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CN du PCF des 24&25/09/2016. Analyse d’Emmanuel Dang Tran. Choisir de temporiser, de rester dans l’impasse politique, de tenir les communistes à l’écart: pourquoi?

Conseil national du PCF des 24 et 25 septembre 2016. Compte-rendu et analyse d’Emmanuel Dang Tran, fédération de Paris.

Le CN des 24 et 25 septembre 2016 était principalement consacré à la stratégie pour les élections de 2017. Je suis intervenu le 24, mon intervention valant explication de vote contre le « relevé de décisions » (de non-décisions) final. J’ai été, à ma surprise, le seul à voter contre (72 pour, 7 abstentions) malgré la méthode antidémocratique et l’impasse politique que traduit ce texte. A noter que mon camarade Cyril Morlot, qui siégeait à mes côtés, aurait voté contre mais, invité en tant que secrétaire de la fédération de la Haute-Saône, il ne pouvait pas prendre part au vote. Au dernier congrès, en mépris du respect proclamé de la « diversité », la direction a éliminé du CN tous les autres militants et responsables d’organisations du Parti qui ont défendu la motion « Reconstruisons le Parti de classe ! Priorité au rassemblement dans les luttes ».

Comme ces camarades, je ne me sens absolument pas tenu de participer à une unité de façade derrière les choix de Pierre Laurent, d’autant moins, sur le sujet, après sa décision unilatérale de janvier dernier d’inscrire le Parti dans la logique des « primaires ». Comme mes camarades, je ne conçois pas non plus la prudence et l’attentisme de certains, soucieux de préserver des positions électives octroyées par le PS.

Ceci étant rappelé, j’en viens au CN lui-même. La session des 24 et 25 septembre a été particulièrement navrante tant la décision imposée était justement de ne pas prendre de décisions, de les retarder au maximum. Le choix, puisqu’on est dans l’impasse, c’est de rester dans l’impasse. Le processus statutaire de consultation des communistes n’est pas enclenché d’ici la convention nationale du 5 novembre. Il y a de forts risques que celle-ci ne décide de rien non plus. Les communistes sont seulement autorisés à discuter dans le vide. Les pénibles séances de fin 2006, lorsque la direction d’alors négociait la candidature des « collectifs antilibéraux », en tenant les adhérents du Parti à l’écart, reviennent en mémoire. En pire !

Cette méthode ne tient pas de la maladresse. Non, elle est le reflet d’une ligne politique impossible à assumer, tant elle est suicidaire et contraire à la raison d’être de notre parti, aux attentes de l’avant-garde des travailleurs en lutte. Ce que le congrès précipité, bâclé – avec un texte de la direction délibérément nul et illisible -, avec une stratégie réelle définie a posteriori hors des débats de congrès, a tenté de masquer, apparaît au grand jour. La seule perspective offerte par la ligne de Pierre Laurent, c’est  de mettre, contre une certaine rétribution, la marque historique PCF au service d’une recomposition de la gauche réformiste, susceptible de recréer des illusions et de canaliser la protestation populaire avant ou, plus probablement, après l’alternance de 2017. L’attention appuyée de la direction nationale à l’égard de « personnalités », mouillées jusqu’au cou dans le social-libéralisme et l’opportunisme, tour à tour Duflot, Montebourg ou Taubira constraste avec le mépris à l’endroit des communistes.

Le mot « rassemblement » a été omniprésent dans les interventions et l’est dans le « relevé de décision ». Mais rassemblement de qui ? De ces personnalités, de leurs partis bidon, sans réalité sociale, d’une large frange du PS, voire de tout le PS sauf Hollande, Valls et Macron ! L’Huma est même prête à faire passer Hidalgo, championne de la spéculation immobilière à Paris, pour une tenante de l’aile gauche ! L’inquiétude légitime devant la poussée de l’extrême-droite et de la droite est dramatisée et instrumentalisée pour justifier cette imposture, cette logique mortifère du moindre mal. Les luttes, notamment la mobilisation contre la loi El-Khomri, sont réduites à des illustrations, à un mythe fondateur de ce pauvre « rassemblement ». Tout au contraire, conscients de l’opération politicienne, nous devrions y voir une base et agir pour une montée générale des luttes sur une perspective de rupture, objectivement non électorale pour l’instant…

Mais comme d’habitude, de l’action du Parti dans les luttes, et dans leur avant-garde, il n‘a point été question au CN. La seule initiative avancée – la plupart des membres du CN reconnaissant le peu d’enthousiasme des camarades – est le questionnaire démagogique « Que demande le peuple », digne de ce que les sociétés de marketing appellent un (mauvais) « sondage charriot ».

La perspective d’insertion – jusqu’à effacement total – du PCF dans cette recomposition politicienne est aussi indéfendable, dans le Parti et publiquement – que le fond réformiste qui va avec. La référence de Pierre Laurent, c’est le Parti de la gauche européenne, la politique de Tsipras, son asservissement à l’UE, son hyper-austérité ! Les électeurs « de gauche » sont pourtant bien refroidis maintenant. Que le « Brexit », vote de classe, ne trouve pas suffisamment de relais politiques en Grande-Bretagne est une chose à constater et analyser. Mais la direction du PCF et le PGE choisissent de désavouer le vote des Britanniques (au passage contredisant nos camarades anglais, gallois et irlandais). Chez les travailleurs en France, même dans le « peuple de gauche », il ne se trouve pas grand monde pour croire que quelques économistes sauront subvertir, de l’intérieur, les orientations de la Banque centrale européenne pour réorienter vers le bonheur cette construction capitaliste antipopulaire !

Tout ce contexte, ces non-dits, expliquent l’indécision choisie des groupes dirigeants du Parti et les « hypothèses » soumises par le « relevé de décision » à des débats à la cantonade d’ici le 5 novembre. Comme un camarade de bon sens l’a dit au CN : il serait plus correct d’indiquer aux communistes une date où ils pourraient réellement se prononcer en connaissance de cause, même si c’est après la primaire du PS (et de la gauche) en janvier.

D’ici là, les dirigeants du PCF sont dans la spéculation. Est-ce que ce sera Hollande ? Et dans ce cas-là, il y a de la place pour un ou plusieurs candidats de la « gauche de la gauche ». Si c’est Montebourg ou Hamon, on pourra plus facilement s’effacer et négocier pour les législatives. La cote de Mélenchon, le lièvre de la fable, peut varier considérablement selon ces scénarios et il peut devenir autant un tremplin qu’un boulet électoral… Tout cela pour ceux qui aiment la politique façon sciences-po !

Enfermées dans ces considérations, dans cette conception fausse et politicienne du rassemblement, les trois options proposées par le « relevé de décisions », exclusives ou complémentaires, sont mauvaises.

Le choix de se ranger derrière Mélenchon était inacceptable pour moi avant 2012. Il l’est toujours. Je me suis amusé d’entendre des camarades du CN s’offusquer de son populisme, de son bonapartisme, de sa démagogie. Mélenchon n’a pas changé. Les mêmes me sifflaient lorsque je citai, avant 2012, dès 2008, tous les exploits de ce politicien mitterrandien.

Aux camarades qui sincèrement, sans ignorer ce qu’ils appellent pudiquement « les défauts » du personnage, considèrent qu’il est le seul à pouvoir faire gagner une option de « gauche » aux élections, je réponds qu’ils se font des illusions, qu’ils tombent dans le piège de la présidentialisation que le Parti n’a cessé de dénoncer, qu’ils ne prennent pas en compte les dangers profonds du discours de Mélenchon. Son populisme inachevé risque – et la démonstration a été faite dans le Pas-de-Calais déjà – de servir de marchepied au FN.  Puisqu’il est beaucoup question en ce moment du sulfureux conseiller fasciste de Sarkozy, Patrick Buisson, il n’est pas inutile de rappeler que Mélenchon et lui entretiennent une vieille amitié politique.

Devant l’insatisfaction des communistes, leur frustration devant cette ligne d’impuissance, certains proposent – c’est une des options mises en débat – une vraie-fausse candidature, un leurre pour tenter d’exister dans le débat médiatique (avec un « appel à candidatures » dans le « relevé de décisions » borné par l’acceptation de la stratégie de « rassemblement » politicien). Puis, cette candidature, on la retirerait en janvier ! Ceux qui prônent ainsi une déclaration de candidature de Pierre Laurent dès maintenant ne lui font pas un cadeau. Il serait littéralement massacré dans les sondages ! Et le Parti avec ! Un candidat communiste sur la ligne de Tsipras, sur une ligne pro-UE, un candidat qui ne cesse de rechercher le rassemblement le plus large « à gauche » et donc de se dévaloriser lui-même !

Si jamais le PS et le système décidaient de maintenir Hollande candidat, pour mieux recomposer la gauche après son échec électoral cinglant, et que Pierre Laurent présente effectivement sa candidature, le pire est à redouter. Souvenons-nous de ce que représentait le PCF début 2002 et de ce qu’il a représenté ensuite, après la bérézina de Hue aux présidentielles (3,37%).

Pour certains, dans un premier temps, la candidature-leurre pourrait être portée par une personnalité plus consensuelle, plus pateline, celle d’André Chassaigne. Mais l’expérience a été faite depuis 2011 de ses conceptions. En 2011, il se présentait pour donner le change et cautionner Mélenchon. Depuis, comme avant, il est, dans le « Front de gauche » et à l’Assemblée, l’un des plus chaleureux partisans du rassemblement de toute la gauche, avec presque tout le PS. Les cheminots n’auront pas oublié que cela l’a amené à ne pas s’opposer en commission parlementaire aux pires articles de la « réforme » ferroviaire en 2014, dont la dissolution de la SNCF.

Reste la 3ème hypothèse proposée : celle d’attendre pour mieux attendre, y compris le 5 novembre. C’est celle qui traduit le plus sincèrement l’état d’esprit du CN. Peut-être même que, dans l’intérêt du parti, vu l’état de la direction, si l’on attendait mai 2017, ce ne serait pas plus mal. Une membre du CN a d’ailleurs fait remarquer, à juste titre, que pour les législatives, ramené localement, on n’a pas trop de mal à imaginer des accords à gauche…

Mais, par rapport à ce que représente et doit encore représenter notre Parti, par rapport aux attentes des communistes, ce choix de résignation est tout aussi inacceptable.  Et je ne l’accepte pas.

Dans cette situation difficile et navrante, que bien des camarades, nous ne découvrons pas, il me semble que le plus important reste, plus que jamais, de faire s’élever la lucidité, de se débarrasser des illusions et d’aller à l’essentiel : sauver notre parti de ces stratégies suicidaires, en le faisant vivre, dans le plus d’entreprises, de villes et de campagnes, sur des bases de classe. Autant que possible, aussi, dans les campagnes électorales dans un maximum de circonscriptions aux législatives.

Ne laissons pas réduire à prétextes électoraux décoratifs les mobilisations contre la loi El-Khomri, contre la répression antisyndicale, contre l’état d’urgence (approuvé par Chassaigne et Laurent !), contre la guerre impérialiste, contre la casse des services publics et de la Sécurité sociale ! Développons les arguments, les campagnes, les luttes, les perspectives de rupture contre cette politique, contre la politique du capital, mise en œuvre par une démocratie bourgeoise aux abois, prête à recourir au fascisme et coordonnées par l’UE et le capitalisme international.

C’est l’option que nous allons faire entendre le plus fortement possible, en faisant jouer tout ce qu’il peut y avoir encore de démocratique dans les statuts actuels du PCF, et l’engagement sincère de milliers de communistes.

Emmanuel Dang Tran, 29 septembre 2016

CN du PCF du 15 avril 2016 (primaires/congrès) – Intervention de Dominique NEGRI

Conseil national du PCF, 15 avril 2016, intervention de Dominique Negri, fédération de l’Isère

La résolution que vous allez adopter nous enfonce dans le piège des primaires. Elle prépare de nouvelles divisions entre communistes tout en évacuant les débats dont ils auraient absolument besoin, dans le cadre d’un congrès digne de ce nom, notamment sur le bilan de la stratégie mise en œuvre avec le Front de gauche depuis 2008 et 2012.

Avec de ce débat qui prend toute la place, cette impasse politicienne pour le PCF, le congrès est confisqué aux camarades.

Les communistes n’ont pas besoin d’écuries pour 2017, mais de mobilisation immédiatement dans les luttes. Contre le projet de loi El-Khomri, notre objectif ne peut être que son retrait ouvrant à une remise en cause de toute la politique du gouvernement de « gauche » et de ses relais. Il passe aussi par la construction de convergences de lutte avec les cheminots et les fonctionnaires notamment. Je pense notamment à cette administration, les finances publiques, au cœur des attaques des politiques d’austérité, des menaces que font peser les perspectives du prélèvement à la source et de la fusion, voulue par les « frondeurs » de la CSG et de l’impôt sur le revenu. Contre le projet El-Khomri, les travailleurs ont besoin d’une victoire !

C’est sur ce plan que je situe l’espoir et non dans la construction politicienne d’un « processus », de « primaires » ou peu importe le nom qu’on lui donne. Même si l’ordre du jour de ce CN n’est pas prioritairement là, je trouve que nos échanges sur les primaires, s’ils étaient retransmis, pourraient décourager les travailleurs…

Certaines voies qui peuvent paraître comme des boulevards n’en sont pas moins des impasses. Remettre en selle Mélenchon maintenant, éternel homme providentiel, la personnalité qu’il faudrait pour en finir avec le pouvoir personnel, en est une sacrée d’impasse. Celui qui a appelé à voter Hollande comme pour le lui-même, qui conspue les communistes, qui copine avec Dassault et multiplie les sorties nationalistes ? Une fois, ça suffit ! ça déjà été de trop ! Une candidature issue du PCF, dans le cadre d’un rassemblement « primaires » à la Tsipras, allant jusqu’à Cohn-Bendit !  Elle n’aura plus rien de communiste et ne peut qu’entraîner le parti à un nouvel échec d’autant plus grave que le « Front de gauche », les compromis d’hier et d’aujourd’hui avec le PS, ont encore terriblement affaibli structurellement et sur le fond le Parti.

La résolution d’aujourd’hui nous promet une conférence nationale sur les présidentielles ? Oui, mais avec le choix des primaires, imposé en marge du congrès des communistes, elle sera complètement faussée et condamnée à s’enfermer dans ce cadre.

C’est ce qu’avec 1000 communistes, je refuse à travers l’appel pour la sortie immédiate du Parti du processus des primaires.  

La préparation de ce congrès est délibérément précipitée et détournée de son objet. Il n’est que plus important de ne pas laisser faire en utilisant le texte alternatif, « Reconstruisons le Parti de classe ! Priorité au rassemblement dans les luttes » comme base de débat, et moyen d’enrayer le scénario mortifère pour le Parti que les primaires annoncent.

CN du PCF – janvier 2016 – Intervention de D. NEGRI

Conseil national du PCF des 16 et 17 janvier 2016, intervention de Dominique NEGRI, fédération de l’Isère

Je retiens que le rapport de Pierre Laurent et la plupart des interventions font le constat – il est temps ! – de l’échec du « Front de gauche ». Pierre invite à faire un « bilan sans complaisance » des stratégies à l’œuvre depuis plusieurs années et sans les réduire aux seuls résultats électoraux. Allons-y ! Et sérieusement ! Et en remontant aussi loin qu’il faut.

Souvenons-nous, sans aller plus loin, de 2007 quand la stratégie d’effacement du Parti dans les « collectifs antilibéraux » a abouti au terrible résultat électoral que l’on sait. La réaction immédiate des dirigeants du Parti a consisté à vouloir aller plus avant dans la même stratégie suicidaire, avant de constituer le Front de gauche. Après le naufrage du Front de gauche qu’achèvent de confirmer les élections régionales, je crains qu’on ne tire les mêmes conclusions erronées qu’en 2007 : continuer dans le mur.

J’ai retrouvé les déclarations au journal « Le Monde » du 14 septembre 2007 de notre camarade Olivier Dartigolles, à l’époque déjà porte-parole du PCF :

« On ne peut plus se la raconter. Après la claque électorale qu’on s’est prise, si on fait comme avant, on meurt », dit-il. Désormais, il est persuadé qu’il faut « une nouvelle organisation politique » dans laquelle existerait « une sensibilité communiste organisée ». Pas un « parti ripoliné », mais bien une autre organisation avec d’autres sensibilités, antilibéraux, socialistes de gauche, syndicalistes, altermondialistes ».

Aujourd’hui, après les régionales, Olivier Dartigolles, toujours porte-parole national, déclare au Figaro du 14 janvier 2016: « L’une des questions majeures qui seront abordée portera sur la nature et le rythme du changement des transformations au PCF ». « Il faudra répondre à la crise de confiance qui touche les partis, à leur déconnexion avec la société, sans jeter tout notre patrimoine. Il faudra tout explorer, sans tabou » explique-t-il. Même la délicate question d’un changement de nom du parti pourrait être abordée. »

Honnêtement, camarades, vous voyez une différence ? Collectifs antilibéraux, Front de gauche avec le PG, demain « fabriques citoyennes » avec les partenaires des « primaires » : on tourne en rond, en termes de stratégie politicienne! Avec un seul résultat obtenu à chaque fois: l’effacement du PCF, du parti de lutte et de ses positions révolutionnaires.

Aujourd’hui encore, le rapport pose la question complètement de travers. Au lieu de discuter pour savoir comment sauver « la Gauche » avec les élections de 2017 comme finalité (en créant de nouvelles illusions électorales), posons la question : comment le PCF redevient le parti dont les travailleurs ont besoin dans la lutte des classes très agressive que, globalement, ils subissent. Avec éventuellement, le moment venu, les élections uniquement pour la relayer (sans illusions).

Il est lamentable que toute cette réunion du Conseil national ait été tournée vers l’éventualité de « primaires à gauche ». Mon avis ? Pour moi, c’est non à cette farce, à cette mascarade politicienne destinée à accentuer le brouillage politique (que ce soit à « la gauche de la gauche » avec le souvenir de la piteuse expérience des « collectifs antilibéraux » ou que ce soit « avec toute la gauche »). Et je ne veux surtout pas que l’on embarque – comme dans les épisodes précédents – les communistes, malgré eux, sur cette voie, sur la voie d’une nouvelle recomposition politique qu’ils ne pourraient que valider et subir après coup.

Quelques mots sur le principal dans le peu de temps qui m’est imparti :

-          La tromperie du mot d’ordre de « l’Europe sociale », de la réorientation de l’UE et de l’euro, ces outils d’exploitation économique et de mise en concurrence des peuples de l’UE, est de plus en plus dénoncée, exemple grec à l’appui. Enfin, j’ai entendu quelques autres voix s’élever ici. Poser la question de la rupture à tout niveau avec l’UE du capital est essentiel dans la préparation du congrès.

-          De nombreuses luttes sectorielles se développent. J’en cite une qui me concerne directement en tant qu’employée et militante syndicale aux finances publiques : la grève du 26 janvier pour les salaires et l’emploi (32.000 suppressions de poste depuis 2002 aux finances !). La casse du statut de la fonction publique est à l’œuvre sous ce gouvernement de « gauche ». Le protocole PPCR (Parcours professionnels, carrières et rémunérations) en est un instrument étendant notamment la mobilité forcée, les rémunérations à la tête du client. L’absence de position nationale offensive du parti a facilité un certain flottement syndical sur cette question (la direction de la FSU approuvant le PPCR !). Agissons !

Enfin je vous annonce qu’il y a déjà plus de 150 inscrits aux vœux de la section de Saint-Martin-d’Hères le 31 janvier que précédera un meeting sur la coordination des luttes sociales dans l’Isère. Face au fatalisme ambiant : Résistance !

Au Conseil national du PCF du 2 avril 2014, j’ai voté contre « l’offre du PCF » pour des listes « Front de gauche » aux élections européennes.

Emmanuel Dang Tran, 4 avril 2014

Je ne chercherai pas à comprendre pourquoi Pierre Laurent dans sa conférence de presse d’hier, reprise par l’Huma d’aujourd’hui, affirme à tort que le Conseil national du 2 avril a adopté à l’unanimité son « offre politique au Front de gauche pour les listes aux élections européennes ». Le vote des présents à 16h15 a donné le résultat suivant : 74 voix pour et 2 contre, celle d’Eric Jalade et de moi-même.

Voici les raisons de mon vote. Elles expriment mon désaccord avec le contenu imposé de la campagne, avec la méthode retenue par le Front de gauche, méprisante des communistes, avec « l’offre » elle-même.  Après la sévère défaite des municipales, si injuste pour les militants, il est moins temps que jamais d’étouffer les débats de fond dans le Parti.

Je commence par « l’offre politicienne » mais je finis par eux.

Prenant acte de la décision de la direction, que je ne partage pas, de continuer la formule « Front de gauche » pour les élections européennes, je considère inacceptable l’offre concédée aux « partenaires » par les négociateurs du Parti.

Elle revient à leur laisser tous les sièges de députés potentiellement gagnables, dans le cas très incertain où le Front de gauche passerait de 6 à 10% par rapport à 2008 : le deuxième de liste en Ile-de-France, le 1er dans la région est pour le PG, le 1er dans la région ouest au regroupement de groupuscules et de personnalités dénommé « Ensemble » (ex « refondateurs »). Il faudrait une multiplication par 2,5 à 3 du résultat de 2008 pour que le PCF gagne un élu. Autant dire que dès le départ, la direction du PCF limite les prétentions objectives de notre parti au maintien de ses deux seuls sortants.

Autant de concessions pour quoi dans ces tractations en catimini qui traînent depuis des mois ? Pour représenter en tête de liste et faire réélire Mme Marie-Christine Vergiat dans la région Sud-est, choix défendu avec entêtement par Pierre Laurent. Je refuse l’idée que Mme Vergiat, parce qu’elle n’a pas la carte du PCF ou celle du PG, représente les 99,9% des Français qui sont dans son cas. En tant que personnalité, si elle ne représente qu’elle-même, Mme Vergiat n’est effectivement pas n’importe qui. Elle a été collaboratrice de Martine Aubry dans le gouvernement de la gauche plurielle. Elle a été secrétaire générale du groupe PS à l’Assemblée nationale de 1991 à 1997, c’est-à-dire qu’elle a coordonné les interventions des députés socialistes en faveur du Traité de Maastricht puis de la monnaie unique et du Traité d’Amsterdam. Si c’est une ouverture, c’est bien une ouverture à droite !

Mme Vergiat vient de profiter de 5 ans de sinécure au Parlement européen avec nos voix et à nos frais. Les communistes peuvent-ils se permettre d’être généreux encore avec elle en leur cédant un siège sur trois ?

En politiciens roués aux négociations d’antichambre, les PG concentrent leur attaque sur la région Sud-est, revendiquant la tête de liste pour eux-mêmes et proposant même une combinaison moins défavorable pour le PCF que la propre direction du Parti (une deuxième place dans la région au lieu d’une troisième). Décidemment, les coups volent haut avec le Front de gauche.

Pour moi, la question n’est pas de préparer une réorientation pro-européenne avec le Front de gauche, pas plus avec avec EELV comme le privilégie le PG, qu’avec des éléments issus du PS qu’ils passent par la case PG ou non. Elle n’est pas non plus, avec les uns ou les autres, de préparer une recomposition politique et une gauche d’appoint ou de recours à « gauche » du gouvernement. La priorité est de redresser le Parti communiste.

Dans cet état d’esprit j’ai proposé que nous exigions une tête de liste PCF dans la région Sud-est et qu’en vue de négociations difficiles avec des « partenaires » bien moins représentatifs, que la direction du Parti aillent avec des listes PCF complètes sous la main dans toutes les régions.

Je ne suis pas mécontent d’avoir suscité l’hilarité de Pierre Laurent qui doit juger cette hypothèse aussi inconcevable aujourd’hui que de présenter un candidat communiste aux présidentielles…

Pour sûr, cela signifierait une rupture avec la stratégie délétère du Front de gauche.

Dans les faits, le Front de gauche a une raison d’être structurante : les élections, sinon l’électoralisme. Le résultat est remarquable. Depuis 2008, le Front de gauche n’a cessé de faire perdre des élus aux PCF en continuant à effacer son identité et ses positions historiques : la moitié des conseillers régionaux, des députés etc.

Sans parler du coût financier pour le PCF qui assume les frais. Le PCF nationalement et les fédérations ont réglé pour Mélenchon les 527.000 euros de dépassement de plafond de sa campagne présidentielle. Au Conseil national du 23 janvier 2014 examinant le budget du CN, Dominique Negri et moi-même avons obtenu les informations montrant que les cotisations ôtées aux sections depuis le congrès de 2013 et la baisse des aides aux fédérations allaient aux dépenses du Front de gauche. Avec la perte de 50 municipalités et de centaines d’élus, la situation de nombreuses fédérations va devenir critique.

Pour la préparation des européennes, la démarche du Front de gauche est encore plus inacceptable que jamais dans le mépris des communistes. Le contenu de la campagne n’a pas été discuté. L’examen du texte de congrès de 2013 a été bâclé dans les conditions que l’on sait. Une « convention » du PCF, rassemblant un quart de ses participants théoriques le 16 novembre 2013, a adopté un texte touffu dont très peu de communistes ont eu connaissance et aucun discuté. De surcroît, ce texte est délaissé pour un accord avec les partenaires du Front de gauche sur une ligne négocié on ne sait où, qu’en définitive le Maastrichien Mélenchon va incarner seul. Enfin, les candidatures qui la porteront seront le résultat de lamentables tractations de couloirs. Pour couronner le tout, Pierre Laurent et Jean-Luc Mélenchon ont déjà placé la campagne française sous le haut patronage supranational d’Alexis Tsipras.

Le leader du parti grec Syriza, réincarnation de la social-démocratie locale faillie, fait de la sauvegarde de l’euro  son cheval de bataille. Il est allé prêter allégeance à Obama. Il se présente à la présidence de la Commission européenne, légitimant cette institution de répression des peuples et de leurs droits acquis.

Avec le Front de gauche, la direction du PCF choisit d’aller complètement à contresens des attentes du peuple travailleur, de son rejet de classe de l’UE, du potentiel de lutte qu’il pourrait porter, à l’opposé de son détournement nationaliste organisé par le système avec le FN. Elle va à contresens de toutes nos positions historiques.

La lourde défaite des élections municipales traduit la perte d’identité, d’identification du PCF, notamment dans ses « bastions » historiques, dans un cadre de crise des solidarités ouvrières. La réunion du Conseil national du 11 avril sera l’occasion de l’analyser. Dans les premières constations, il est frappant que, souvent malgré la campagne des militants, les candidats communistes aient été victimes du vote sanction frappant la « gauche » gouvernementale. L’alignement si médiatisé sur le social-libéralisme de Delanoë et Hidalgo à Paris, précédant l’alliance contre-nature avec les successeurs de Voynet et le PS à Montreuil, a coûté certainement. Mais on doit mesurer le coût dans la durée des abandons de positions historiques aggravées par le Front de gauche et du démembrement du Parti de classe.

Pour redresser la barre tout de suite, les élections européennes pourraient et devraient fournir l’occasion de renouer avec nos positions de toujours contre l’UE du capital, à la nature irréversible, contradictoire avec l’amitié entre les peuples, la paix (regardons l’intervention impérialiste en Ukraine !), l’établissement de coopérations mutuellement avantageuses entre les peuples.

Au minimum, le débat doit avoir lieu. Les propositions illusoires, trompeuses, ou simplement incompréhensible, fumeuses, pour ne pas dire réformistes, de « refondation de l’Union européenne », de « réorientation de la Banque centrale européenne » ou de la Commission avec la candidature de Tsipras sont indéfendables dans le peuple travailleur.

Rompre avec l’UE, avec la fatalité de l’application des traités et directives européens illégitimes sinon illégaux, est une proposition que seuls les communistes peuvent porter dans l’intérêt des travailleurs et du pays. Rompre avec l’euro, ce n’est bien sûr pas l’abolition du capitalisme, mais c’est la mise en échec de l’instrument économique principal de domination de l’Europe des monopoles sur le peuple français, de l’instrument principal d’aggravation de l’intégration européenne contre les acquis sociaux et démocratiques nationaux. Les capitalistes européens, dans leur propre crise, sont en difficulté pour défendre l’euro. Ils craignent la moindre défection, de la Grèce ou même de Chypre sous les coups de la colère populaire. Combattons-les dans les luttes, ne les laissons pas s’en sortir ! Et le combat est avant tout politique, loin des expertises économicistes !

Sans débat profond et large sur ces questions, les élections européennes seront privées de toute possibilité de renforcer les luttes anticapitalistes. Avec l’utilisation de l’extrême-droite elles risquent de se retourner contre elles.

La responsabilité des communistes est immense. Les marchandages du Front de gauche sont en dessous de tout.

Nous avons besoin d’une ligne communiste, dans la continuité des positions défendues de 1945 à 1998 par le Parti. Nous avons au minimum besoin du débat. Et nous avons besoin de candidats communistes pour le susciter et le porter.

Voilà les raisons profondes de mon vote contre … « l’offre » des négociateurs PCF confrontés à Eric Coquerel du Parti de gauche dans la répartition des places sur les listes régionales aux élections européennes…

Je sais que, dans le Parti et à côté, nous ne sommes pas que 2 à nous poser les questions de cette façon !