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Charonne 1962/ 2017: Coïncidences historiques ou concordance des temps

Le 8 février 1962, les martyrs de Charonne sont tombés sous les coups de l’Etat policier, sous le régime de l’état d’urgence, parce qu’ils se battaient contre la politique criminelle colonialiste et néo-colonialiste de l’impérialisme français : cela ne vous dit rien aujourd’hui ?

ETAT POLICIER :

En 1962, le pouvoir, représenté par le préfet de police Papon, ex-collabo, laisse libre cours à la violence policière, l’encourage jusqu’à couvrir ses crimes. Il s’agit, à la veille de l’indépendance inéluctable de l’Algérie, d’empêcher les organisations et militants ouvriers (PCF et CGT en tête) de sortir renforcés de leurs durs et courageux combats contre le colonialisme. Il s’agit aussi de mater les revendications des travailleurs algériens que la misère et la guerre coloniales et le besoin de main d’œuvre sur-exploitable des patrons ont conduits en  métropole. Quelque rapport avec la situation des « migrants » aujourd’hui?

Tous les policiers, loin de là, ne s’adonnent pas à la violence. Il s’en trouve même qui chercheront courageusement à participer à l’établissement de la vérité sur le massacre de Charonne. Ils seront durement sanctionnés.

En 2016, la police est mobilisée (par la « gauche » !), au prétexte du danger terroriste, pour réprimer les mobilisations des travailleurs contre la politique antisociale du gouvernement. Une intense propagande est déployée pour célébrer la police et légitimer son action répressive, sinon sa violence.

Puis, d’étonnantes et inquiétantes manifestations « spontanées » de policiers cagoulés, avec des porte-parole fascisants, bénéficient de la bienveillance des politiciens et des médias. Le gouvernement complaisant fait voter, en urgence, une loi spéciale étendant les situations de « légitime défense » des forces de l’ordre.

Communistes, nous sommes parfaitement conscients de la dégradation des conditions d’exercice du service public de la police, suite à la politique d’austérité, de suppressions d’emploi, à la crise du système. Les policiers exercent un métier pénible avec un taux d’accidents du travail qui se situe aux 2/3 de celui des ouvriers du bâtiment. Mais nous ne laissons pas détourner le mécontentement des policiers, notamment dans l’opinion, vers une nouvelle dérive répressive, vers un abandon (au privé) et une perversion de leurs missions réelles de service public, destinés, évidemment, à mater les luttes sociales à venir. Sur ce point, comme sur tant d’autres, nous refusons d’être assimilés, de près ou de loin, aux positions du social-chauvin Mélenchon.

NON, TOUJOURS NON, A LA GUERRE IMPERIALISTE!

En 1962, nos camarades se battent contre le coût humain dramatique de la guerre d’Algérie, pour la paix, le retour des appelés, contre le coût exorbitant de la guerre que le système fait payer aux travailleurs.

En 2017, l’armée française fait la guerre dans une dizaine de pays à des milliers de kilomètres de chez nous. Une répugnante campagne de recrutement essaie de diriger les jeunes chômeurs vers la guerre professionnelle et le casse-pipe. Dernièrement, après les attentats de Berlin, le général en chef de la soi-disant « grande muette », le général de Villiers, a réclamé dans la presse l’augmentation des dépenses militaires à 2% du PIB (+ 5 milliards d’euros par an!). Il est pourtant évident que des armes de guerre ne servent à rien contre des attentats dans nos villes et clair que les guerres impérialistes françaises, européennes et américaines, attisent les tensions partout dans le monde.

Tous les politiciens du système, notamment tous les candidats de la primaire du PS, relaient la demande d’augmentation du budget de la guerre. Là encore, nous refusons d’être assimilés au militariste Mélenchon qui défend le budget de la défense et l’arme nucléaire (quel écolo !). Non, communistes, nous militons, plus que jamais,  pour un désarmement unilatéral, notamment nucléaire, de la France, pour la sortie de l’OTAN et des politiques de guerre de l’UE, pour le retour en France de tous les soldats français.

ETAT D’URGENCE ?

L’état d’urgence a été spécialement inventé pour la guerre d’Algérie pour que le pouvoir dispose de moyens antidémocratiques exceptionnels, hors de l’état de guerre et de la situation normale. Il a servi à la répression de 1962. Il a été repris en 2015, 2016, 2017, avec l’approbation quasi-unanime des parlementaires. Nous exigeons sa levée immédiate et sa suppression dans la loi.

1962/2017 : coïncidence? Non, concordance, car les travailleurs et les peuples font toujours face au même ennemi : le capitalisme.

CHARONNE Francis Virlouvet :  » J’ai dû la laisser mourir. Elle avait 24 ans « 

Voir aussi, l’analyse du PCF du 13 février 1962 (lien)

Témoignage Francis VIRLOUVET, paru dans l’Humanité du 8 Février, 2002

Le 8 février 1962, Francis Virlouvet, jeune plombier et militant communiste, participe à la manifestation pour la paix et contre l’OAS. · quelques pas de Anne-Claude Godeau, Suzanne Martorell, Hyppolite Pina et Edouard Lemarchand. La charge des CRS les pièges dans l’escalier du métro Charonne avec des dizaines d’autres démocrates. Bilan de cette violence : 9 morts. Parmi eux, Anne, Suzanne, Hyppolite et Edouard.

 » En décembre 1960, je rentrais d’Algérie. J’avais passé trente mois là-bas à Colomb-Béchar. J’avais 21 ans. C’est en revenant en France que j’ai adhéré au PCF. Le sort que la France faisait endurer à ce peuple me révoltait. Il faut dire que durant ma jeunesse à Saulieu j’avais été à bonne école. Mes oncles étaient des résistants. Francis Virlouvet, je porte le même prénom, que l’on surnommait  » l’homme à la poussette « , se déguisait en clochard pour récupérer les tracts dans les imprimeries clandestines (notamment l’appel de juillet 1940) et ensuite les dispatcher sur Paris. Étienne Virlouvet était responsable de la récupération des armes sur l’ennemi. Il a été pendu par les pieds par les Allemands pour tenter de le faire parler.

Dans notre arrondissement, le rendez-vous à la manifestation du 8 février se situait au niveau du marché Secrétan. Nous étions une cinquantaine, des jeunes et des moins jeunes, et nous nous sommes dirigés vers le départ de la manifestation. Je ne me souviens plus où, peut-être vers la gare de l’Est. Des dizaines de groupes comme le nôtre convergeaient de toute la région parisienne. Notre mot d’ordre était simple :  » Paix en Algérie et halte à l’OAS « .

Nous prenons le boulevard Voltaire, nous passons devant la mairie du 11e et nous arrivons vers le métro Charonne. Autour de moi, il y a des camarades de ma section, nous discutons, nous scandons nos slogans, mais d’une manière  » paisible « . Et soudain des cris, des hurlements, et un mouvement de foule. Les CRS venaient de charger. Je me trouve pris dans une poussée terrible qui me projette avec des dizaines d’autres dans l’escalier du métro. Il a été dit que les grilles avaient été fermées, moi je ne m’en souviens pas. L’escalier s’est rapidement trouvé rempli à  » ras bord « . C’était quelque chose de terrible. Les gens étaient les uns sur les autres, hurlaient et les CRS continuaient à matraquer. Ils ont arraché les grilles qui protégeaient les arbres et les ont lancé sur les manifestants prisonniers dans l’escalier. Les CRS se sont acharnés. Ils matraquaient, une fois, deux fois, trois fois, les premiers rangs et revenaient encore à la charge. Nous étions bombardés de grenades lacrymogènes. Pour ceux qui étaient dessous, l’air devenait irrespirable. · un moment, je me suis trouvé à côté d’Anne-Claude Godeau. Elle ne criait pas. Elle pleurait. Je ne voyais que sa tête et le début des épaules. Elle était prisonnière d’un magma humain. Il y avait peut-être cent personnes les unes sur les autres. Anne n’arrivait plus à respirer. J’ai essayé de la dégager. Je lui criais  » essaye de bouger tes jambes, de sortir un bras « . Je l’ai poussé, tiré. Malheureusement je ne suis pas arrivé à la sortir. J’ai dû la laisser mourir. Elle avait 24 ans.

En revanche, on a réussi à dégager une autre camarade, à la descendre dans la station – c’est pour cela que je ne sais plus si les grilles du métro étaient ouvertes ou bien si elles l’ont été à ce moment. Dans la station, l’air était aussi irrespirable que dans l’escalier. Nous l’avons allongée sur le quai et j’ai tenté de la ranimer en pratiquant la respiration artificielle. C’était difficile car j’étais, moi aussi, comme les autres camarades, à moitié asphyxié par les gaz. Je continuais à entendre les insultes des CRS et les explosions des grenades lacrymogènes. J’entendais les cris de ceux qui n’arrivaient pas à se dégager pour se réfugier dans la station. Enfin une rame de métro est arrivée. Nous nous y sommes engouffrés en portant la jeune femme. Je ne savais pas si elle était morte ou vivante. Nous avons essayé encore de la ranimer. · la station suivante, d’autres camarades l’ont prise en charge. Je n’ai appris que le lendemain qu’elle aussi était morte. C’était Suzanne Martorelle. Elle avait 36 ans et était la maman de trois enfants. Après je ne me souviens plus trop de ce que j’ai fait. Il y avait des gens la tête en sang, d’autres soutenus par des camarades car ils avaient des membres brisés, d’autres encore qui pleuraient. Franchement je ne me souviens plus de ce que j’ai fait. Aujourd’hui encore je revois cet escalier, je sens l’odeur des lacrymogènes, et je revois les visages d’Anne et de Suzanne.

Il y a 51 ans, le massacre du 17 octobre 1961

L’Etat impérialiste a recours au crime raciste: souvenons-nous-en et opposons-lui l’unité des travailleurs !

Le 17 octobre 1961, dans les derniers mois de la guerre d’Algérie, 30.000 travailleurs algériens manifestent pacifiquement à Paris.

Le Front de libération nationale, le FLN, a organisé cette mobilisation pour dénoncer le couvre-feu raciste instauré à l’encontre des Algériens vivant en région parisienne, pourtant officiellement considérés comme citoyens français par l’Etat colonial.

La manifestation est réprimée avec une violence inouïe. La police frappe, tabasse, roue de coups, tire. Elle jette des centaines de manifestants dans la Seine pour qu’ils se noient. Des milliers sont arrêtés, battus, sinon torturés plusieurs jours durant dans des centres de rétention. Selon les historiens, il y aurait eu entre 100 et 300 morts.

 

Le déchaînement policier a été minutieusement organisé. Il est directement le résultat de consignes précises de l’autorité, du préfet de police Maurice Papon, celui-là même qui, en tant que secrétaire général de la préfecture de la Gironde, aida à déporter les juifs de Bordeaux sous l’Occupation.

Les crimes des policiers du 17 octobre 1961 seront tous couverts. Les faits seront et sont encore étouffés aujourd’hui officiellement.

Il ne s’agit de rien d’autre que d’un crime d’Etat, d’un crime de l’Etat impérialiste français.

 

Fin 1961, l’indépendance prochaine de l’Algérie ne fait plus de doutes. Mais, l’impérialisme français entend préserver les intérêts des compagnies françaises, son accès aux ressources naturelles, au pétrole, malgré la décolonisation.

La guerre et la répression continuent afin de peser sur les négociations, en Algérie mais aussi en France.

Le capitalisme français entend aussi continuer à exploiter au maximum les travailleurs immigrés algériens sur le sol français et ne peut supporter leur révolte et leur organisation.

 

Le racisme est intrinsèque au colonialisme, au capitalisme, à l’impérialisme.

Ceux qui les combattent leur opposent l’unité des travailleurs.

Adversaires les plus constants et résolus du colonialisme, le PCF et la CGT, avec quelques rares autres, ont organisé l’intervention des travailleurs français pour la paix en Algérie.

Dans les mois suivant le 17 octobre 1961, alors que les crimes des jusqu’au-boutistes de l’Algérie française, les fascistes de l’OAS, se multiplient des deux côtés de la Méditerranée, la mobilisation s’amplifie.

Le 8 février 1962, la répression, organisée par le même préfet Papon, massacre 9 manifestants cégétistes dont 8 communistes au métro Charonne.

Comment ne pas rapprocher ces deux tragédies ?

Exigeons plus que jamais toute la vérité sur Charonne, toute la vérité sur le 17 octobre 1961 que les autorités continuent occulter !

Plus que jamais, 51 ans après, rendons hommage aux martyrs du 17 octobre 1961 et à ceux du 8 février 1962 qui luttèrent ensemble jusqu’à la mort pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

Le PCF après le massacre de Charonne le 8 février 1962

110209_charonne_obseques.jpg 49 ans après le massacre de Charonne, nous reproduisons ci-dessous l’éditorial des Cahiers du communisme de février 1962, numéro intitulé « gaullisme et fascisme ».

Les analyses du Parti éclairent les collusions et intérêts communs entre pouvoir gaulliste au service du capital et fascistes de l’OAS qui expliquent la violence de la répression policière contre les manifestants antifascistes et anticolonialistes.

(Il n’est alors question que de 8 morts, la dernière victime, communiste également, devant décéder à l’hôpital peu après).  

 

 

 

Devant le péril fasciste

 

Au moment où nous écrivons ces lignes, le peuple de Paris, au cours d’obsèques solennelles et grandioses, accompagne à leur dernière demeure les huit martyrs antifascistes tombés sous les coups de la police gaulliste le 8 février dernier.

L’assassinat de ces travailleurs, dont sept d’entre eux étaient communistes, a soulevé dans tout le pays et à l’étranger une émotion profonde et une réprobation unanime.

C’est pour protester et s’élever contre le danger grandissant du fascisme, contre la poursuites des plasticages criminels des hommes de l’OAS, pratiquement jamais inquiétés ou restant impunis, que la classe ouvrière et le peuple se sont dressés en de puissantes manifestations antifascistes. Mais c’est contre elles que le pouvoir gaulliste a dépêché ses forces policières et répandu le sang.

La diversion anticommuniste du gouvernement pour tenter de justifier sa sauvagerie policière, éclaire une peu plus sa nature profondément réactionnaire, éclaire sa collusion de fait avec l’OAS. Elle montre d’une façon tragique que le pouvoir gaulliste, pouvoir des monopoles s’attaque en fin de compte à tous ceux : communistes, socialistes, catholiques, démocrates et républicains qui entendent faire barrage à l’OAS et n’acceptent pas de vivre sous le joug d’une dictature personnelle synonyme d’oppression, de misère et de guerre.

Contre la montée du péril fasciste, l’idée que le peuple doit compter désormais sur ses propres forces unies pour lui barrer la route a fait d’importants progrès.

L’union réalisée, notamment au soir du 8 février, le démontre. Cette union s’est d’ailleurs puissamment renforcée lors de l’appel à la grève générale le jour des obsèques lancé par toutes les organisations syndicales parisiennes, auxquelles se sont associés notre Parti, le PSU, le Mouvement de la jeunesse communiste, le Mouvement de la paix.

Même les décisions de grève et de manifestation de la CFTC, FO et de la FEN, du Parti socialiste SFIO, lancées pour le lundi 12 février, bien qu’elles contiennent une part d’arrière-pensée et de manœuvre sont avant tout l’expression du puissant mouvement de masse contre le fascisme qui se développe actuellement.

Une telle prise de conscience du danger OAS et un tel développement de l’action unie pour lui faire échec, sont avant tout le résultat de la juste politique et de l’action courageuse menées par notre parti.

Dénonçant, d’une part, sans relâche la nature du pouvoir personnel ouvrant la voie au fascisme, travaillant, d’autre part, sans relâche à l’union de toutes les forces ouvrières et démocratiques, notre parti s’est révélé, une fois encore, la force principale dans la lutte antifasciste, le parti qui montre, non seulement, au peuple la voie de l’intérêt national, mais organise son combat pour reconquérir les libertés et la démocratie.

 

Le grand problème du moment réside donc dans l’organisation rapide et puissante de toutes les forces ouvrières et démocratiques afin de dresser un barrage infranchissable aux fascistes de l’OAS et de les écraser.

Mais la lutte antifasciste ne saurait se mener efficacement et aboutir victorieusement sans avoir la claire conscience que le danger OAS ne se limite pas uniquement à l’éventualité d’un coup de force.

En effet, l’attitude complice du pouvoir à l’égard de l’OAS, la persistance des dirigeants socialistes de droite à refuser l’unité ouvrière, à prôner l’anticommunisme, à afficher certaines thèses rejoignant celles de l’OAS, montrent parfaitement que certains milieux n’ont pas abandonné l’idée d’un compromis avec les factieux. S’il est vrai que l’OAS ne repose sur aucune force populaire, qu’elle n’a aucune audience dans le peuple de notre pays, par contre, elle tire sa force et son arrogance de la mansuétude du pouvoir gangréné par ses hommes, elle tire aussi sa force de la politique de division et de capitulation des dirigeants socialistes de droite et de certains hommes politiques qui se réclament de la démocratie.

La vigilance et la nécessité de tout mettre en œuvre pour répondre à un éventuel coup de force fasciste ne sauraient donc nous faire oublier que les méthodes du néo-fascisme revêtent d’autres formes, celles par exemple de l’utilisation du compromis politique, et cela notamment sous prétexte d’éviter la guerre civile.

C’est pourquoi, il est nécessaire d’analyser et de dénoncer systématiquement l’attitude comlplice du pouvoir gaulliste en même temps que la politique de division des dirigeants socialistes de droite.

Il est bien évident que si des contradictions réelles, mais secondaires opposent le pouvoir aux hommes de Salan, il n’en reste pas moins que ce pouvoir du capital monopoliste et de la haute banque conserve pour adversaire principal : les masses populaires qu’il tente de courber toujours plus sous son joug.

Cette contradiction fondamentale entre la classe exploiteuse au pouvoir et les masses laborieuses, que notre parti a toujours éclairée ne saurait en aucun moment s’estomper. C’est elle, au contraire, qui explique que pour continuer à mener une politique antipopulaire et antinationale le pouvoir gaulliste se trouve tout naturellement entraîné à pactiser avec les factieux, à les utiliser, et, par conséquent, à composer avec eux.

Dans le conflit algérien, la recherche d’une solution la moins défavorable possible à l’impérialisme français se trouve ainsi aidée par la pression politique que représente l’agitation factieuse.

De plus, le pouvoir ne peut se priver de l’instrument de répression et d’oppression que représentent pour lui les forces du fascisme dans la lutte contre l’action grandissante des forces démocratiques et nationales.

Toutes ces constatations d’aujourd’hui confirment combien notre parti avait apprécié justement – et dès son avènement – la nature du pouvoir gaulliste qui porte en lui la menace du fascisme déclaré.

Les tentatives de compromis de certains milieux de gauche avec la bourgeoisie s’illustrent par des prises de position identiques, notamment à propos de l’Algérie.

Guy Mollet s’acharne toujours à réclamer sur le problème algérien des « garanties pour la minorité européenne » qui s’apparentent plus à des garanties de caractère colonial qu’à des garanties légitimes. En fait cette position rejoint les exigences colonialistes de de Gaulle et remet sans cesse en cause l’idée de l’application sans restriction du droit des Algériens à l’autodétermination et à l’indépendance.

Il en va de même des positions énoncées par Maurice Faure, président du Parti radical, sur cette question. Elles rejoignent aussi les déclarations politiques d’hommes comme Jules Romains, André Morice, Lacoste et Lejeune qui, sous couvert d’un prétendu « comité de la gauche », parlent à propos des négociations franco-algériennes du « dédain manifesté au peuple français d’Algérie ».

Mais aujourd’hui, étant donné les reculs des forces colonialistes et le développement continu de l’action populaire, rien ne doit s’opposer à la conclusion d’un accord aboutissant à la paix en Algérie.

L’accord politique entre certaines formations de gauche et la grande bourgeoisie au pouvoir ne se limite pas seulement à ce problème. Que ce soit sur la constitution antidémocratique imposée par de Gaulle, le Pacte Atlantique ou le Marché commun, de nombreux autres points d’accord unissent ces formations au pouvoir.

Ainsi, comme le déclarait Paul Laurent dans son rapport devant le Comité central de Choisy-le-Roi : « certains chefs politiques de la bourgeoisie, y compris les socialistes de droite, inquiets des difficultés plus grandes des monopoles capitalistes à continuer leur politique antipopulaire et antinationale, se préoccupent d’en redorer le blason, encore une fois sous le couvert d’une pseudo « troisième force ». Sans porter atteinte le moins du monde au système du pouvoir personnel, ils proposent, dans un soi-disant but d’apaisement, de capituler devant certains exigences de l’OAS ».

 

 

Ainsi au cours de la grande bataille engagée par notre peuple contre le péril fasciste, il est absolument indispensable de battre en brèche la politique de capitulation et de compromission des dirigeants socialistes de droite.

Le danger OAS actuel, inséparable de la désastreuse politique pratiquée par le pouvoir depuis trois années, n’est-il pas issu de la politique de division, de la politique de collaboration de classe pratiquée précisément par les dirigeants socialistes qui, sous couvert d’anticommunisme et par crainte du peuple, aidèrent de Gaulle à se hisser au pouvoir ?

L’anticommunisme – et cela apparaît de plus en plus aux yeux des masses actuellement dressées et unies dans le combat antifasciste – recouvre toujours la poursuite de la politique d’entente avec la grande bourgeoisie.

La répression sanglante organisée le 8 février dernier par le pouvoir gaulliste à l’égard des forces populaires dressées contre le péril OAS a découvert le vrai visage de la politique tyrannique, de la politique de classe de ce régime. Elle a souligné en même temps la gravité du danger fasciste, la nécessité et les possibilités de l’unité des forces ouvrières et nationales pour y mettre un terme.

Ella a montré dans sa tragédie tout le bien fondé de la politique nationale de notre Parti qui, avec confiance et persévérance, n’a cessé d’alerter et de travailler au rassemblement de toutes les énergies ouvrières et démocratiques afin d’en finir avec la guerre d’Algérie et son corollaire, le fascisme.

La bataille n’est pas terminée, c’est pourquoi les communistes redoubleront d’efforts pour continuer à créer et à renforcer des milliers et des milliers de comités antifascistes dans les entreprises et les quartiers. Ils poursuivront aux côtés de tous les combattants de la paix la lutte pour imposer la solution négociée du problème algérien. Ils continueront à propager avec audace et fierté la politique claire et unitaire de notre parti qui se révèle à travers les événements comme la seule juste et valable.

Ils renforceront dans cette période d’intense activité, l’organisation et les rangs de notre glorieux parti, le Parti des martyrs de la liberté.

 

13 février 1962