Extension du mariage : comment gauche-PS et droite-UMP essaient péniblement de trouver un sujet de clivage
Vivelepcf, 9 janvier 2013 ©
Non, la question, imposée en 2013, de l’extension du mariage civil à deux personnes du même sexe n’a rien à voir avec celle du financement public des écoles privées posée en 1983 !
30 ans après, Hollande et son gouvernement, rejouent, sur le mode de la farce, la partition mitterrandienne. La droite saisit la balle au bond. Tous les moyens sont bons pour la gauche et la droite qui viennent d’alterner au pouvoir pour essayer de se différencier que des questions « identitaires ». Sur les questions économiques et sociales, ils ont tant de mal à le faire !
Mais cela ne peut pas et ne doit pas fonctionner.
Le « mariage pour tous » (qu’il est plus exact d’appeler extension du mariage) est typiquement une question de société complexe où s’affrontent des conceptions, difficilement liées à une lecture de classe de la société capitaliste.
Qui peut nier que ce n’est quasiment pour personne une priorité ou une urgence politique qui mérite la mobilisation massive du gouvernement, des partis et des media à laquelle nous assistons ? La manœuvre politicienne, de part et d’autre, excède largement la réalité et l’ampleur de l’enjeu.
En Grande-Bretagne, c’est un premier ministre conservateur, David Cameron qui entend imposer le « mariage gay », même contre l’église anglicane. Une partie de l’UMP française, sa branche libérale-libertaire, est prête à le suivre.
Tous les représentants des religions de France, unis comme jamais, en concordance avec leur philosophie et leurs dogmes, s’opposent à toute idée de mariage hors de la perspective de procréation. Ce n’est que très logique et c’est leur droit de défendre leur point de vue.
Les lobbys érigés en représentants de soi-disant « communautés » homosexuelles, ont autant le droit de défendre le mariage gay, dont ils s’efforcent de faire une question identitaire en direction de leur cible.
Les sociologues s’éparpillent à loisir sur le sujet. Et ce n’est pas plus mal, tant que cela n’occupe pas tout le débat politique.
Toutes les options sont recevables tant qu’elles ne sont pas injures, appels à la haine de type raciste, « homophobe », contre telle ou telle population désignée.
En ce qui nous concerne, communistes, nous jugeons que toute extension du PACS doit être examinée pour lever les dernières discriminations matérielles (pensions de réversion). Pour nous, cela n’est pas sujet à discussion.
Mais par ailleurs, parmi nous, certains se réjouissent de la tombée en obsolescence de l’institution du mariage. De fait, 55% des naissances se produisent hors mariage en France.
En tout cas, nous constatons l’actualité de l’interrogation d’Engels sur la survivance du mariage – bourgeois – dans la perspective de la chute du capitalisme.
« Ce que nous pouvons donc augurer de l’organisation des rapports sexuels, après l’imminent coup de balai à la production capitaliste, est surtout d’ordre négatif et se borne principalement à ce qui disparaîtra. Mais qu’arrivera-t-il après ? Cela se décidera quand aura grandi une nouvelle génération : génération d’hommes qui jamais de leur vie d’auront été dans le cas d’acheter à prix d’argent, ou à l’aide de tout autre ressort social, l’abandon d’une femme ; génération de femmes qui n’auront jamais été dans le cas ni de se livrer à un homme par d’autres considérations qu’un amour réel, ni de se refuser à l’aimé par craintes des suites économiques de cet abandon. Quand ces gens-là existeront, du diable s’ils se soucieront bien de ce qu’on croit aujourd’hui qu’ils devraient faire ; ils se feront eux-mêmes leur pratique et leur opinion publique appropriée pour juger de la manière d’agir de chacun – un point, c’est tout. » (L’Origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat, fin du chapitre sur la famille). Evidemment la problématique reste inchangée dans un couple de même sexe.
Tout cela pour appeler à ce que le débat sur le mariage pour tous soit vite réglé, donne lieu aux moins d’instrumentalisations politiques, telles que celle à laquelle nous assistons avant la manifestation du 13 janvier.
Le ministre de l’éducation, Vincent Peillon, avec Christine Boutin comme contrepartie à « droite », semble chargé de faire de cette question de société un clivage fondamental « gauche/droite ».
Il a fustigé une circulaire des écoles catholiques. Il tente d’établir un lien entre les mobilisations de 1983, 1984 voire de 1994 pour l’école publique et la laïcité et la promotion du « mariage pour tous ».
Ce mélange des genres est déplorable.
Cela remet même en cause les objectifs que la « gauche » n’avait pas voulu gagner alors : briser l’emprise de groupes religieux et des intérêts privés sur l’éducation. L’école privée continue d’être arrosée légalement et extra-légalement (y compris par les collectivités de gauche) d’une manne d’argent public pour son enseignement dirigé et sa logique de discrimination sociale.
Mais tout cela n’a rien à voir avec l’expression libre – de droit – actuelle des associations religieuses sur le mariage!
De tels calculs politiciens ne peuvent à terme qu’enfoncer le gouvernement.
Il appartient aux communistes de rétablir les vraies questions de fond, de société, mais fondamentalement de classe.