Théorie

Redonner son nom à notre perspective révolutionnaire : le socialisme

36ème congrès du PCF – Texte alternatif – « Un parti résolument communiste dans l’affrontement de classe. Ni abandon, ni effacement!

PARTIE VI

L’actualité insolente du socialisme

Face à l’offensive massive du capitalisme, la notion de socialisme revient en force un peu partout. Le socialisme est de nouveau synonyme d’alternative au système.

Très longtemps, le PCF a porté cette alternative, seul d’une façon théorique cohérente, s’appuyant sur le marxisme-léninisme, sur les expériences nées de la Révolution d’octobre et sur l’histoire du mouvement ouvrier français. Après la victoire de la contre-révolution à l’est, sa direction a décidé d’effacer la perspective socialiste et, avec elle, la perspective même de rupture révolutionnaire, toute notion d’étape vers le changement de société.

Le socialisme a été abandonné en 1996, avec la « Mutation ». C’est l’époque où Robert Hue, de la même façon que ses successeurs, reprend à son compte toute la propagande antisoviétique de l’idéologie dominante.

Avec le Front de gauche, la direction a dépassé la « visée communiste » pour la remplacer par « l’humain d’abord », qui selon son programme « n’exprime pas seulement une préférence morale mais dit aussi sa stratégie contre la crise » et « vise l’intérêt général… face à la domination des marchés financiers ». Effectivement, cela n’a plus rien à voir, même de loin,  avec le socialisme et le marxisme.

Pour notre parti, le PCF, le mot « socialisme » a une signification historique trop forte pour être déformée à l’envie, encore aujourd’hui.

En 1968, le Manifeste de Champigny reprenait ainsi notre conception du socialisme : « Le socialisme, c’est tout à la fois la propriété collective des grands moyens de production et d’échange, l’exercice du pouvoir politique par la classe ouvrière et ses alliés, la satisfaction progressive des besoins matériels et intellectuels sans cesse croissants des membres de la société, la création des conditions propres à l’épanouissement de chaque personnalité ».

Nous jugeons nécessaire d’examiner à nouveau la perspective révolutionnaire aujourd’hui, comme l’histoire des expériences socialistes du 20ème siècle, suivant cette définition, sans éluder aucun des questionnements des dernières décennies sur le socialisme.

Certains révisionnistes ont porté l’idée qu’il y aurait eu un socialisme non-démocratique et qu’il faudrait imaginer un « socialisme démocratique ». Mais pouvons-nous concevoir un socialisme qui ne soit pas démocratique à moins d’être imparfait ou usurpé ? Pouvons-nous imaginer une démocratie réelle sans socialisme, c’est-à-dire sans contrôle collectif des moyens de production ?

D’autres tentent une expression astucieuse, « Le socialisme du 21ème siècle », pour s’épargner l’étude du 20ème. C’est impossible. Parlons plutôt de socialisme au 21ème siècle !

La jeunesse communiste est venue apporter une bouffée d’air frais à la réflexion des communistes en rétablissant l’objectif du socialisme dans sa résolution de congrès en 2010. Des jeunes viennent ainsi de plus en plus nombreux vers le PCF et la JC en recherche de perspective révolutionnaire.

La question du socialisme se pose concrètement dans nos luttes quotidiennes, dans notre conception de la propriété des moyens de production, des nationalisations en régime capitaliste, selon l’état des rapports de classe, dans notre recherche d’étapes et de ruptures immédiates avec la politique du capital.

En Amérique latine, avec le soutien et en coopération avec Cuba socialiste, des peuples ont pris le chemin de révolutions progressistes qui se réclament du socialisme, dans un continent longtemps dominé et pillé par l’impérialisme américain. Avec nos camarades vénézuéliens du PCV, nous nous réjouissons de la nouvelle victoire d’Hugo Chavez, qui est à la fois une grande victoire populaire et une « défaite stratégique de l’impérialisme ». Nous devons affirmer bien plus nettement notre soutien (ce qui n’exclut pas les critiques constructives)  et notre solidarité sans faille avec ces processus révolutionnaires en Bolivie, en Equateur, au Vénézuela …  d’autant que ces peuples demeurent confrontés à des forces capitalistes puissantes, soutenues par Washington.

En Europe, face à l’offensive violente du capital contre les droits des travailleurs, le Parti Communiste Français doit faire face, assumer son héritage révolutionnaire, à l’image des partis communistes de Grèce ou du Portugal, et s’engager à nouveau résolument dans la construction du socialisme.

« Le socialisme trahi » : 1985/1991, les causes de la chute de l’URSS

Le livre est désormais disponible en français, aux éditions Delga.

« Chute de l’URSS » prétend l’idéologie dominante ou « victoire de la contre-révolution » ?

 

Les historiens américains Roger Keeran et Thomas Kenny analysent les dernières années de l’Union soviétique.
Leur thèse est celle d’un choix, celui de franges dominantes du PCUS qui, avec Gorbatchev, ont voulu jeter le bébé plutôt que l’eau du bain et y ont réussi.

A partir d’une large documentation, minutieusement décortiquée, ils démontrent comment les peuples qui votèrent encore le 17 mars 1991 à 77,8% pour le maintien de l’URSS ont été trahis.
Ils replacent cette défaite majeure du mouvement ouvrier mondial dans l’ensemble des contradictions, historiques, économique de l’Union soviétique, théoriques du PCUS.

Mais ils réfutent toute idée de fatalité. Ils estiment que la « déstalinisation » à la façon de Kroutchev a réintroduit certaines valeurs du capitalisme, de « l’économie de marché », miné le socialisme, ouvert des brèches internes à la pression incessante et croissante de l’impérialisme. Dans un rapport de forces mondial dégradé pour le camp socialiste, la politique de Gorbatchev finit par faire de ces brèches des gouffres au bord desquels les apprentis sorciers se trouvent dépassés, comme également les résistances communistes.
Cette analyse précieuse répond à une attente qu‘avec beaucoup de camarades, nous avons exprimée depuis des années, celle d’une critique scientifique, nuancée, marxiste et communiste, les yeux ouverts sur le réel, de la fin des Etats socialistes, à mille lieues des repentances et autoflagellations de directions et intellectuels avides de reconnaissance par l’idéologie dominante et soucieux de transformations conformistes « à gauche » des partis communistes.

Elle contrecarre les poncifs que nous infligent les penseurs du reniement sur la nécessité d’une dose de capitalisme, de propriété privée et de démocratie bourgeoise dans le « dépassement » du capitalisme.  Elle n’ignore pas le rôle des partis communistes dans les étapes de construction du socialisme.

La trahison du socialisme a conduit au retour de la barbarie, en ex-URSS à son extension dans le monde entier. Mais 20 ans après, la victoire du capitalisme est loin d’être consommée. La contestation gagne et cherche des formes de ruptures révolutionnaires.

1917 demeure et redevient pour beaucoup une date majeure dans la longue histoire de l’émancipation des travailleurs, de celle de l’Humanité face au système de l’exploitation de l’Homme par l’Homme. Les partis authentiquement communistes restent la forme la plus avancée pour que les travailleurs, les peuples la conquièrent dans ce qui reste une permanence : la lutte des classes.

Un livre passionnant sur les causes internes de la victoire de la contre-révolution en URSS – 1987/1991.

En vente militante à 22 euros.

Une rencontre aura lieu avec Roger Keeran, vendredi 19 octobre 2012, à l’initiative du PCF Paris 15ème. Pour tous renseignement: pcf15@wanadoo.fr

« Décroissance ou socialisme ? » par Domenico Moro

« Décroissance ou socialisme ? »

par Domenico Moro, économiste marxiste italien, membre du Parti des communistes italiens (PdCI) – 2011

Traduction AC pour http://solidarite-internationale-pcf.over-blog.net/

Ces dernières années s’est installée en Italie, comme dans d’autres pays avancés, ce qu’on appelle la théorie de la décroissance. Cette théorie tire sa fortune de divers facteurs. En premier lieu, de l’affaiblissement d’une tradition créative marxiste adaptée à notre époque, en partie en raison de l’offensive idéologique continue et massive à laquelle elle a été soumise de la part de la pensée dominante. La substitution de la contradiction homme-nature à celle travail salarié-capital, a été un des axes de cette offensive, qui a accordé une place centrale dans le débat public à des questions comme la crise écologique, l’épuisement des ressources naturelles et le changement climatique. Tous ces aspects ont contribué au développement de l’écologie comme courant politique autonome.

La décroissance, tout en appartenant à la tradition de l’écologie, en est une variante extrême. Selon la décroissance, il ne suffit pas d’éviter les gaspillages ou de miser sur un développement « durable » ou « éco-compatible » et sur les énergies renouvelables. Pour la décroissance, la seule planche de salut est de réduire drastiquement la consommation. Il ne suffit pas de stabiliser la croissance ou de réduire la stimulation compulsive de la croissance de la consommation, il faut revenir à des niveaux de consommation typiques d’une société pré-industrielle. La décroissance propose un modèle spécifique de société, « la société de la décroissance ». Celle-ci se caractériserait par une économie basée sur la petite propriété paysanne, locale et autarcique, dans laquelle les échanges entre divers territoires sont quasi inexistants, de fait une économie curieusement semblable à l’économie médiévale.

Une idée de société de ce type rentre pleinement dans le cadre des projets utopiques, qui abondent dans l’histoire des idées. Le retour à une société essentiellement paysanne, locale et autarcique impliquerait une régression de la société. Une économie basée sur l’auto-consommation annulerait les échanges et par conséquent réduirait à des niveaux très simples la division du travail. Cela se traduirait par l’affaiblissement de la productivité du travail lui-même, le développement scientifique et son application pour mettre les forces de la nature au service de l’Homme. Une économie de ce type pourrait soutenir au niveau mondial une pression démographique de quelques centaines de millions d’individus à l’échelle mondiale, et on comprend mal quel sort serait réservé aux sept milliards d’êtres humains que compte actuellement la planète.

Derrière la vision ingénue de la « société de la décroissance », plusieurs erreurs d’analyse, qui révèlent la faiblesse de ses fondements scientifiques, économiques et sociologiques. Une drastique réduction de la consommation et du développement est anti-historique, car cela ne s’est jamais produit dans l’historique que l’humanité régresse spontanément, et car il serait plus qu’improbable non seulement de ramener les centaines de millions d’européens et de nord-américains à la simple subsistance, mais surtout de nier à des milliards d’asiatiques, de latino-américains et d’africains la possibilité d’en sortir, comme en témoignent les soulèvements en Égypte et en Tunisie et les importants flux migratoires Sud-Nord actuels. Selon les théoriciens de la décroissance, ce serait la perspective millénariste et catastrophiste de la crise écologique et de l’épuisement des ressources naturelles qui se chargerait de convaincre des milliards d’individus de faire le grand bond en arrière.

Nous ne voulons pas nier la crise écologique, mais la décroissance oublie que les sources d’énergie et les technologies qui les utilisent ne sont pas des facteurs fixes dans l’histoire humaine. Elles sont des variablesdépendantes du développement des forces productives(en particulier de la recherche scientifique) et surtout, du moment que la technique n’est pas socialement neutre, de la modification des rapports de production. Ce qu’il faut comprendre, donc, c’est la cause de la crise écologique. La théorie de la décroissance fait fausse route en l’identifiant, en l’imputant exclusivement à l’industrie et à la consommation. Au contraire, la cause de la crise écologique est la même que celle de la crise économique, le mode de production capitaliste, basé sur la rapports de production travail salarié-capital. La consommation n’est pas la finalité du capital. La finalité du capital est le profit. Cela semble paradoxal, mais la théorie de la décroissance s’établit dans une phase historique où la consommation de masse, dans les pays les plus avancés, diminue et la pauvreté augmente, phénomènes allant de pair avec la contraction du salaire réel. Une phase dans laquelle les sociétés les plus avancées ne « croissent » plus, ou plutôt elles décroissent, à la suite d’une des crises les plus profondes de l’histoire du capitalisme. Et tout cela alors que ne cessent de croître les profits absolus, l’opulence des riches et donc que croissent leur – mais seulement la leur – consommation de luxe.

Pourtant, la décroissance nie que le problème soit celui des rapports de production basés sur le capital. Il nie également que la classe ouvrière puisse être la protagoniste de la transformation de la société et identifie socialisme et capitalisme comme des tendances nocives, développementalistes. La question devient ainsi éthique et morale, et la solution doit être recherchée dans un choix volontariste et individuel, dans la frugalité plutôt que dans la consommation équitable. La vraie question à poser, au contraire, avant même de savoir combien l’on produit, est pour quiet comment on produit. En effet, l’épuisement et le gaspillage des ressources humaines et naturelles dépendent non pas de l’industrie en soi, mais d’un système fondé sur la concurrence entre entreprises capitalistes et sur la recherche du profit maximal et le plus rapide possible. Cela dépend de l’anarchie d’un système sans direction unitaire et sans coordination, source de gaspillages et de sur-production, dans lequel l’homme et la société n’ont pas le contrôle sur les forces productives, qui pourtant les ont créées, mais par lesquelles ils sont dominés, comme si elles étaient des forces aveugles de la nature. Crise économique et crise écologique apparaissent ainsi comme des manifestations, bien que diverses, de la révolte de l’économie et de la nature contre l’irrationalité même de ce mode de production.

La décroissance ne peut pas être la solution, à savoir que sa théorie dissimule les causes et empêche de leur trouver une solution, dérivant vers des recettes utopiques et paradoxales. Ce qui est à affirmer, ce n’est pas un bond en arrière dans les degrés de civilisation, mais la nécessité de la production rationnelle et de la redistribution de la richesse sociale. Ce n’est pas la décroissance, mais la planification qui est la solution à l’anarchie du capital. En effet, seule la reprise en main des forces productives par les travailleurs librement associés selon un plan rationnel, le socialisme, peut permettre le dépassement des crises économiques et des crises écologiques. En ce sens, la critique de la décroissance n’est pas une excentricité découlant d’un purisme idéologique, mais une opération de clarification, nécessaire à la lutte qui attend ceux qui veulent changer réellement l’état des choses présent, et un jalon dans la reconstruction d’une pensée critique actuelle et fondée scientifiquement.

Les JC des Bouches-du-Rhône réfléchissent sur le socialisme.

Les JC des Bouches-du-Rhône réfléchissent sur le socialisme.

 

La direction du MJCF organisait le 12 novembre 2011 un débat interne sur le socialisme.

La rencontre des JC des pays d'Europe en mars 2010 met en avant la lutte pour le socialisme.Les Jeunes communistes des Bouches-du-Rhône, avec de nombreuses autres fédérations, ont porté au dernier congrès de la JC l’exigence de clarification de notre projet révolutionnaire. Nous avons mis en avant l’actualité du socialisme, qui a été intégrée dans la résolution de congrès comme « phase transitoire ». Aujourd’hui, il est nécessaire que toute l’organisation s’approprie cet objectif et le lie avec toutes nos luttes.

Le texte qui suit synthétise nos débats préalables à la journée du 12 novembre.

1.                   Validité théorique du socialisme – nécessité de l’analyse des expériences socialistes

Le capitalisme a fait son temps. Ses crises, qui sont parties intégrantes du système, se reproduisent à un rythme de plus en plus rapproché. Elles sont de plus en plus destructrices. Elles affectent maintenant la quasi-totalité de la planète. Dans le même temps, la socialisation (capitaliste) de la production est portée objectivement à un niveau jamais atteint.

Pour autant, il serait naïf de penser que le capitalisme va tomber tout seul, du simple fait de la nécessité historique, céder la place progressivement à un autre système de production. L’expérience nous montre au contraire qu’il sait se régénérer de ses propres crises.

Il y a vingt ans, forts de la victoire de la contre-révolution à l’est, le capitalisme et l’idéologie dominante enterraient le socialisme et affirmaient leur « pensée unique ».

Aujourd’hui, l’exigence d’une transformation radicale de la société revient en force. Mais le système met tous ses moyens pour contrôler, encadrer sa propre contestation, pour étouffer la perspective du socialisme.

Le réformisme s’évertue ainsi à nier la notion de rupture. Pour nous communistes, la rupture révolutionnaire est la perspective nécessaire et le socialisme est son nom.

Certains mouvements de « gauche » envisage un « altercapitalisme », un capitalisme plus « humain ». C’est impossible. Un objectif comme celui d’un « meilleur partage des richesses » fait accepter la part du capital et légitime le système lui-même.

Dans nos rangs, le débat doit être poussé sur l’utilisation de la notion marxiste de « dépassement du capitalisme » qui ne doit pas être détournée pour nier l’exigence révolutionnaire.

En rétablissant le socialisme comme « phase transitoire », notre dernier congrès s’est heureusement démarqué d’une autre conception fausse, celle du « communisme tout de suite ». Le formidable développement des techniques avec le capitalisme ne conduit pas mécaniquement à la société d’abondance répondant aux besoins. La domination de classe de la bourgeoisie, pluri-centenaire, ne s’effondre pas d’un coup. L’existence transitoire d’un Etat socialiste, d’une planification socialiste est nécessaire.

Le capitalisme est plus que jamais le mode de production dans notre société. Il a étendu, intensifié sa domination sur les peuples mais il n’a pas changé de nature. Nous devons rejeter les assertions selon lesquelles le « monde aurait changé » et donc que le socialisme que les communistes ont défendu au 20ème siècle serait obsolète.

Plus que jamais, au fondement du capitalisme se trouve la propriété privée des moyens de production et d’échange. Plus que jamais, l’appropriation collective par les travailleurs des principaux moyens de production et d’échange, c’est-à-dire le socialisme, est notre perspective de rupture révolutionnaire. Elle ne se confond pas avec les nationalisations en système capitaliste (que nous défendons selon les rapports de force). Elle ne se confond pas avec l’étatisme.

La notion de « socialisme », profondément ancrée dans la mémoire des travailleurs, revient également en force. C’est une chance historique. Cette théorie est la seule qui a permis, à partir de 1917, de mettre à bas le capitalisme. Cette vérité est essentielle.

A notre niveau, il est de notre responsabilité de ne pas la laisser dévoyer, de réaffirmer clairement les fondamentaux du socialisme.

Certaines des principales organisations de la collaboration de classe continuent à s’appeler « socialistes ». D’autres penseurs de « gauche » n’hésitent pas à s’approprier le terme, une fois vidé de son sens. C’est un danger que nous devons à tout prix éviter dans notre organisation.

Après 1989, dans le mouvement communiste, la tentation a été grande de plier devant l’idéologie dominante, de pratiquer une sorte « d’autophobie », se traduisant par un rejet total ou par l’indifférence vis-à-vis des expériences socialistes. Cette position révisionniste peut s’allier aujourd’hui, en contradiction apparente, avec une célébration des aspects les plus superficiels de l’histoire de nos organisations et des expériences socialistes : un folklore révolutionnaire cachant l’absence de théorie et de pratique. Notre mouvement doit clairement condamner ces deux travers.

Lors de la préparation de nos précédents congrès, nous avons constaté que notre analyse des expériences socialistes issues de 1917, dans leur diversité, d’abord de celle de l’URSS, restaient grandement à faire, d’un point de vue communiste. Cette question doit être mise à l’ordre du jour du MJCF.

Dans le feu de l’histoire, tout en poursuivant notre propre réflexion critique, l’expression de notre solidarité, sans réserves, avec les expériences socialistes actuelles, notamment en Amérique latine, en premier lieu à Cuba, est aussi une obligation politique.

Dans le mouvement communiste français, on est passé progressivement de l’évidence de la perspective socialiste à son éviction totale. Pousser le débat dans nos organisations sur cette question essentielle est absolument nécessaire.

La référence théorique du marxisme-léninisme, matrice historique de nos organisations, ne peut pas être abandonnée sans autre forme de procès. Nous devons envisager notre rapport à cette théorie comme étant à actualiser, non pour la revisiter, mais pour rendre cette grille d’analyse lisible dans les conditions actuelles.

Dans l’idée d’actualisation et d’appropriation par les camarades de la perspective du socialisme, nous refusons de tomber dans un débat technique et économiste. L’objectif du socialisme ne doit pas être posé comme une question économique mais comme un choix politique. La question centrale est celle du pouvoir, du passage du pouvoir des mains d’une classe à une autre.

Quelles sont les voies possibles vers le socialisme en France ? A quelles exigences d’organisation répond l’objectif du socialisme ? C’est un enjeu majeur de la période.

2.                   Voies vers le socialisme en France

Le mouvement communiste français (PCF et MJCF) a engagé depuis des décennies la réflexion sur les voies menant au socialisme en France. Cette réflexion a été interrompue dans les années 90. Il faut qu’elle reprenne, sous peine de voir nos organisations continuer à se fondre dans la « démocratie » bourgeoise et ses institutions.

L’exemple de la Russie de 1917 ne s’est pas reproduit. Pourtant, la constitution des Soviets, l’intervention du Parti bolchévik en leur sein, cette forme de démocratie à la base, l’issue révolutionnaire qu’ils ont permise doivent continuer à être analysées dans nos organisations.

Notre lecture de classe de la société est essentielle dans notre conception du rassemblement et de notre parti pour le socialisme.

Si « 99% » de la population ont intérêt à la chute du capitalisme et à l’avènement du socialisme, ce n’est pas au même point, dans les mêmes conditions de prise de conscience de classe. La notion abandonnée de parti d’avant-garde doit être reconsidérée. La raison d’être des organisations communistes de se tourner vers la classe ouvrière (au sens large), la priorité à l’entreprise, restent valables.

Notre pratique politique, dans la JC, doit découler de cette analyse de classe. L’articulation entre nos campagnes, les revendications immédiates et notre projet de société doit être au centre de nos préoccupations.

Notre conception de l’union et de l’unité des travailleurs dépend de cette analyse de classe. Elle ne peut être confondue, comme c’est trop souvent le cas aujourd’hui, avec des alliances électorales.

Quels partis ou mouvements représentent réellement, en dehors des nôtres, la classe ouvrière, les couches intermédiaires ? Comment les organisations communistes peuvent jouer de leurs contradictions pour les amener à une perspective révolutionnaire ?

La stratégie de nos organisations, les alliances, pour aller au socialisme ont varié selon les périodes, l’état du rapport de force. Lors de notre réunion préparatoire, nous avons évoqué deux expériences très différentes : le Chili d’Allende et la « gauche » de Mitterrand en 1981. Elles méritent une analyse complète. Elles ne sont évidemment pas comparables.

Le gouvernement d’Allende, soutenu par le Parti communiste chilien avait pour objectif clair le socialisme. A son arrivée au pouvoir, il nationalise des pans entiers de l’économie et mène une politique en faveur des travailleurs. Cela a représenté un danger immense pour les intérêts des impérialistes qui ont fait payer à Allende et au Chili le prix fort. Mais nous pouvons dire que si Allende et la social-démocratie Chilienne voulait du socialisme, elle ne voulait pas de la révolution. Dans ce sens, elle n’a pas répondu aux appels du parti communiste qui demandait l’armement du peuple pour garantir le pouvoir des travailleurs. Cette distinction, cette contradiction, est cruciale à analyser dans nos rapports avec d’autres organisations qui disent vouloir le socialisme.

L’expérience du gouvernement de « gauche » après 1981 en France n’a évidemment rien à voir. Mitterrand et le PS ont utilisé l’Union de la gauche, le Programme commun, puis sa rupture pour affaiblir le PCF. Le socialisme n’a jamais été leur objectif, comme le « tournant libéral » dès 1983 l’a trahi. Les suites de 1981 ont été désastreuses pour les travailleurs de France, en termes de reculs sociaux, économiques et politiques.

Du côté des organisations communistes, le bilan n’a toujours pas été tiré de cette stratégie. Elle a été reproduite, en pire encore, dans la gauche plurielle après 1997 avec pour conséquence un affaiblissement sans précédent. La question est plus que jamais posée aujourd’hui : pourquoi rechercher une union de la petite gauche d’un côté et une nouvelle union de la gauche de l’autre avec des « partenaires » si éloignés de toute perspective socialiste ?

En 2011, le mouvement communiste français reste à la croisée des chemins. Il ne peut pas s’exonérer de la réflexion sur le socialisme, d’un débat ouvert, contradictoire, ancré dans la réalité du mouvement de classe. Sans reconsidération de la perspective socialiste, le risque se précise de finir de perdre l’acquis historique du mouvement communiste, de tomber dans le réformisme européen (PGE, CES, ENDYL, …) tel que l’idéologie dominante le construit.

Cette réflexion ne peut se limiter à la France. Une des priorités réside dans l’échange la coordination des organisations communistes au plan international. Le débat sur la perspective et les voies pour le socialisme est traverse l’ensemble du mouvement communiste international.

Confrontés à une offensive extrêmement violente du capital, les partis communistes de Grèce ou du Portugal font face. Ils ne s’exonèrent pas d’une réflexion de fond sur leur conception du socialisme en regard de l’histoire du mouvement communiste international. C’est le cas tout autant de leurs organisations de jeunesse. Le MJCF doit s’inspirer davantage de ces démarches.

Ce texte n’a pas pour vocation de fixer une position définitive, il est une piste de réflexion. Plus notre organisation se renforce, grâce à notre activité militante, plus l’exigence de préciser notre projet de société socialiste se fait grande.