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Lepaon/CGT : corriger l’erreur de casting mais aussi le scénario !

Vivelepcf, 4 décembre 2014

La position de Thierry Lepaon est devenue intenable. Il ne tiendra certainement pas au poste de secrétaire général de la CGT.

Les « révélations » sur le coût des rénovations de l’appartement loué pour lui et de son bureau de fonction à la confédération pouvaient passer – et c’était certainement le cas – pour des manœuvres visant à dénigrer l’ensemble de la CGT avant des échéances électorales professionnelles importantes, sinon pour une cabale interne – probable.  Elles engageaient une responsabilité collective. Mais elles ont légitimement choqué.

L’annonce maintenant, avérée, que la mutation de Lepaon du Comité régional CGT de Basse-Normandie vers le secrétariat de la Confédération s’est faite sous le mode de la « rupture conventionnelle », dispositif fondamentalement rejeté par le syndicat, avec une indemnité – dont Lepaon prétend lamentablement ne pas se souvenir du montant – alors qu’il basculait simplement d’une organisation de la CGT à une autre, est rédhibitoire a priori. Là, il peut même y avoir même soupçon d’enrichissement personnel.

Il y a donc fort à parier que Lepaon soit débarqué par ses pairs la semaine prochaine, devant la montée insupportable de la campagne médiatique et l’incompréhension des adhérents. Cela ouvrira probablement à un nouveau déballage public sur des faits secondaires de la vie du syndicat. Il n’est pas impossible que Lepaon, éliminé dans ces conditions, soit tenté de s’y livrer.

Ce n’est pas cà – tout au contraire – qui va permettre de mettre en discussion les vraies questions qui se posent dans la CGT, autour de son identité de syndicat de classe ou de syndicat de compromis. Pourtant, c’est là qu’est le principal.

Ceux qui ont choisi Thierry Lepaon comme secrétaire général, même par défaut, connaissaient ses positions, ses rapports rédigés au Conseil économique et social, celui anticipant la mise en concurrence du transport de voyageurs par la SNCF en 2012, cosigné avec un député UMP. Ils n’ont pas réagi à ces multiples perches tendues au patronat, dont la révoltante interview au « Nouvel économiste » auquel il déclare : « Il n’existe à la CGT aucune opposition de principe face au patronat. »

Lepaon est peut-être le défenseur maladroit et caricatural d’une ligne mais cette ligne a été définie avant lui. Les décisions de reporter l’issue de la bataille des retraites de 2010 sur l’alternance électorale de 2012, de s’impliquer comme jamais dans la campagne de la gauche et de Hollande en 2012, sans remonter jusqu’à la connivence avec Sarkozy sur la « représentativité syndicale » en 2008, ne peuvent pas être reprochées qu’à Lepaon.

Aujourd’hui, après les tensions de couloirs de la succession de Bernard Thibault, les peaux de bananes balancées par tel ou tel dirigeant ou groupe de dirigeants, certains parachutés dircetement de l’UNEF et du PS, s’affiliant selon l’opportunité aux frondeurs du PS et/ou au Front de gauche, mais partageant les mêmes orientations de congrès sur le « syndicalisme rassemblé » ou le « syndicalisme de compromis », n’ouvrent pas la voie au débat indispensable, partant des syndicats de base, sur la ligne générale de la CGT.

Dans les dernières semaines, aussi inquiétantes que les affaires Lepaon ont été les ouvertures faites par les négociateurs CGT au Medef sur la remise en cause des seuils sociaux.

Lepaon, par l’entièreté de sa personnalité et de son parti pris de collaboration de classe, se révèle une erreur de casting, une erreur de choix de Bernard Thibault. Mais au-delà du rôle du figurant, c’est le scénario qui conduit le principal syndicat de tradition révolutionnaire en France vers le réformisme qui doit être remis en cause à cette occasion !

Espérons qu’au moment même où nous publions ces lignes, la CGT gagne, sur la base de l’action de ses militants et organisations de base, en audience aux élections dans la fonction publique !

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La contestation de la ligne de la CGT Lepaon ne peut pas se faire sur la question de son appartement !

ML pour vivelepcf, 3 novembre 2014

Le coût de la rénovation de l’appartement alloué par la CGT à son secrétaire général Thierry Lepaon est monté en affaire nationale depuis l’article du Canard enchaîné.

L’ensemble des médias aboient. Les autres syndicats ricanent.

Du côté des adhérents de la CGT, beaucoup font part de leur incompréhension, quelques-uns de leur colère.

La fuite du Canard enchaîné reflète un profond malaise dans le syndicat bien plus qu’elle ne le provoque.

Il y a peu encore, les adhérents auraient fait bloc derrière le secrétaire général. D’autant que nul ne peut douter des mauvaises intentions de certains commanditaires du journal satirique avant les importantes élections professionnelles dans la fonction publique et certaines grandes entreprises. Ils auraient, en confiance, attendu les explications publiques de la Confédération.

Elles sont venues. L’appartement ne fait pas 120m2 mais 80. La rénovation, justifiée par son état d’origine, s’est élevée à 105.000 euros et non à 150.000. A Paris, c’est le prix d’une chambre de bonne. Reste néanmoins que cet investissement est consenti pour une simple location. Pourquoi ne pas avoir acheté ?

Mais l’essentiel n’est pas là.

La ligne de Thierry Lepaon suscite un profond malaise dans le syndicat. Contrairement à Bernard Thibault, il ne bénéficie pas de la légitimité acquise par une bataille comme celle de novembre/décembre 1995.

Au contraire de Thibault, Lepaon exprime aussi avec un franc-parler indiscutable ouvertement la position réformiste de son prédécesseur et de la direction collégiale. La main tendue aux syndicats de collaboration ne se cache plus derrière l’euphémisme du « syndicalisme rassemblé ». On l’a vu avec la récente rencontre CGT/CFDT du 8 octobre. Au moment de la grève contre la « réforme ferroviaire », Lepaon est clairement rentré dans la stratégie d’extinction du mouvement, valorisant les concessions bidon du gouvernement. Il avait lui-même consigné en 2012, avant d’être secrétaire national, avec un député UMP, un rapport du Conseil économique et social préparant la mise en concurrence du rail. Une interview dans le Nouvel économiste où il déclare que la CGT « ne doit pas avoir d’opposition de principe au patronat » a également désarçonné plus d’un camarade…

La ligne politique poursuivie par Thierry Lepaon passe d’autant plus mal que c’est le gouvernement de « gauche » qui mène aujourd’hui la politique la plus antisociale, celui issu des élections de 2012 dans la campagne desquelles le syndicat de Bernard Thibault s’était engagé pleinement derrière Hollande, cultivant avec complaisance toutes les illusions.

On sait aussi que le choix puis l’élection de Thierry Lepaon au dernier congrès a résulté d’une longue et obscure opposition de personnes et de clans au sein de l’appareil de la CGT, sans que s’exprime – le moins du monde – chez les prétendants de contestation de la ligne du « syndicat de négociations ». Dans les conditions d’aujourd’hui, cette ligne, désormais incarnée et assumée par Thierry Lepaon, ne peut plus rassembler et faire illusion. Beaucoup de dirigeants syndicaux ressentent le besoin d’adopter des postures plus « à gauche », plus « radicales ».

Le débat doit se rouvrir à tous les niveaux de la CGT. Mais il serait grave  qu’au malaise des adhérents, à leurs attentes, des clans dirigeants répondent par une révolution de palais basée sur des coups bas. Va-t-on bientôt lire, que Thierry Lepaon, cardiaque connu, va se retirer pour « raisons de santé » comme d’autres avant dans d’autres pays ?

Les militants syndicaux et politiques soucieux de rendre à la CGT son identité et son efficacité de syndicat de classe révolutionnaires ne peuvent pas  accepter que les débats de fond n’aient pas lieu, ne s’expriment pas et ne décident pas de l’avenir de la confédération.

L’ombre de Jean-Claude Gayssot plane sur la « réforme ferroviaire »

Brève, vivelepcf, 23 juin 2014

L’actualité de la « réforme ferroviaire » ravive le souvenir de Jean-Claude Gayssot, ministre « communiste » des transports de 1997 à 2002 sous le gouvernement Jospin.

Un souvenir sinistre et toujours révoltant pour les communistes ! Gayssot, avec les autres ministres issus du PCF, a incarné le choix liquidateur de la direction du PCF de collaborer au gouvernement qui a le plus privatisé dans l’histoire. Gayssot a défendu la privatisation de France Telecom. Gayssot a privatisé à 50% les Autoroutes du sud de la France. Aujourd’hui des voix s’élèvent pour les renationaliser… Gayssot a fait sauter la spécialité géographique de la RATP pour préparer la mise en concurrence de son réseau. Etc.

Côté SNCF, Gayssot a commencé son ministère en 1997 en appliquant la loi Pons que le Parti avait âprement combattue, en ouvrant la voie à l’éclatement de l’entreprise avec la création de RFF. Il a fini son ministère en faisant adopter les directives européennes du « 1er paquet ferroviaire » programmant la mise en concurrence du fret.

Le ministre Cuvilier avec un de ses prédécesseurs, Gayssot, sous les flon-flon en 2013

Au PS et à droite, le souvenir de Gayssot est au contraire nostalgique, joyeux, amusé, goguenard. Les socialistes sont souvent tentés de nommer ministre des transports (le précédent Fiterman) ou vice-président de région aux transports des élus du PCF. Avec ce que continue de représenter notre Parti dans ce secteur, par son influence sur les syndicats et par sa contribution historique à ses luttes et aux conquêtes des travailleurs, ils escomptent mieux faire passer sa politique de casse des services publics, de casse sociale et de soumission à l’Union européenne. Avec Gayssot, ils ont été mieux que servis. Ils s’en délectent encore, la droite aussi !

Les débats à l’Assemblée nationale sur la « réforme ferroviaire », les 17, 18 et 19 juin ont été marqués par la volonté d’aller vite, de brouiller les enjeux, pour court-circuiter la lutte et le développement du débat public. Ils se sont déroulés en petit comité : à peine une trentaine de députés présents pour voter l’article 1 qui dissout la Société nationale des chemins de fer français. Les cheminots en lutte ont pu constater en interpelant leurs députés localement que la plupart de ceux-ci ignoraient le contenu du projet de loi… Il n’y pas eu une seule intervention sur l’article 13 qui abroge le statut du cheminot ! La mise en scène a été arrangée au préalable en commission parlementaire.

Les séances se poursuivant tard, les orateurs fatigués et relâchés, conscients que le compte-rendu au Journal officiel est très peu lu, se sont lâchés à évoquer ensemble leur grand ami commun : Jean-Claude Gayssot, un peu pour narguer – sur le mode de la « private joke » – les cheminots en lutte et leur vrai-faux relai à l’Assemblée.

Le rapporteur PS, Gilles Savary avait déjà loué le précurseur de l’ouverture du « marché » du rail à la concurrence. Mais le mieux est de vous laisser lire et apprécier par vous-mêmes cet extrait du compte-rendu intégral de la séance du jeudi 19 au soir, la dernière séance :

« M. André Chassaigne (GDR). C’est bien cela l’important, d’exclure les centres d’entretien. Je suis donc d’accord pour supprimer « et autres installations techniques. » Je constate que l’on peut quelquefois arriver à se mettre d’accord sans faire allusion à Jean-Claude Gayssot ! (Sourires.)

M. Frédéric Cuvillier (PS), secrétaire d’État. Ni à Le Paon ! (Sourires.)

Mme la présidente (PS). L’amendement n286 est donc ainsi rectifié. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gilles Savary (PS), rapporteur. Je veux dire que j’ai beaucoup de respect, d’admiration et même d’affection pour Jean-Claude Gayssot. Quand je fais référence à lui, c’est affectueux, très sincèrement affectueux. J’ajoute que je pense comme lui.

M. André Chassaigne. J’en prends acte !

M. Martial Saddier (UMP). On l’entendait bien ainsi !

Mme la présidente. C’est magnifique ! (Sourires.)

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d’État. Il convient d’être précis. Puisque tout cela figurera au Journal Officiel, il me paraît nécessaire de bien préciser le sens de cette rectification. Nous nous efforçons là de ne pas balayer d’un revers de main l’amendement de M. Chassaigne.

Mais avant cela, je veux dire combien est grande également mon admiration pour M. Gayssot, à qui je parle régulièrement ! (Sourires.) C’est un grand nom dans l’histoire du ministère des transports, et nous lui devons beaucoup. Il m’arrive d’ailleurs de recevoir ses conseils.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec (PS). C’est encore plus magnifique, madame la présidente ! (Sourires.)

M. Rémi Pauvros (PS). N’en jetez plus !

On cherchera en vain le moindre propos du député Chassaigne pour se désolidariser de l’héritage désastreux de Gayssot.

Encore plus taquin ou sadique, le rapporteur PS Savary avait osé de petits rappels à l’attention de Chassaigne et à propos d’un malheureux rapport coécrit par Thierry Lepaon :

M. Gilles Savary, rapporteur. Défavorable.

Il s’agit d’ouvrir à la concurrence les trains d’équilibre du territoire. J’avoue qu’à titre personnel, je n’y serais pas hostile puisqu’il paraît que le privé est beaucoup plus efficace. L’idée était de dire : « Chiche ! » pour les trains qui nous posent le plus de problèmes.

Je partage d’ailleurs cette analyse avec M. Lepaon, secrétaire général de la CGT, qui a écrit un excellent rapport sur le sujet au Conseil économique et social et qui nous incite ainsi que le Gouvernement à s’engager dans cette voie. Nous partageons tous deux cette conviction, mais la commission pense que nous ne sommes pas prêts et que la réforme est suffisamment puissante pour ne pas brûler les étapes qui nous seront imposées par l’Union européenne très prochainement, en 2019 ou en 2023. »

Le secrétaire d’Etat PS Cuvilier en a ensuite remis une couche :

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d’État.


Madame Fraysse, vous pourrez rapporter ce témoignage à M. Chassaigne qui, à mon sens, ne le connaît pas – il est vrai que sur cette question, quelles que soient les familles politiques ou les appartenances syndicales, la situation est parfois malaisée. J’en veux pour preuve le rapport du Conseil économique, social et environnemental qui m’a été remis lors de mon arrivée aux responsabilités gouvernementales, au mois de juillet 2012. Le rapporteur, qui n’était pas encore secrétaire général de la CGT, concluait ainsi : « Une concertation devrait être engagée avec l’Association des régions de France pour définir le calendrier et les modalités de l’ouverture à la concurrence des TER et lancer assez rapidement les premières expérimentations qui devraient pouvoir commencer au début de 2015. »

La CGT avait d’ailleurs voté ce rapport, dont je m’étais, pour ma part, volontairement distancié. Mon propos n’est pas d’accuser qui que ce soit, mais de montrer que cette question mérite d’être clarifiée.

Les ennemis du service public utilisent les contradictions des organisations qui sont censées le défendre. C’est de bonne guerre. Mais on aura attendu en vain une clarification, même une distanciation, de la part d’André Chassaigne vis-à-vis du sinistre bilan du renégat Gayssot.

Au contraire, en s’abstenant sur la dissolution de la SNCF, en s’abstenant sur l’ensemble de la loi en commission, en appelant les grévistes à arrêter la lutte au nom d’amendements qualifiés de « surface » par la CGT cheminots, en multipliant les flagorneries lors des débats parlementaires, André Chassaigne prend le risque audacieux de plaire aux socialistes autant qu’un Gayssot ou un Hue.

Soyons clairs : cette position et cette posture, que nous voulons voir changer, ne sont pas celles des communistes qui combattent parmi et à côté des cheminots en lutte !

Echange policé Gattaz/Lepaon dans Marianne : quelles convergences ?

Vivelepcf, 4 août 2013

L’hebdomadaire Marianne aime habituellement à forcer le trait.

Dans son édition du 20 juillet (en lien), il titre « CGT-MEDEF : on a trouvé des convergences » le compte-rendu de la rencontre qu’il a suscitée entre Pierre Gattaz et Thierry Lepaon, nouveaux premiers dirigeants des deux organisations. Le journal n’hésite pas à ajouter : « Riche de convergences inédites, ce face-à-face laisse espérer un tournant dans notre histoire sociale ».

La rédaction de Marianne prend-elle ses rêves pour des réalités ? A la lecture, il y a quelque chose de très dérangeant dans le dialogue entre les représentants de deux organisations que toute la lutte des classes devrait séparer. Et ce n’est pas que le ton policé de l’échange.

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