Articles taggés le pen

Présidentielles : le capital a gagné sur toute la ligne. Un PCF sur le terrain des luttes pour organiser la riposte dès le 1er mai.

Communistes, nous avons toujours dénoncé l’élection du président de la République au suffrage universel direct. Avec elle, le système s’est doté d’un instrument idéologique redoutable pour contenir les quelques concessions démocratiques qu’il a dû laisser devant les luttes des travailleurs et du peuple, pour les détourner vers une acceptation de sa politique, une « servitude volontaire ». Avec le quinquennat, imposé sous la « gauche plurielle » en 2000 (Mélenchon compris), le système a subordonné, systématiquement tous les 5 ans, les élections législatives au vote pour un chef. Seule, l’existence d’un parti révolutionnaire de classe et de masse, le PCF, a historiquement permis de contrecarrer ce piège, d’offrir une alternative, du moins une forme de résistance aux travailleurs. Mais, et c’est une constatation fondamentale, même si elle se situe dans la suite logique des années précédentes, 2017 sanctionne la disparition complète du point de vue communiste organisé. Aux présidentielles 2017, le système fait un carton plein. Il a atteint ses trois cibles.

L’alternance droite/gauche, à bout de souffle, est dépassée

Premièrement, il est parvenu à dépasser son mode habituel de gouvernement politique, l’alternance droite/gauche pour mener, de façon complémentaire, successivement depuis 30 ans, la politique au service du capital. A bout de souffle, le système risquait de ne plus être opérationnel devant le niveau du mécontentement populaire et des luttes potentielles. Le système l’a remplacé en arrivant à introniser Macron comme une figure de renouvellement, alors qu’il est l’héritier direct du président sortant honni, qu’il est un valet direct du capital. Pour accentuer cette posture, Macron n’a pas hésité à s’attacher les soutiens de personnes allant de Robert Hue et Patrick Braouezec à Alain Madelin. Le scrutin présidentiel, personnifié, est décidément un terrain privilégié pour le matraquage idéologique, passé au marketing politique 2.0 (internet).

Le système a sacrifié un bouc émissaire, avec acharnement, son fidèle Fillon, postulant naturel à l’alternance. Logiquement, l’opinion publique s’est choquée davantage d’un costume à 13.000 euros que des dizaines de milliards d’euros de cadeaux au profit, accordés ou promis par Macron ou Fillon. Cette manipulation de la campagne a en outre permis d’abaisser comme jamais le niveau du débat politique dans le pays. Fillon, trop clair, trop cru, dans ses perspectives de casse sociale, risquait de raviver très vite les luttes ouvrières. La candidature confusionniste Macron semble plus à même de faire passer, en « douceur », la même politique. Egalement de faire de l’extrême-droite l’opposition privilégiée, plutôt que le mouvement social. On notera que le parti libéral-réactionnaire, Les Républicains, ne devrait pas couler avec son candidat. Contrairement au PS, voué à un éclatement.

Subissant les trahisons et la concurrence traduite par les sondages, le candidat de la gauche social-démocrate normale, pourtant « frondeur », Hamon, a endossé le sinistre bilan de Hollande à la place de Macron. La force de l’idéologie dominante est vraiment épatante !

Le système érige le FN en opposant principal aux politiques ultra-capitalistes

Deuxièmement, les tenants du système peuvent se réjouir que les conditions soient rassemblées, après ce vote, comme jamais, pour que l’extrême-droite représente et canalise l’opposition à la politique ultra-capitaliste de la présidence et de la majorité Macron à venir. Plus que jamais, le FN va servir de dérivatif, de repoussoir mais aussi de légitimation au prochain gouvernement, comme il l’a fait pour sa candidature. Macron et Le Pen sont les meilleurs ennemis. Macron a cultivé dans sa campagne, globalement creuse, les clivages avec le FN sur le multiculturalisme, l’immigration ou la Russie de Poutine. De son côté, Le Pen a habilement affiné sa démagogie sociale attrape-tout, ce qui la rapproche de la caractérisation du fascisme. Elle capte aisément, pour la déformer vers le nationalisme, l’opposition populaire à l’UE du capital, dont Macron est le chantre.

Les résultats du 23 avril montrent une perspective extrêmement inquiétante. Le FN paraît davantage en situation de dépasser son rôle de contrepoint et de faire valoir des politiques « ultralibérales » et pourrait devenir un recours pour le capital, devant l’aggravation de la crise et la nouvelle cure antisociale qu’annonce l’élection de Macron. Le Pen a obtenu un nombre jamais atteint de voix, 7,7 millions. Son influence électorale s’est socialement et géographiquement homogénéisée, mis à part les banlieues à forte population d’origine émigrée et les centres-villes. Le scrutin a montré que la droite extrême dispose de réserves, pas pour gagner le 7 mai, mais pour la suite. Pensons, sans tirer systématiquement de trait d’égalité, à une partie de l’électorat ultraréactionnaire qu’a courtisé Fillon et qui a, ces dernières années, montré ses capacités à tenir la rue. Pensons au vote pour Dupont-Aignan qui masque à peine son ambition de devenir premier ministre d’ouverture d’une présidente Le Pen.

Une recomposition de la gauche accélérée afin de faire taire la contestation de classe

Mais ce qui est aussi inquiétant, face à Macron et à ces sombres perspectives, c’est la recomposition de la gauche que la présidentielle accélère. Avec l’avènement de Macron, l’éclatement du PS se précipite. Fondamentalement et historiquement, comme dans d’autres pays, la social-démocratie a perdu l’essentiel de sa raison d’être, celle de gérer le « grain à moudre » pour faire rempart aux partis révolutionnaires et au camp socialiste. Il faudra approfondir cette analyse plutôt que constater le soi-disant « double échec « du « socialisme réel » et de la social-démocratie.

Une grande partie des notables du PS devrait rejoindre Macron et achever sa mue « libérale ». Et le reste ? Les contours de la recomposition politique à gauche sont encore imprécis. Mais ce qui se dessine constitue la troisième réussite du système à ces élections.

Ce qui va passer pour la « gauche », voire la « gauche de la gauche », sera dominé par le réformisme, des transfuges socio-démocrates (Hamon et cie, Mélenchon ex-PS), des représentants des lobbys sociétaux inscrits dans le fonctionnement idéologique du système, avec une place renforcée pour le populisme incarné par Mélenchon. On penche plus vers l’exemple Tsipras, Iglesias ou même Beppe Grillo (dont les représentants devisaient à Rome avec Mélenchon du « plan B ») que vers Corbyn (qui n’est pas pourtant exactement ma tasse de thé).

Je fais partie des camarades qui n’ont pas donné de consigne de vote pour le 1er tour. C’est-à-dire notamment que je n’ai ni appelé à voter Mélenchon, ni spécialement appelé à ne pas voter pour lui. Mais, puisque Pierre Laurent et la direction de notre parti se sont rangés derrière sa candidature, puis qu’une partie de la réaction l’a abusivement qualifié de « communiste » (un compliment pour lui, une injure pour nous !), nous avons fait notre possible, en continuant à militer pendant la campagne, pour éviter tout amalgame entre Mélenchon et, nous, communistes.

De nombreux électeurs et camarades ont voté Mélenchon, par défaut, sans illusion sur le personnage, mais pour voter le plus utile « à gauche » parmi tous ces mauvais choix. Depuis le départ, ça ne pose aucun problème. Après la désignation de Hamon (différent mais pas moins « à gauche » que Mélenchon), il y avait le choix, sans parler des candidats gauchistes. Face à la candidature sabotée de Hamon, Mélenchon a gagné la 3ème primaire, celle des sondages qui en ont fait le vote le plus « utile ». Mais de fait, fort de ses 19%, Mélenchon sort très renforcé dans la recomposition à venir de la gauche.

La personnification de la politique, le dédain des partis, le populisme pratiqué par Mélenchon sont à l’opposé de nos conceptions. Son programme économique et social est tout sauf anticapitaliste. Les mots même « capitalisme » et « lutte des classes » sont absents de son programme. La FI (« France insoumise ») propose, sous les oracles de Keynes et Roosevelt, de revenir à une forme ancienne du capitalisme monopoliste d’Etat, national, avec injonction dirigiste de milliards d’euros dans l’économie capitaliste. Philippot est sur la même longueur. Le protectionnisme, c’est une politique capitaliste, à l’opposé de la réponse aux besoins dans le pays. Sur les revendications sociales et les mesures concrètes, Mélenchon est au plus bas (SMIC, retraites etc.) et va même jusqu’à promouvoir la fusion CSG/impôt sur le revenu, machine à détruire le financement de la Sécurité sociale. Sur l’UE, la position du Maastrichien est fourbe, laissant envisager que l’UE du capital serait réformable, renvoyant aux calendes grecques toute rupture (« plan B »). Sur la paix, Mélenchon condamne l’OTAN mais pas le surarmement français, comme il a applaudi Sarkozy pour la destruction de la Libye. J’en passe, notamment sur les envolées nationalistes et le changement de couleur, du rouge au bleu, depuis 2012.

Mais le plus dangereux chez Mélenchon, c’est la perspective de rupture politique qu’il met en avant. Avec la « 6ème république », il la place sur le terrain des institutions, de la superstructure, de l’amendement de la démocratie bourgeoise et non sur la lutte des classes. Il la place en terme de renversement de régime allant jusqu’à se revendiquer de De Gaulle et du 13 mai 1958. Cette perspective et son populisme nourrissent le terrain où pousse le plus facilement la mauvaise herbe d’extrême-droite. Et c’est très grave.

Mélenchon et sa « France insoumise » ne peuvent pas être le centre de gravité d’une gauche de résistance et de reconquête. Notre priorité doit être la reconstruction du PCF.

Le système peut se réjouir d’une quatrième victoire, dont il n’est pas directement responsable : la disparition totale du PCF et du point de vue communiste organisé. Ses causes ne remontent pas à la décision de ne pas présenter de candidat. Si la direction du PCF n’a pas présenté de candidats, c’est parce qu’elle a abandonné tant de positions communistes et adopté des positions réformistes qu’elle ne peut pas assumer dans une élection nationale, sous peine de dépasser, par le bas, le score de Marie-George Buffet en 2007. Souvenons-nous du congrès bâclé de 2016 et de la base de discussion vide de sens et illisible !

Depuis 6 mois, les choix et les revirements de la direction du Parti sont suicidaires. Même si c’était dans une logique tactique et électoraliste, elle commençait à se rendre compte que l’opération Front de Gauche et l’intronisation de Mélenchon qu’elle a favorisée se retournent contre le PCF. Des critiques évidentes à l’encontre de Mélenchon, qu’à quelques-uns nous propagions dès 2008 et 2011, commençaient à être reprises. Et puis fin novembre, revirement et alignement lancé par Pierre Laurent par voie de presse sur Mélenchon. Sur la base de prédictions avérées de bon résultat de Mélenchon, de prédictions démenties de victoire de Valls aux primaires ? D’autres, en « opposition », se prononçaient pour une candidature « provisoire » anticipant un ralliement possible au candidat PS… Après la désignation de Hamon et les flottements dans les sondages, la direction du PCF endosse une nouvelle raison d’être : entremetteur entre les courants Hamon et Mélenchon de la social-démocratie ! Avant, vu les sondages, un alignement complet sur Mélenchon malgré le mépris hautain affiché par ce dernier pour les communistes et leurs candidats. Beaucoup de communistes vivent cela comme une humiliation.

Comme beaucoup de camarades, de « tendances » pas nécessairement identiques, nous avons tenu le terrain localement pendant la campagne, préservé quelque chose. Mais cela ne durera pas indéfiniment, si cette direction continue à plier sous les sondages et l’idéologie dominante.

Je respecte pleinement les dirigeants du Parti qui ont défendu, face à l’alignement sur Mélenchon, un point de vue « identitaire », très différent du mien, se référant aux orientations du PCF et du PGE et les assume. Mais je ne crois pas que les positions, que je ne partage pas, proposant la réorientation de l’UE et de  la BCE, qui font passer le Maastrichien Mélenchon pour plus anti-UE que nous, proposant la modulation des cotisations patronales, proposant de tirer le revenu universel de Hamon avec une incompréhensible « sécurité emploi formation » défendent le Parti et sa raison d’être révolutionnaire.

Sans exagérer, l’heure et grave pour le pays et l’heure est grave pour le PCF, les deux allant, pour moi, ensemble.

Dans l’immédiat, pour le 2nd tour, en cohérence avec l’analyse ci-dessus, je pense que le Parti ne doit pas donner de consigne de vote. Cela ne veut pas dire appeler à ne pas voter Macron et condamner ceux qui pensent que c’est un moyen de faire barrage à l’extrême-droite. Le désaccord n’est pas sur le fond avec eux et l’on ne va pas se disputer. Mais ma réflexion m’amène à penser que l’extrême-droite et Macron sont objectivement complices et que le capital version Macron est plus près que jamais d’enfanter une forme de fascisme. Il est en tout cas inadmissible que Pierre Laurent ait court-circuité le débat du parti et du CN.

Pour les législatives, je formule un vœu pieux : que le PCF adopte le principe (souffrant peu d’exceptions) de présenter des candidatures de rassemblement dans toutes les circonscriptions, d’entamer ou de poursuivre l’action militante, de se dégager de toute négociation, de ne rien quémander, sous la pression des résultats de la présidentielles, pour des candidatures uniques de « gauche » préfigurant la recomposition politique à dominante réformiste. A ce moment : le Parti d’abord ! Aussi pour le rassemblement de ceux qui nous intéressent le plus : l’avant-garde de la classe ouvrière.

Pour le fond, à terme, je renvoie aux analyses de la motion alternative que j’ai signée pour le congrès : « Reconstruisons le Parti de classe. Priorité au rassemblement dans les luttes ».

Une date immédiate s’impose : le 1er mai ! Tout va être fait pour détourner les manifestations traditionnelles du mouvement ouvrier vers un appui, politique et même syndical, au prochain gérant loyal du capitalisme français. Il est plus important que jamais que nous nous investissions toutes nos forces pour en faire le début de la riposte à l’ultracapitalisme de Macron et à l’extrême-droite, recours du système.  

EDT pour vivelepcf, 26 avril 2017

 

Appel à signer : Présidentielles : Communistes, pourquoi nous ne donnons pas de consigne de vote pour le 2nd tour.

 

Sur Canal +, Hollande poursuit sa campagne de promotion éhontée du FN en osant scandaleusement le comparer au « PCF des années 70 ».

Emmanuel Dang Tran, pour Vivelepcf, 19 avril 2015

François Hollande était l’invité de l’émission « le Supplément » ce 19 avril. Pour ses trois ans de mandat à l’Elysée, en toute connivence avec les journalistes aussi complaisants que faussement décontractés de Canal +, toujours sur son ton en mineur, il a multiplié les provocations au nez et à la barbe de ses propres électeurs de 2012.

Malgré le rejet massif de sa politique antipopulaire, encore exprimé aux élections départementales, il a réaffirmé qu’il la poursuivrait sans changement, aussi bien au plan national qu’international.

A nouveau, il a pris le prétexte de l’emploi, sans vergogne, malgré trois ans d’envolée du chômage. Plus que jamais, avec le patronat, avec les capitalistes de France et de l’UE, c’est au contraire sur le chômage que leur serviteur Hollande mise pour détruire les acquis sociaux et démocratiques, les salaires, la sécurité sociale etc.

Parmi d’autres provocations, on aura noté l’attaque contre les derniers contre-pouvoirs démocratiques du Parlement, qualifiés de « survivances des 19 et 20ème siècles », car il faut aller toujours plus vite dans l’intérêt des possédants. Hollande, Valls, Macron, après Sarkozy et Fillon, toujours avec l’Union européenne, c’est toujours le « Coup d’Etat permanent » pour reprendre la formule de Mitterrand.

Mais on retiendra surtout de cette émission comment, après les déclarations de Valls avant les départementales, Hollande a passé les bornes dans la promotion du Front national de Marine Le Pen. Porte-parole du système, Valls et Hollande s’appliquent à polariser la vie politique sur les élections de 2017 et la « menace Le Pen », à détourner la colère des travailleurs vers le vote FN.

Hollande a osé valoriser Marine Le Pen en comparant son discours « à un tract du Parti communiste des années 70 ». Encore plus anticommuniste dans le texte, Hollande réduit ainsi la différence entre le FN et le PCF : « Le PCF avait encore un certain nombre de principes » … Il n’appelait pas « à chasser l’étranger et les pauvres ».

Hollande rentre en plein dans la démagogie sociale du FN. Cela fait plusieurs années que nous analysons et dénonçons les tentatives des nouveaux dirigeants du FN de dévoyer les positions historiques et l’image du PCF comme parti des travailleurs.

Le calcul de Hollande et du système coïncide avec celui du FN. Le FN, repoussoir xénophobe et nationaliste, version Jean-Marie comme Marine, sert pour eux à dénigrer des positions progressistes aussi fondamentales que le rejet de l’Union européenne du capital ou – Hollande le reprend dans l’interview d’aujourd’hui – l’exigence de nationalisations démocratiques de secteurs clés de l’économie.

Sauf qu’entre le FN et le PCF, il n’y a pas seulement ces rivières de sang qui séparent historiquement les fascistes, les colonialistes, des résistants, des défenseurs des droits des peuples. Il y a une différence fondamentale, un fossé de classe, qu’évidemment Hollande a intérêt à ignorer. C’est là que ses propos et son calcul politiciens sont inacceptables et inquiétants.

La démagogie lepéniste, uniquement tournée vers les élections, s’arrête aux intérêts concrets du patronat. La priorité du FN, c’est de défendre la dictature de la propriété privée, de combattre les syndicats, la sécurité sociale (les « charges »), les luttes des travailleurs.

En fait, nous devons retenir une chose des paroles anticommunistes, proprement dégueulasses, de Hollande : l’hommage décerné à notre parti, à ce qu’il continue à représenter dans le pays. Le PCF, Parti de classe et de masse, organisé dans les quartiers, les entreprises, les campagnes, incarnés, dans les années 70, par des centaines de milliers de militants, d’une certaine façon aussi par une personnalité comme celle de Georges Marchais, reste la terreur des classes possédantes, de leurs serviteurs du système politique PS+UMP+FN.

Raison de plus pour le faire vivre, le renforcer sur ces bases de classes historiques, contre les forces du capital, contre leur recours au fascisme !

Nouvelle sortie (réchauffée) de Jean-Marie Le Pen : chaque membre de la famille dans son rôle, en bonne connivence avec le système

EDT,  vivelepcf, 3 avril 2015

Politicien roué, Jean-Marie Le Pen sait ce qu’il fait et ce qu’il dit. Le journaliste de RMC, à forte tendance poujadiste, Jean-Claude Bourdin, vraisemblablement aussi. Dans son émission du 2 avril, il a lourdement tendu la perche au récidiviste pour qu’il réitère, tranquillement, sa célèbre estimation selon laquelle les chambres à gaz n’ont été qu’un « détail de l’histoire ». Bien évidemment un tollé médiatique s’ensuit. Le ministre de l’intérieur donne le ton de l’indignation générale. Et les journalistes, à l’unisson, de s’étaler sur les divergences supposées entre Jean-Marie et Marine.

On notera que Jean-Marie a fait sa sortie après des élections départementales qui ont vu le FN atteindre un nouveau sommet en pourcentage (25%) des suffrages exprimés, même s’il reste loin du nombre de voix des présidentielles (5,1 millions contre 6,4).

Jean-Marie Le Pen s’est peut-être fait plaisir dans son exercice de style favori, le rappel provocateur, insinuant, de son engagement d’extrême-droite de toujours. Mais beaucoup plus pragmatiquement, il a rendu la pareille au pouvoir en place, au système, qui assure la prospérité de sa boutique familiale.

Avec le peu de finesse qui le caractérise, mais avec une certaine efficacité, Manuel Valls a laissé voir le pot aux roses avant les élections, suivant le sinistre exemple de François Mitterrand.

En dramatisant, en s’alarmant publiquement de la possible élection de Marine Le Pen aux présidentielles de 2017, Valls a choisi de mettre en avant le FN. Son but immédiat était de valoriser le FN, dans posture de « seule alternative », de gêner la droite, de rassembler sur le plus petit dénominateur le « peuple de gauche ». A plus long terme, il s’agit de polariser tout le débat politique sur le FN et sur 2017, de continuer à détourner la colère populaire à la fois vers la haine stérile et vers l’échéance institutionnelle illusoire, d’étouffer ce faisant le seul moteur réel de la rupture avec la politique au service du capital : les luttes.

Avec l’aggravation de la crise économique, avec surtout le discrédit du modèle de l’alternance droite/gauche, UMP/PS et cie, le système a encore plus besoin de recourir à l’extrême-droite que dans les années 80/90. En réponse, le FN rénové affine son « offre » politique en direction de couches sociales plus diversifiées. Mais quel serait l’intérêt de développer le FN s’il apparaissait comme un parti comme les autres ? Réduit à la parole technocratique d’un Florian Philippot, énarque ayant navigué du chevènementisme à la droite, de surcroît conforme à l’idéologie dominante sur les questions de société, le vote FN perdrait son caractère sulfureux, susceptible d’attirer la colère primaire et de servir de repoussoir pour le système.

Les derniers propos de Jean-Marie Le Pen sont à replacer dans ce cadre politique. Il revient à l’histoire, à la seconde guerre mondiale, parce que son discours de haine sur l’immigration a été rattrapé par Sarkozy et même suivi par Valls (dont on se souvient des sorties contre les Roms notamment). De surcroît, cette histoire ne préoccupe pas fondamentalement l’électorat du FN alors qu’elle a le don d’exciter et de révolter les catégories « politisées ».

La double posture, c’est tout bénef pour la maison familiale FN, sa nouvelle pédégère Marine, avec Philippot d’un côté et Jean-Marie puis Marion de l’autre.

La campagne électorale des départementales a eu cela de remarquable aussi que la dramatisation du FN orchestrée par le pouvoir lui a permis d’esquiver le débat de fond, tout exposé de ses propositions politiques. Depuis quelques années, le FN a fortement amélioré son discours, souvent percutant et en apparence argumenté, en direction de catégories précises, comme les agriculteurs, même les enseignants.

Mais, dès qu’il faut s’adresser à tout le monde à la fois, les idéologues du FN sont à la peine. Comment parler aux ouvriers et aux patrons en même temps, surtout qu’on est du côté des moins nombreux ? La surenchère contre l’immigration est éventée. Il ne lui reste – le pouvoir s’est complu à la favoriser – que son image de parti « anti-système » qu’on n’a « pas expérimenté encore ». Le tract national de base pour les départementales était affligeant avec le verso entier ne comprenant qu’une seule formule reprise treize fois : « le PS, l’UMP, l’UDI, le Modem, les Verts, le Front de gauche proposent de lutter contre le Front national ». Marine Le Pen ne trouve maintenant comme première proposition à porter par ses nouveaux élus départementaux que la remise en cause du régime de retraite des élus précédents. Ça ne va pas loin…

Mais si, il reste un discours phare, lui aussi mis en avant avec insistance par Hollande, Sarkozy ou Valls : le refus de l’Union européenne. Là, nous touchons le cœur de la mission de repoussoir du FN. Il faut dénaturer, détourner vers le nationalisme, l’opposition de classe des travailleurs contre l’UE, 10 ans après la victoire du NON au référendum sur la « constitution européenne ». Rappelons à toutes fins utiles qu’avant d’être – déjà – mandaté par le pouvoir mitterrandien pour discréditer le NON à Maastricht, Jean-Marie Le Pen était un des plus chauds partisans de l’intégration européenne, d’une grande Europe « politique, économique et militaire ».

Communistes, il n’y a aucune contradiction pour nous entre être intransigeants face aux résurgences fascistes, notamment au révisionnisme de l’histoire de la 2ème guerre mondiale et éviter le piège que représente l’instrumentalisation du FN par le pouvoir. Contre l’assemblage capitaliste et impérialiste qu’est l’UE supranationale en particulier, les positions défendues par le PCF de 1947 à 1998 sont plus avérées que jamais.

Nous pouvons et devons résister à la pression destinée à détourner l’attente de rupture politique vers une résignation, une résignation au moindre mal, de nouvelles illusions électorales en 2017. Nous pouvons et devons contribuer à ce que l’objectif de la convergence des luttes, notamment à partir de la grande journée du 9 avril, à l’initiative de la CGT, ne soit pas transformé en vague programme électoral et en minimum politique contre l’épouvantail fasciste.

Où étaient les Le Pen pendant les manifestions de 2010 pour les retraites, en juin 2014 contre le projet de démantèlement de la SNCF ?  Pas avec nous! Pas de risque!

Le Pen se finance chez Poutine comme la plupart de l’extrême-droite européenne. Doublement révélateur !

Vivelepcf, 27 novembre 2014

Le Front national a été obligé de reconnaître l’information selon laquelle il s’est vu accorder un prêt de 9 millions d’euros en septembre par la banque russe « First Czech Russian », notoirement liée au pouvoir russe.

L’argent n’a pas d’odeur, certes et la famille Le Pen n’est pas du genre à engager sa propre (grande) fortune dans ses aventures politiques.

Mais ces bonnes relations entre le FN et le pouvoir de Poutine sont révélatrices, pour l’un comme pour l’autre.

Car l’opinion publique française a appris du même coup que la Russie de Poutine arrosait généreusement les partis populistes, racistes et fascistes de nombreux pays d’Europe, dont le xénophobe Vlaams Belang flamand, l’antisémite et fasciste Jobbik hongrois et même la néonazie « Aube dorée » grecque.

Le pouvoir russe ne manque pas de perspicacité en associant le Front national français à ces partis. Il souligne bien leur proximité et leur connivence, au grand dam de Marine Le Pen et sa recherche de « normalisation ». Tant mieux !

Mais si le pouvoir russe espère utiliser le FN comme un point d’appui, cinquième colonne contre l’impérialisme européen, par exemple sur la question de l’Ukraine, il est moins avisé. Dans la politique intérieure française, le FN joue le rôle également assigné à la figure de Poutine: celui de repoussoir. L’un et l’autre servent à légitimer, en négatif, à des niveaux différents, la politique du pouvoir en France et dans l’Union européenne.

La révélation de la complicité de la Russie poutinienne avec l’extrême-droite européenne contribue à démolir un peu plus l’image, que certains tentent de propager avec difficulté, d’un régime russe anti-impérialiste voire antifasciste. Là aussi tant mieux !

Le régime de Poutine continue l’œuvre de la restauration capitaliste en ex-URSS, la liquidation des acquis sociaux, de pans entiers de l’appareil de production, l’accaparement des richesses par quelques oligarques. Il s’appuie sur les forces les plus réactionnaires, religieuses, nationalistes, souvent racistes. Il ne tolère les organisations syndicales et politiques, y compris celles dénommées « communistes », que lorsqu’elles lui restent docilement soumises.  Le régime est répressif, policier, militariste.

Son affichage « antifasciste » n’a pour but que de dévoyer le souvenir profondément ancré dans la population de la résistance et de la guerre contre l’Allemagne nazie. Il est instrumentalisé pour répandre le poison nationaliste, l’idée de « Russie puissance », succédant à l’URSS « grande puissance ». On pourrait dire en bref, sous ouvrir ici ce long débat, que de l’Union soviétique, il ne reprend que le pire et l’aggrave !  En rien, à l’ONU ou ailleurs, l’impérialisme russe doit passer pour le continuateur du rôle historique de l’URSS dans le développement aux luttes émancipatrices dans le monde.

Communistes, nous ne pouvons tolérer la dévalorisation de la signification historique de l’antifascisme.

Le soutien de la Russie de Poutine à l’extrême-droite européenne aide à lever des confusions dangereuses.

Cela ne saurait changer notre opposition totale à la volonté des impérialismes européens et américain de mettre l’Ukraine sous tutelle économique et militaire, y compris au moyen de la résurgence du fascisme. Mais les ennemis de nos ennemis ne sont pas nécessairement nos amis.

A propos, vous savez qui va rembourser l’emprunt du FN à la Czech-Russian Bank, sans doute intérêts compris ? Nous les contribuables français ! Le FN va l’utiliser pour financer sa campagne aux élections départementales et il y a tous les risques que, cette fois, il dépasse 5% à peu près dans chaque canton et soit remboursé de ses frais !