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« Kuhle Wampe » (Ventres glacés) : un film communiste allemand de 1932

Vivelepcf, 8 août 2013

Nous avons découvert que l’on pouvait visionner sur « Youtube » des versions, d’une qualité technique précaire, dans la version censurée de 1932, parfois avec sous-titres en anglais, du film allemand « Kuhle Wampe », en français « Ventre glacés – A qui appartient le monde ».

Lien VERS LE FILM

Ce film est d’un grand intérêt et d’une grande importance. C’est le premier film de fiction prolétarien, ouvertement communiste tourné en Allemagne, sans doute le premier de tous les pays capitalistes. Le tournage a été protégé par le service d’ordre du Parti communiste allemand (KPD).

Il a été tourné en 1932 par le cinéaste d’origine bulgare, Slatan Dudow, assisté pour le scénario par Bertold Brecht qui a fortement imprégné l’œuvre.

Sur la forme, le film traduit la recherche avant-gardiste des artistes communistes. L’influence du cinéma soviétique, notamment dans le montage, est évidente. La musique de Hanns Eisler est partie intégrante de la construction du film comme de son message. Le célèbre Solidaritätslied (Chant de la solidarité) a été composée pour le film.

Au fameux documentaire « Berlin, symphonie d’une grande ville » (1927 – Walter Ruttman), déjà inspiré par l’avant-garde soviétique mais sans objectif politique, Kuhle Wampe fait écho avec une sorte de symphonie du Berlin prolétaire.

En 1932, la crise du capitalisme est à son paroxysme. Le chômage de masse, les drames qu’il amène (suicide, expulsions), l’exploitation des travailleurs, la pauvreté, l’humiliation constituent le cadre du scénario. La bataille idéologique traverse les familles prolétaires dans ces conditions.

Progressivement la résistance à l’arbitraire des possédants et de l’Etat, l’action collective s’étendent.

Les expulsés se retrouvent à une heure de Berlin dans un campement communautaire aux bords d’un lac, dénommé « Kuhle Wampe ». La résignation, les préjugés inculqués n’y disparaissent pas du jour au lendemain mais l’esprit de résistance y progresse.

A la crise du capitalisme qui détruit l’ouvrier, les prolétaires mis en scène dans le film opposent la dignité, le sport, la solidarité dans des mouvements de masse. L’organisation communiste est à la base de ces mouvements. Mais la prise de conscience et l’engagement politiques individuels partent aussi en retour de ces expériences collectives.

Kuhle Wampe est un témoignage cinématographique et politique unique.

A projeter dans tous les ciné-clubs communistes !

 

Chant de la solidarité (Brecht –Eisler )

Debout, peuples de cette terre,
Pour ce seul but unissez-vous :
Que la terre soit votre terre
Et qu’elle vous nourrisse tous

En avant ! N’oubliez jamais
Que notre force est l’unité,
Ventre plein ou ventre affamé,
En avant, n’oubliez jamais
La solidarité !

Jaunes ou bruns, blancs comme noirs,
Cessez donc de vous massacrer !
Que les peuples puissent parler
L’accord se fera sans retard !

En avant ! N’oubliez jamais
Que notre force est l’unité,
Ventre plein ou ventre affamé,
En avant, n’oubliez jamais
La solidarité !

Si nous voulons vite arriver
Vous tous nous êtes nécessaires :
Celui qui n’aide pas son frère
C’est lui qu’il refuse d’aider.

En avant ! N’oubliez jamais
Que notre force est l’unité,
Ventre plein ou ventre affamé,
En avant, n’oubliez jamais
La solidarité !

Tous, et autant qu’ils sont, nos maîtres
Voient d’un bon œil nos dissensions,
Car le temps qu’elles dureront
C’est vrai qu’ils resteront nos maîtres.

En avant ! N’oubliez jamais
Que notre force est l’unité,
Ventre plein ou ventre affamé,
En avant, n’oubliez jamais
La solidarité !

Prolétaires de tous pays
L’union, c’est votre liberté :
Vos bataillons et vos armées
Viendront à bout des tyrannies !

En avant, jamais n’oublions,
Ventre affamé ou ventre plein,
Et posons tout net la question :
Qui donc possède le matin ?
À qui le monde appartient donc ?
Bertolt Brecht

 

Le Chant des Marais : comment est né un chant ouvrier.

Le « Chant des Marais » a été composé en 1933 par des antifascistes allemands détenus dans les premiers camps de concentration nazis. Il est devenu une expression de la résistance des déportés dans de nombreux camps, de la solidarité avec eux, maintenant une forme d’hymne de la Déportation.

Le compositeur allemand Hanns Eisler (auteur, entre bien d’autres œuvres, de l’hymne de la RDA) a adapté le Chant des Marais dès 1935. Il explique l’origine de chant ouvrier dans un article passionnant que nous avons fait traduire. Comment, au cœur de la barbarie nazie, sous la pression permanente des SA et des SS, mais en usant de leur contradiction, en partant du vécu extrême des détenus, une musique et des paroles ont pu devenir une aide précieuse, un instrument de résistance collective et politique. (Lire la suite…)