Message du Parti communiste algérien au Parti communiste français – mars 1962
Bchir Hadj Ali, mars 1962
Chers camarades, chers frères,
C’est avec émotion que nous avons lu votre message de salutation à notre Comité central après l’accord d’Evian. Nous vous en remercions du fond du cœur.
L’ensemble des patriotes algériens, et d’abord les communistes, seront très sensibles aux sentiments chaleureux et fraternels que vous exprimez à notre parti et à notre peuple.
L’accord d’Evian, victoire de notre peuple, est une aussi une victoire du vôtre. A cette grande victoire, votre parti a contribué d’une façon décisive en France.
Il a été le seul parti français à soutenir, avant la guerre de libération, l’aspiration de l’Algérie à l’indépendance. Au lendemain du 1er novembre 1954, il a été le seul parti français à donner les raisons politiques du soulèvement et à préconiser des négociations sur la base de la satisfaction des aspirations nationales de notre peuple.
Il n’a cessé de déployer durant ces années de guerre, des efforts patients pour rassembler les masses dans de larges actions, moyen décisif pour imposer en France la paix négociée aux colonialistes. Il a mené avec persévérance le combat politique et idéologique contre le chauvinisme et la thèse de « l’Algérie française ». Il a expliqué inlassablement aux Français le sens et la justesse de notre lutte nationale. Il a combattu les obstacles et manœuvres sur le chemin de la négociation ; telle l’idée de la « table ronde » qui tendait à diminuer la représentativité du FLN et du GPRA.
Ainsi, votre glorieux parti a défendu, en même temps que les droits de notre peuple, les intérêts et l’honneur du vôtre.
Nombre de patriotes algériens n’ont pas toujours apprécié l’importance de l’activité de votre parti contre la guerre coloniale. Aujourd’hui, les masses algériennes mesurent mieux les résultats féconds de cette activité, en particulier depuis les grandes manifestations de décembre 1961 en France.
Notre parti a toujours mis l’accent sur l’alliance naturelle de combat entre notre peuple et le prolétariat français. Le 9 juin 1959, dans le message adressé à votre 15ème congrès, notre Comité central affirmait :
« Malgré les incompréhensions passagères et parfois contre le courant, nous poursuivons cette tâche d’éclaircissement avec patience, persévérance et calme, avec la certitude qu’en jour l’ensemble des patriotes et notre peuple nous donneront raison ».
Notre Parti enregistre avec satisfaction et fierté les progrès du mouvement de libération au sujet de cette alliance, non seulement parce qu’il y a contribué largement, mais surtout parce que ces progrès sont bénéfiques à l’Algérie.
Certes, la victoire n’est pas complète. La paix est encore fragile. L’OAS continue ses crimes monstrueux pour saboter l’accord d’Evian. Des entraves néocolonialistes existent.
Mais le peuple algérien, qui a arraché son indépendance et l’intégrité de son territoire vaincra toutes ces difficultés. Il est et sera soutenu par tous les hommes de progrès dans le monde. Sa lutte rejoint celle des forces ouvrières et démocratiques françaises contre le fascisme, le pouvoir personnel, pour la rénovation de la démocratie. Les succès respectifs de nos deux peuples donneront à la coopération franco-algérienne un contenu de moins en moins contraignant pour notre pays et la rendront solide parce que librement consentie et fondée sur l’égalité.
Alors, commencera à s’épanouir à l’échelle de nos deux peuples la fraternité profonde qui unit nos deux partis et qui, telle une flamme dans la nuit coloniale, n’a cessé d’éclairer malgré la tempête la voie de l’amitié véritable entre les hommes et les peuples.
La Comité central du Parti communiste algérien,
Pour le Comité central,
Bachir Hadj Ali