, le 7 septembre, tous ensemble pour les retraites : nos convergences peuvent faire plier le pouvoir ici et maintenant !