Les déclarations de Thierry Le Paon au Nouvel Économiste (« Il n’existe à la CGT aucune opposition de principe face au patronat. ») suscitent au sein des organisations de la CGT de nombreux débats, de vives inquiétudes parmi les militants sur les orientations de la direction confédérale, qui prolongent et aggravent le choix d’un syndicalisme dit « de négociation », tournant le dos à la lutte de classe et aux principes fondamentaux de la CGT.

Nous reproduisons ci-dessous l’adresse de la Commission Exécutive du Syndicat des Cheminots de Versailles à la Commission Exécutive Confédérale.

En lien l’interview de T Le Paon au Nouvel Économiste : http://cgt.fr/Pour-que-le-consensus-emerge-il.html

 

 

Position de la Commission Exécutive du syndicat CGT des cheminots de Versailles à l’attention de la Commission Exécutive Confédérale, à propos des récentes déclarations de Thierry Le Paon au Nouvel Economiste

 

Versailles, le 28 mars 2014

Chers camarades,

C’est avec consternation que nous avons pris connaissance des récentes déclarations de Thierry Lepaon, secrétaire général de la CGT, au journal Le Nouvel Economiste :

«  Il n’existe à la CGT aucune opposition de principe face au patronat. L’entreprise est une communauté composée de dirigeants et de salariés – là encore, je regrette que les actionnaires fassent figures d’éternels absents – et ces deux populations doivent pouvoir réfléchir et agir ensemble dans l’intérêt de leur communauté. Sur ce plan, il est évident que le pragmatisme syndical s’impose.

Cette perspective ne me gêne pas, pas plus que celle du compromis qui s’inscrit dans les réalités de l’entreprise depuis toujours : encore une fois, dès lors que nous sommes contraints de vivre ensemble, il faut bien trouver les conditions de ce vivre-ensemble. C’est pourquoi je considère que la vocation d’un syndicat ne se résume plus aujourd’hui à protéger les salariés mais consiste à agir pour faire évoluer non seulement le monde du travail mais aussi la perception qu’on en a ; à incarner une forme de régulation sociale. »

Ceci est une violation pure et simple de nos statuts confédéraux, dans lesquels la CGT se définie comme un syndicat « de classe et de masse » et détermine clairement que les contradictions d’intérêt entre Capital et Travail sont irréconciliables.

Les principes fondateurs de la CGT ne sont pas que des mots, un verbiage périmé, mais bien la base, la source de notre engagement et de nos luttes, mais aussi, ce qui nous différencie des syndicats jaunes, des syndicats réformistes qui acceptent le fait accompli de l’exploitation capitaliste, alors que la CGT s’est toujours définie par un syndicalisme de transformation révolutionnaire de la société, voué à mettre un terme à l’exploitation capitaliste et dont les luttes immédiates ont pour but de faire primer les intérêts du Travail sur ceux du Capital.

Nous dénonçons clairement cette initiative, comme nous avions dénoncé à l’été 2012 la position de Thierry Lepaon comme rapporteur CGT des travaux du CESER sur l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageur, qui déjà semblait admettre, au nom de la CGT, le fait accompli de la privatisation du réseau et de la mise en concurrence des salariés, en violation des orientations de la fédération CGT des cheminots.

Syndicat CGT de base, impliqué dans les luttes tant sur le champ professionnel que territorial, nous exprimons notre réprobation face à ce qui nous apparait comme une tentative de « recentrage » de notre confédération que nous ne saurions admettre.

Par ailleurs, que signifie la phrase « je crains un net rejet de l’Europe », alors qu’après des débats de haut niveau en 2005, dans les syndicats, les Unions Locales puis au CCN de notre organisation sur la nature de l’Union Européenne, la CGT a appelé à voter NON, ce qui a contribué au « net rejet » de la constitution européenne à 54 % des voix ?

L’Union Européenne a été bâtie par les Monopoles capitalistes pour leur seul profit, et le Capital utilise cette structure comme un bulldozer pour casser les droits sociaux et briser la résistance des travailleurs dans chacun des pays de l’Union, ce « net rejet » de l’UE par les travailleurs, n’est en rien un repli chauvin.

La Commission Exécutive du syndicat CGT des cheminots de Versailles réaffirme que la CGT n’est pas un « lobby » à la recherche du « consensus » avec le patronat, avec qui les salariés formeraient une « communauté » ayant des intérêts communs au sein de l’entreprise, mais une organisation de lutte de classe et de masse qui organise les exploités afin de combattre l’exploitation capitaliste et faire primer leurs intérêts sur ceux du Capital.

Nous exigeons enfin que la direction confédérale de la CGT applique le mandat qui lui a été confiée par le 50° Congrès de la CGT, et respecte les statuts et les valeurs de notre organisation.

Bien fraternellement,

La Commission Exécutive du syndicat