Histoire

8 mai 1945 – 8 mai 2015 : Déclaration commune des partis communistes russe, britannique, français, américain et allemand

Repris par vivelepcf, 10 mai 2015

Des camarades du Parti communiste allemand (DKP) nous ont communiqué le texte d’un appel commun, à l’occasion du 70ème anniversaire du 8 mai 1945, signé par les partis communistes des quatre pays, héritiers des principales puissances alliées, Russie (URSS), Grande-Bretagne, Etats-Unis et France et du Parti communiste allemand, issu de la principale force intérieure de résistance au nazisme. Cet appel a été publié notamment sur les sites internet du Morning Star (PC de Grande-Bretagne) et du DKP. A ce jour, ni la direction du PCF, ni l’Humanité ne s’en sont fait l’écho. C’est dommage. Le symbole est fort quelles que soient les très différentes évolutions des partis signataires.


Déclaration commune à l’occasion du 70ème anniversaire de la victoire de la liberté sur la tyrannie nazie

Le 8 mai 2015 marque le 70ème anniversaire de la victoire de la liberté sur la tyrannie fasciste et nazie en Europe. Cette victoire a été rendue possible par l’alliance des peuples d’Union soviétique, de Grande-Bretagne, des États-Unis, de France et des forces de la résistance conduites par les communistes à travers toute l’Europe, la Chine et l’Asie du Sud-est.

La victoire a coûté des morts et des destructions à une échelle que l’Humanité n’avait jamais connue. Des millions de soldats ont perdu la vie, mais les populations civiles ont payé le plus lourd tribut. L’histoire de l’Humanité portera à jamais les stigmates de la sauvagerie des nazis et de leurs alliés. Tout écolier peut faire le lien entre le fascisme hitlérien et ce qui est appelé aujourd’hui – sans doute d’une manière trop simplifiée – l’Holocauste. Dans l’Union soviétique et parmi les communautés juives des États baltes et d’Europe orientale, en particulier, des dizaines de millions d’innocents ont péri. Ces massacres systématiques à travers l’Europe ont aussi frappé des personnes handicapées, d’autres au nom de leur orientation sexuelle ainsi que certaines minorités ethniques tels que les Roms. Nous devons nous assurer que les générations futures n’oublient pas ces crimes monstrueux.

L’alerte avait été lancée dans les années 1920 et 1930. Aidé et encouragé par les classes dirigeantes capitalistes en Europe, le fascisme a pris l’offensive contre la démocratie et la paix, et a cherché à encercler et détruire le premier État ouvrier, l’Union soviétique.

L’histoire n’oubliera pas le coup d’État fasciste à Rome, l’incendie frauduleux du Reichstag, l’invasion et le gazage de l’Abyssinie, le putsch fasciste en Espagne, ni la trahison de Munich. Tout au long des années 1930, les communistes ont œuvré à rassembler les forces de bonne volonté, honnêtes, courageuses, attachées à la démocratie, qui seules pouvaient endiguer la marée de la barbarie.

La victoire est venue des sacrifices sur les fronts – sur terre, sur mer et dans les airs – et à l’intérieur des pays où se rassemblaient les résistants, dans les usines, les villes, les forêts. Nous honorons la victoire comme le triomphe de la vie sur la mort et un combat pour l’affirmation de la vitalité de la démocratie, conduit par les travailleurs et leurs alliés.

À Nuremberg, le monde a condamné le fascisme. La résolution, « Plus jamais ça », a trouvé un écho populaire. L’année 1945 a marqué une rupture décisive en faveur du progrès, contre les forces de la réaction. La défaite du fascisme et du nazisme et le rôle déterminant de l’Union soviétique ont eu un impact immense sur les forces démocratiques et les peuples qui, dans le monde entier, se battaient contre le colonialisme et l’impérialisme. Une Fédération syndicale mondiale unifiée a été créée en même temps que l’Organisation des Nations unies. La Déclaration universelle des Droits de l’Homme a été adoptée avec enthousiasme.

Partis communistes de la Fédération de Russie, de Grande-Bretagne, de France, des Etats-Unis et d’Allemagne, nous sommes fiers des sacrifices héroïques de nos membres et sympathisants qui étaient aux premiers rangs de la lutte. Les communistes ont été les premiers à être torturés dans les camps de concentration ; ils étaient parmi les premiers à se porter volontaires pour combattre dans les vallées d’Espagne ; à Stalingrad leur ténacité a tenu bon quand il était impératif de ne pas faire « un pas en arrière ! »

Soixante-dix ans plus tard, le fascisme et le racisme ont repris leur marche. Des provocateurs cherchent à réécrire l’histoire de la guerre afin de redessiner les frontières actuelles. Et les chefs de guerre de l’OTAN les y incitent.

Les mêmes classes dirigeantes, qui ont collaboré avec les fascistes avant et pendant la Seconde guerre mondiale, mettent aujourd’hui en parallèle le communisme et les fascisme et nazisme.

Des forces puissantes dans les cercles dirigeants souhaitent voir l’actuelle Russie coupée du monde et isolée. En Ukraine, le massacre de syndicalistes à Odessa montre très clairement comment les États-Unis, l’Union européenne et l’OTAN s’appuient sur les mouvements anticommunistes, ultranationalistes et néo-fascistes dans leur confrontation avec la Russie.

Il s’agit d’autant de manœuvres pour détourner l’attention de l’échec chronique du capitalisme  à répondre aux besoins sociaux – emploi, santé, logement, éducation – des jeunes générations. Partout, la souveraineté des peuples est remise en cause ; par millions, les personnes déracinées fuient à travers les continents dans une recherche désespérée de paix, de travail et de sécurité.

Communistes, nous voulons à nouveau mettre en garde contre les dangers mortels portés par un système capitaliste en crise. Les acquis sociaux et politiques gagnés suite à la victoire de 1945 sont attaqués et repris. Les peuples d’Europe doivent, à nouveau, être vigilants et prêts à lutter contre le chauvinisme, le racisme, le fascisme et le militarisme que la crise du capitalisme et les politiques d’austérité rapportent avec elles.

Nous appelons toutes les forces démocratiques, progressistes et pacifiques, les travailleurs de toute l’Europe, les femmes et les hommes qui se battent pour la paix et la justice sociale, pour la liberté contre la tyrannie, à s’unir, à prendre part pleinement dans la lutte de notre époque pour une société d’égalité et de justice sociales.

¡ No pasarán ! Ils ne passeront pas !

Parti communiste allemand

Parti communiste britannique

Parti communiste des Etats-Unis d’Amérique

Parti communiste français

Parti communiste de la Fédération de Russie

30 avril 1975. Vietnam : victoire !

Déclaration du Bureau politique du PCF, 30 avril 1975

Saigon est libérée ! Le peuple vietnamien a remporté la victoire !

Les travailleurs, les millions de Français qui ont soutenu son combat accueillent cette nouvelle avec une émotion et une joie profondes.

A l’issue d’une lutte de trente ans, l’héroïsme et les sacrifices du peuple de tout le Vietnam triomphent du colonialisme et de l’impérialisme.

Jusqu’au dernier moment, les Etats-Unis ont manœuvré sans succès pour empêcher l’application de l’Accord de Paris, pour dresser les Vietnamiens les uns contre les autres. Les médiocres et déshonorantes intrigues de dernière heure du gouvernement français ont connu le même sort. Aujourd’hui, la victoire des forces populaires rend possibles la réconciliation, la concorde nationale et la paix. C’est ce qu’ont toujours voulu le FNL et GRP.

L’enthousiasme avec lequel la population de Saigon, comme des régions déjà libérées, accueille l’armée populaire contraste de façon éclatante avec la débandade, le pillage, la corruption dans lesquels s’effondre une dictature haïe.

La victoire du peuple vietnamien, c’est aussi la victoire de tous ceux qui n’ont cessé de lui apporter une solidarité d’une efficacité irremplaçable : le monde socialiste, le mouvement ouvrier des pays capitalistes, le mouvement de libération nationale.

Le PCF qui a été sans défaillance tout au long de ces trente ans aux côtés du peuple vietnamien salue avec enthousiasme cet événement historique. L’impérialisme a subi une défaite retentissante dont les conséquences portent loin.

Pour cette mauvaise cause qu’est le maintien à tout prix de l’oppression coloniale, les dirigeants du prétendu « monde libre » – avec le soutien des valets dont ils disposent dans les moyens d’information et de propagande – ont pris la responsabilité de massacrer des millions d’hommes, de femmes et d’enfants du Vietnam, d’envoyer à une mort inutile des dizaines de milliers de jeunes Français, puis de jeunes Américains ; de détruire d’incalculables richesses matérielles et culturelles.

Mais rien n’a pu faire fléchir le peuple vietnamien. Au Nord comme au Sud, il s’est battu avec un courage indomptable, avec clairvoyance, en utilisant avec sagacité toutes les formes de lutte. Les communistes, les travailleurs de France rendent un vibrant hommage à leurs frères du Vietnam.

Le PCF renouvelle son engagement de poursuivre son effort de solidarité avec le peuple vietnamien qui doit maintenant faire face aux lourdes tâches de la reconstruction.

Il exige du gouvernement français – et il appelle les travailleurs, les démocrates à l’exiger avec lui – qu’il reconnaisse sur le champ le GRP, qu’il apporte sans retard une aide substantielle au relèvement du pays, qu’il établisse enfin avec le Vietnam des rapports nouveaux, amicaux et loyaux, correspondant à la nature des liens qui existent entre nos deux peuples et pour lesquels l’inoubliable président Ho Chi Minh n’a cessé de lutter.

Honneur au peuple vietnamien !

Vive l’amitié des peuples français et vietnamien !

Paris, le 30 avril 1975.

Le Bureau politique du Parti communiste français.

Marignan 1515 : contre les célébrations militaristes et nationalistes en France comme en Suisse

Vivelepcf, 17 mars 2015

En 1897, le peintre suisse Ferdinand Holder provoqua une violente controverse avec son projet de tableau « La retraite de Marignan » pour une commande du Musée national suisse de Zurich. Il montre des soldats hagards, piteux et ravagés : tout le contraire de la glorification nationale traditionnelle de l’armée helvétique, défaite héroïquement, la tête haute, par un ennemi français sournois et supérieur en nombre.

Le souvenir de la bataille de Marignan a servi – et sert encore notamment avec la poussée des partis d’extrême-droite – à exalter le nationalisme suisse dans l’intérêt des classes possédantes de ce pays.

Très longtemps, Marignan a été convoqué pour mettre en avant un des principaux produits d’exportation de la Confédération helvétique : le prêt de mercenaires pour les cours d’Europe  dont les Gardes suisses du pape sont une survivance, à côté des marchands d’armes et de mercenaires d’un type nouveau déguisés en activistes d’organisations humanitaires.

La glorification de la retraite de Marignan a également servi à justifier le rôle de la Suisse, y compris sous sa prétendue « neutralité » au cœur de l’Europe, comme arrière-boutique financière et affairiste pour les échanges entre grandes puissances impérialistes.

La peinture de Holder a finalement été quand même acceptée ; peut-être par des amateurs d’art bourgeois plus avancés, conscients que la souffrance du combattant pouvait aussi être héroïsée et instrumentalisée dans l’intérêt de leur classe…

En France, l’évocation de la bataille de Marignan s’est réduite à un repère mnémotechnique portant une glorification vague de l’école laïque voulue par les dirigeants politiques de la 3ème République. Ceux-ci aussi savaient ce qu’ils voulaient diffuser et légitimer dans le peuple : le principe de l’intervention militaire conquérante de la puissance impérialiste française partout dans le monde.

Car Marignan, c’est en Italie. Et la fameuse bataille, c’est en fait l’opposition des prétentions des classes dominantes liées à la France, dont la puissance étatique était renforcée depuis l’avènement de François 1er, avec des prétentions sur le riche duché de Milan, et du clan Sforza qui tenait la ville et son commerce et payait les Suisses.

Marignan, c’est aussi 15.000 à 20.000 morts, un record pour l’époque.

Le 500ème anniversaire aura lieu en septembre 2015 : préparons-nous à contrer dès à présent les récupérations militaristes !

CHARONNE Francis Virlouvet :  » J’ai dû la laisser mourir. Elle avait 24 ans « 

Voir aussi, l’analyse du PCF du 13 février 1962 (lien)

Témoignage Francis VIRLOUVET, paru dans l’Humanité du 8 Février, 2002

Le 8 février 1962, Francis Virlouvet, jeune plombier et militant communiste, participe à la manifestation pour la paix et contre l’OAS. · quelques pas de Anne-Claude Godeau, Suzanne Martorell, Hyppolite Pina et Edouard Lemarchand. La charge des CRS les pièges dans l’escalier du métro Charonne avec des dizaines d’autres démocrates. Bilan de cette violence : 9 morts. Parmi eux, Anne, Suzanne, Hyppolite et Edouard.

 » En décembre 1960, je rentrais d’Algérie. J’avais passé trente mois là-bas à Colomb-Béchar. J’avais 21 ans. C’est en revenant en France que j’ai adhéré au PCF. Le sort que la France faisait endurer à ce peuple me révoltait. Il faut dire que durant ma jeunesse à Saulieu j’avais été à bonne école. Mes oncles étaient des résistants. Francis Virlouvet, je porte le même prénom, que l’on surnommait  » l’homme à la poussette « , se déguisait en clochard pour récupérer les tracts dans les imprimeries clandestines (notamment l’appel de juillet 1940) et ensuite les dispatcher sur Paris. Étienne Virlouvet était responsable de la récupération des armes sur l’ennemi. Il a été pendu par les pieds par les Allemands pour tenter de le faire parler.

Dans notre arrondissement, le rendez-vous à la manifestation du 8 février se situait au niveau du marché Secrétan. Nous étions une cinquantaine, des jeunes et des moins jeunes, et nous nous sommes dirigés vers le départ de la manifestation. Je ne me souviens plus où, peut-être vers la gare de l’Est. Des dizaines de groupes comme le nôtre convergeaient de toute la région parisienne. Notre mot d’ordre était simple :  » Paix en Algérie et halte à l’OAS « .

Nous prenons le boulevard Voltaire, nous passons devant la mairie du 11e et nous arrivons vers le métro Charonne. Autour de moi, il y a des camarades de ma section, nous discutons, nous scandons nos slogans, mais d’une manière  » paisible « . Et soudain des cris, des hurlements, et un mouvement de foule. Les CRS venaient de charger. Je me trouve pris dans une poussée terrible qui me projette avec des dizaines d’autres dans l’escalier du métro. Il a été dit que les grilles avaient été fermées, moi je ne m’en souviens pas. L’escalier s’est rapidement trouvé rempli à  » ras bord « . C’était quelque chose de terrible. Les gens étaient les uns sur les autres, hurlaient et les CRS continuaient à matraquer. Ils ont arraché les grilles qui protégeaient les arbres et les ont lancé sur les manifestants prisonniers dans l’escalier. Les CRS se sont acharnés. Ils matraquaient, une fois, deux fois, trois fois, les premiers rangs et revenaient encore à la charge. Nous étions bombardés de grenades lacrymogènes. Pour ceux qui étaient dessous, l’air devenait irrespirable. · un moment, je me suis trouvé à côté d’Anne-Claude Godeau. Elle ne criait pas. Elle pleurait. Je ne voyais que sa tête et le début des épaules. Elle était prisonnière d’un magma humain. Il y avait peut-être cent personnes les unes sur les autres. Anne n’arrivait plus à respirer. J’ai essayé de la dégager. Je lui criais  » essaye de bouger tes jambes, de sortir un bras « . Je l’ai poussé, tiré. Malheureusement je ne suis pas arrivé à la sortir. J’ai dû la laisser mourir. Elle avait 24 ans.

En revanche, on a réussi à dégager une autre camarade, à la descendre dans la station – c’est pour cela que je ne sais plus si les grilles du métro étaient ouvertes ou bien si elles l’ont été à ce moment. Dans la station, l’air était aussi irrespirable que dans l’escalier. Nous l’avons allongée sur le quai et j’ai tenté de la ranimer en pratiquant la respiration artificielle. C’était difficile car j’étais, moi aussi, comme les autres camarades, à moitié asphyxié par les gaz. Je continuais à entendre les insultes des CRS et les explosions des grenades lacrymogènes. J’entendais les cris de ceux qui n’arrivaient pas à se dégager pour se réfugier dans la station. Enfin une rame de métro est arrivée. Nous nous y sommes engouffrés en portant la jeune femme. Je ne savais pas si elle était morte ou vivante. Nous avons essayé encore de la ranimer. · la station suivante, d’autres camarades l’ont prise en charge. Je n’ai appris que le lendemain qu’elle aussi était morte. C’était Suzanne Martorelle. Elle avait 36 ans et était la maman de trois enfants. Après je ne me souviens plus trop de ce que j’ai fait. Il y avait des gens la tête en sang, d’autres soutenus par des camarades car ils avaient des membres brisés, d’autres encore qui pleuraient. Franchement je ne me souviens plus de ce que j’ai fait. Aujourd’hui encore je revois cet escalier, je sens l’odeur des lacrymogènes, et je revois les visages d’Anne et de Suzanne.