EDT pour vivelepcf,  2 mars 2014

La crise politique en Ukraine tourne au drame depuis plusieurs semaines. Aucune issue allant dans le sens de maintien de l’unité du pays et d’un début de réponse à la crise économique et sociale n’apparaît. Au contraire, une aggravation des tensions, des violences, une logique de partition du pays en zones d’influence se dessinent.

Le renversement anticonstitutionnel du président élu, malgré l’accord signé la veille entre les différentes parties, a brusquement envenimé les choses. Le fascisme menace de prendre le contrôle politique de plusieurs régions. A Kiev, plusieurs membres du parti néo-nazi « Svoboda » ont été proclamés ministres, à des postes clefs. Le nouveau gouvernement est dirigé par des oligarques tout aussi corrompus que l’ex-président Iakounovitch, seulement encore plus inféodées aux puissances impérialistes occidentales.

La multiplication des exactions à caractère antisémite, des intimidations et des attentats contre les opposants politiques de gauche, d’abord communistes, font froid dans le dos. La nouvelle xénophobie officielle antirusse compromet toute réconciliation nationale dans un pays où un tiers de la population à le russe comme langue maternelle et les trois quarts comme langue d’usage. Les réactions à l’est du pays, ou en Crimée, sont les conséquences directes de ce choix politique, comme la position de la puissance russe voisine et sœur.

En France, nous ne pouvons pas rester indifférents devant cette situation, d’autant que notre gouvernement n’a cessé de s’ingérer directement dans les affaires ukrainiennes, à côté des autres puissances impérialistes de l’Union européenne, Allemagne et Pologne en tête,  et des Etats-Unis.  Fabius et Hollande n’ont pas hésité à jouer, avec elles, avec le feu, à apporter une aide idéologique et logistique à un mouvement dont l’extrême-droite a pris la direction depuis des semaines, profitant du vide politique, du désarroi du mouvement de protestation sociale.

La propagande des media français n’a pas pu masquer l’image les milices armées jusqu’aux dents, portant croix gammées, n’ayant rien à voir avec des hommes de la rue en colère.  

Plus que jamais, il convient d’identifier les intérêts réels des puissances capitalistes, notamment celles de l’UE.

Depuis des années, elles entendent faire de l’Ukraine un protectorat, une base arrière fournissant une main d’œuvre à vil prix, dans le pays même ou via l’émigration, pour enrichir leurs trusts, casser les droits sociaux dans toute l’Europe. Les travailleurs ukrainiens, plus proches, sont déjà plus « compétitifs » que les Chinois ! Etats-Unis et UE entendent aussi repousser l’influence de la Russie, pays certes converti au capitalisme sauvage, mais aussi puissance concurrente.

Le projet d’accord « d’association » entre l’UE et l’Ukraine poursuivait exactement cet objectif en intégrant l’Ukraine dans une zone de « libre »-échange avec l’UE (bientôt avec l’Amérique du Nord) et en instaurant une « libre » circulation des capitaux et des exploités. Iakounovitch l’a négocié avec l’UE mais n’a pas réussi le faire passer en novembre, devant les réalités budgétaires du pays.

Ses concurrents politiques et les partis fascistes se sont emparés de l’événement et ont tenté de capter et dévier la protestation sociale générale. De concert, l’Occident frustré a accablé le partenaire privilégié d’hier, Iakounovitch. Il s’agit de reporter sur lui la responsabilité de la ruine du pays. Il s’agit d’édifier un mythe « européen » de sortie de crise, de liberté, dans une population déboussolée, pour mieux asseoir un pouvoir qui continuera à laisser faire le pillage et la colonisation du pays.

Montrer que « l’Europe c’est la paix » en soutenant les fascistes ukrainiens, cela relève de l’exploit idéologique!

Le suivi populaire a été poussif, culminant à 200.000 manifestants, avant de décliner, dans une ville de 3 millions d’habitants et un pays de 45 millions d’habitants. En 2010, Sarkozy a affronté une mobilisation dix fois supérieure pour les retraites… Mais la crise politique, dans un pouvoir miné par la corruption, totalement discrédité, a perduré, entretenue par les ingérences étrangères. La montée des provocations fascistes a finalement trouvé la dérive répressive d’un pouvoir de Ianoukovitch à bout pour lancer le coup de force.

Le nouveau pouvoir pro-UE espère réussir à se forger une légitimité en transformant les cent victimes civiles tuées  la semaine dernière (à côté des 50 membres des forces de l’ordre) en martyrs de ses propres intérêts. C’est mal parti. La foule, place Maïdan, a réservé un accueil distant aux ministres autoproclamés. A l’est, comme à l’ouest du pays, des mobilisations, beaucoup plus fortes que les précédentes, s’affirment contre les fascistes. Voilà une raison d’espérer.

Dans cette situation confuse, dont les media internationaux ne peuvent cacher entièrement les réalités, nous affirmons notre soutien à l’analyse et aux positions actuelles de nos camarades du Parti communiste d’Ukraine.

Nous manifestons d’abord notre entière solidarité avec eux, notre indignation devant les attentats dont leurs permanences sont victimes, devant les menaces personnelles reçues par leurs militants, devant les menaces d’interdiction que le nouveau pouvoir fait peser sur leur organisation.

Nous saluons leur courage, notamment celui de leurs députés, qui continuent à siéger au Parlement pour défendre pied-à-pied, dans cette période de quasi non-droit, les acquis démocratiques et sociaux qui subsistent encore dans le pays.

Nous faisons connaître leur proposition d’organisation d’un référendum national pour que le peuple ukrainien puisse, en toute connaissance de cause, s’exprimer sur l’accord d’association avec l’UE. C’est l’origine, même superficielle, de la dernière crise. Ses promoteurs ukrainiens, polonais ou allemands ont visiblement peur de l’avis éclairé des électeurs. Le référendum s’impose. C’est tout autre chose que les élections anticipées décidées, sous influence, où les féodalités locales, dans un climat de tensions, pèseront de façon déterminante.

Nous faisons connaître la perspective nationale pour l’Ukraine portée par les communistes une souveraineté et de la cohésion de la nation et de l’Etat reposant sur le respect de la diversité culturelle de ses composantes.

 

Cette perspective est la seule à même de faire échec à la partition en zones d’influence entre impérialismes occidentaux et Russie que l’actuelle montée du rapport de force laisse présager.

Indépendamment de la situation présente, il est clair que l’imbrication historique, culturelle, économique entre l’Ukraine et la Russie nécessite, dans l’intérêt mutuel, malgré l’état dégradé de ces deux pays écrasés par la restauration capitaliste, une coopération économique étroite.

Au contraire, les prétentions de l’Allemagne, de la Pologne, de l’ensemble des impérialismes associés dans l’UE ne viseront jamais qu’au pillage de l’Ukraine. Nous dénonçons en France, dans l’intérêt également des travailleurs et producteurs français, le projet de soi-disant « association » UE/Ukraine. Nous condamnons d’avance toute manœuvre visant à le présenter sous un meilleur jour, par exemple en faisant payer aux peuples de l’UE une partie de la dette ukrainienne que cette même UL et ses alliés oligarques ont creusée.

Nous appelons enfin à manifester par les moyens appropriés pour la fin de l’ingérence et des manœuvres françaises, du gouvernement, de Hollande et de Fabius, dans les affaires internes de l’Ukraine.

Pour le respect du droit du peuple ukrainien à disposer de lui-même, dans l’intérêt de tous les peuples, halte à l’intervention de l’UE du capital !

 

QUELQUES RAPPELS :

Depuis la restauration capitaliste en Ukraine en 1991, jadis une des régions à l’industrie et l’agriculture les plus florissantes d’URSS, l’activité économique a reculé de 50%. La population a chuté de 6 millions d’individus, soit un huitième, du fait d’abaissement de l’espérance de vie et de l’émigration. Les richesses du pays ont été captées et dilapidées par des familles d’oligarques vendues à l’Occident. Les inégalités sociales, très faibles sous l’URSS, ont rejoint le niveau du Brésil.

En 2004, les impérialismes occidentaux ont déjà essayé d’utiliser cette situation en inventant et promouvant la « révolution orange », afin d’accroître leur domination directe et faire refluer la puissance russe. Mais les oligarques pourris mis en place, avec Mme Timochenko, n’ont pas pu tenir les rênes d’un pays qu’ils ont continué à détruire et diviser. Déchue, elle a dû laisser la place à Ianoukovitch. Le soi-disant « homme des Russes », politicien pourri lui-même, est vite devenu l’interlocuteur privilégié de l’UE…

La dépendance de l’économie ukrainienne au capitalisme mondialisée, l’économie de pillage, sont devenues telles que la crise américaine des « subprimes » a amené un recul économique de 15% pour la seule année 2009. Pourtant jamais, depuis des décennies, les besoins de la population ukrainienne n’ont été aussi mal satisfaits.   38% des Ukrainiens, 80% des retraités, selon les agences internationales, ont des ressources inférieures au minimum vital.

Un modèle encore plus avancé pour l’UE des capitalistes que la Grèce !