Conseil national du PCF du 18 juin 2012

Intervention d’Emmanuel DANG TRAN, fédération de Paris

 

Le texte de résolution que nous présente Pierre Laurent est irrecevable. Il n’a rien à voir avec un « bulletin de vote ».

Voilà un texte de 53 lignes communiqué aux membres du CN à 10h30 pour être ratifié avant 13h00, puis expédié aux sections dans l’après-midi pour que les communistes se prononcent en 24 heures chrono. Cette précipitation est injustifiable et inacceptable.

Il n’y a pas que ça. La méthode ne permet pas aux communistes de se prononcer sur les questions en jeu. Elle les manipule.

Dans un courrier aux secrétaires fédéraux, la direction promettait une « question simple et claire sur la participation au gouvernement ». La résolution ne pose même pas de question explicite. A quoi doit-on répondre « oui » ou « non » ?

Le texte touffu, embrouillé, de Pierre Laurent mélange tous les sujets, et notamment la participation au gouvernement et la poursuite de la stratégie du Front de gauche qui vient de réduire à 7 le nombre de députés membres du PCF (+ 2 ex, « refondateurs » et 1 PG).

L’intention est claire : faire plébisciter par la confusion la ligne de la direction du Parti en esquivant tout débat de fond.

Le texte proposé égrène des lieux communs pour rassurer les camarades: « mener des campagnes appropriées », « faire appel à l’intervention populaire ».

La question des conditions de la participation au gouvernement aurait dû être posée depuis des mois comme plusieurs d’entre nous l’avons demandé. Maintenant, avec l’effondrement parlementaire du Parti, elle est caduque. Elle est devenue politiquement indéfendable dans le Parti comme en dehors. Pierre Laurent découvre aujourd’hui que les « conditions ne sont pas rassemblées », « en dépit de nos appels répétés à Jean-Marc Ayrault » (nos supplications ?).

Le soi-disant « bulletin de vote » est ainsi piégé. Si on vote « non », on passe pour partisan d’une participation au gouvernement, hypothèse à laquelle s’oppose un très grand nombre de communistes et que plus aucun dirigeant n’osera défendre maintenant. Si on vote « oui », on souscrit à la « l’amplification du Front de gauche », de ses orientations et de sa structuration doublant celle du Parti.

Le fil est gros. Quelle défiance vis-à-vis des communistes !

Ne pas avoir été clair sur la participation a coûté cher au Parti. Avant des présidentielles, le socialiste Mélenchon a pu faire illusion en adoptant une posture critique vis-à-vis du PS manifestée par des déclarations grandiloquentes et une surenchère systématique. En fait, ses propositions et le programme « partagé » étaient profondément compatibles avec celui du PS. Mais le soir du 1er tour, il est apparu pour ce qu’il est et a été le Front de gauche : des rabatteurs, « sans conditions » pour Hollande et le PS.

Entre les présidentielles et les législatives, les dirigeants du Parti n’ont cessé dans les media de saluer les premières mesures du gouvernement Ayrault.

Comment s’étonner ensuite, que même dans des bastions hérités du vote communiste, le PS supplante les candidats du Front de gauche sur fond d’abstention massive et d’inquiétante confirmation de la poussée de l’extrême-droite ?

Ce que le CN aurait dû faire, devrait encore faire, c’est de caractériser la politique que Hollande et le PS ont annoncée, celle qu’ils s’apprêtent à mener. Non, elle ne va pas insuffisamment dans le bon sens, elle ne mérite pas d’être « infléchie ». Elle va dans le mauvais sens et nous devons préparer la riposte à ses mesures. L’austérité « juste » prépare la super-austérité. La « renégociation » du traité budgétaire prépare une aggravation de la tutelle de l’UE du capital. Hollande a déjà marché sur les pas de Sarkozy en imaginant une guerre en Syrie.

Tant que cette clarté ne sera pas faite, les quelques inflexions gauchistes du Front de gauche, telles je les entends proposer, ne seront ni comprises, ni constructives. Se placer dans la majorité présidentielle, par-delà la nécessité passée de dégager Sarkozy, c’est servir de caution à une politique contraire à l’intérêt des travailleurs et du pays.

Le soufflé électoral du Front de gauche s’est déjà affaissé. Il ne peut plus faire illusion comme débouché politique au mouvement populaire. Au contraire, il entrave le développement des positions de rupture que le PCF devrait défendre à partir des luttes. Le Front de gauche a placé le PCF sous la tutelle d’une personnalité socialiste qui fait ce qu’elle veut. Comme d’autres l’ont dit, il a monté de toutes pièces, à partir de l’influence communiste, y compris financièrement, de nouvelles formations politiques, PG, GU qui ne pensent qu’à tailler des croupières au PCF et à combattre son identité.

STOP !

Engageons dès maintenant les campagnes nationales de lutte rassembleuses contre la continuité de l’austérité. Dans deux semaines, le peuple subira une nouvelle augmentation du gaz. Sur les retraites, le PS a déjà relégué ses promesses. Ne l’admettons pas ! Pour la Poste, exigeons l’abrogation de la loi de 2009 contre laquelle l’ensemble de la « gauche » a prétendu s’opposer ! Contre l’UE du capital, combattons réellement les nouveaux textes, en dénonçant le texte fondamental, le Traité de Maastricht!

Un dernier mot. Continuer à monter en épingle la coalition Syriza en Grèce est encore moins acceptable depuis que son leader Tsipras s’affiche comme défenseur d’un « plan B pour sauver l’euro » et ne demande même plus l’annulation de mémorandum européen mais sa « renégociation ».