Politique

Et si Macron convoquait un référendum sur la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique ?

Par EDT, dans le cadre d’un rapport général sur la situation politique et celle du PCF: 2/3. Lien vers 1/3.

Macron peut-il aller jusqu’à organiser un référendum le 26 mai et sortir renforcé par un Oui majoritaire ? Sur quel sujet ? A priori, c’est impossible pour un président soutenu seulement par les  20 à 25% qui pensent qu’ils n’ont pas intérêt au changement. Mais, en réfléchissant bien, il y a peut-être un sujet imparable. Rassurez-vous, je ne suis pas conseiller de l’Elysée !

Et si Macron convoquait un référendum sur la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique ?

Il serait à peu près certain de n’avoir aucune formation politique contre lui sur cette question. La revendication première des GJ portaient sur les taxes « écologiques » et ont été traduites par la demande d’une « meilleure » répartition de l’effort. Macron pourrait espérer sortir de l’abstention des électeurs motivés par la « défense du climat » qui sont réputés plus pro-UE que la moyenne. Le passage de la dominante jaune, à la dominante verte s’annonce, toujours aussi loin du rouge…

La question référendaire pourrait reprendre la formule de juillet 2018 du projet de loi modifiant la Constitution, avorté pour cause d’affaire Benallah. Les députés avaient alors voté (bien que cela n’ait rien à voir avec l’organisation fondamentale de la République) l’ajout, à l’article 1 de la Constitution, de la phrase : « la France agit pour la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et contre les changements climatiques ». Macron pourrait être tenté de poser maintenant la question aux Français… L’initiative en France des multinationales environnementalistes – la pétition en ligne, dite « affaire du siècle » -, nouveau niveau de l’offensive antidémocratique de ces lobbys, prépare peut-être le terrain.

L’actualité appelle notre parti à une réflexion plus poussée et surtout plus critique sur la campagne « pour sauver le climat ». Deux des 10 propositions lui sont rattachées.

Je ne suis pas de ceux qui s’extasient devant les manifestations « pour le climat » des jeunes et des scolaires hier, même si une certaine disponibilité à l’engagement généreux nous intéresse. Souvenons-nous d’avec quelle violence, en décembre, les luttes des lycéens, pour leur propre intérêt, contre la loi Blanquer sur le lycée, la casse du bac et Parcoursup, ont été réprimées. Des circulaires appelant les proviseurs à mettre à pied une semaine tous les grévistes, des tabassages en règle comme à Mantes-la-Jolie. « Pour le climat », le ministre, les proviseurs, les médias donnent un droit de sécher les cours !

Il est troublant d’entendre à la télé des écoliers de primaires réciter des comptines sur le méchant Co2 pendant que Blanquer est en train de supprimer l’enseignement des maths à un tiers des lycéens : quelle conception de la diffusion de la science !

Sur « l’affaire » du réchauffement climatique, sur quoi n’y a-t-il pas de doute à se faire ?

1° Que la planète a connu, ces dernières décennies, un épisode de réchauffement global, comme plusieurs autres fois au cours du dernier millénaire. Cette fois, il coïncide avec une augmentation, à des taux très faibles, due à l’activité humaine, de la proportion de gaz carbonique dans l’air (le CO2 n’étant pas un poison, mais un aliment pour la végétation).

2° Que le capitalisme, ses institutions publiques et privées, orchestrent une immense campagne mondiale, intrusive et systématique,  catastrophiste sur la question.

La jeune ambassadrice suédoise proclamée du climat est reçue à l’Elysée et à Davos quand le plus inoffensif des altermondialistes est coffré à 10 km par la police. Pas un JT, une pub sur 2 sans référence au climat etc. L’omniprésence de cette propagande ne doit pas nous la rendre invisible.

Tous les aléas météorologiques, les conséquences dramatiques des catastrophes naturelles (largement aggravées par le capitalisme), les migrations forcées dues aux inégalités et à l’exploitation, même les guerres impérialistes sont mis sur le (bon) dos du réchauffement climatique.

On comprend l’intérêt du capitalisme mondialisé. Sur le plan idéologique, la promesse de l’apocalypse climatique permet de subordonner, de soumettre tous les acteurs économiques, y compris contestataires, à un impératif majeur, et à la croisade conduite par le système dominant. Cette arme idéologique est également un moyen de pression sur la consommation des travailleurs, ou encore sur le développement énergétique des pays émergents etc.

Sur le plan économique, à défaut d’une bonne guerre mondiale, des économistes en vue voient dans la lutte contre le réchauffement climatique une solution à la crise actuelle du capitalisme, avec la mobilisation de centaines de milliards de dollars (le chiffre symbolique de 1000 milliards est avancé pour l’ensemble des pays de l’OCDE) dans la transition énergétique pour reconstituer le taux de profit.

Les propagandistes en vue de l’affaire en France, hier, Fabius, aujourd’hui, Hulot et Berger (CFDT), pour ne citer qu’eux, ne sauraient être soupçonnés d’indépendance vis-à-vis du patronat !

Toutes ces constations doivent nous amener, nous communistes, à la plus grande vigilance et à l’analyse critique la plus sérieuse face à l’idéologie dominante, envahissante, sur les évolutions climatiques et leurs conséquences, aussi bien sur les plans scientifiques, économiques que politiques.

Peut-on s’intégrer dans la campagne dominante contre le réchauffement sur une posture anticapitaliste ? J’en doute. Ce serait prendre le risque de cautionner, par exemple, malgré soi, des transferts du « capitalisme noir » vers le « capitalisme vert ». Ou encore de valider, au nom « d’une juste répartition de l’effort », de nouvelles ponctions sur le monde du travail, une nouvelle surexploitation, au prétexte qu’un prélèvement serait effectué aussi sur le capital. Mais en fin de compte, c’est aussi et toujours le capital qui profite.

Les questions écologiques sont nécessairement, pour nous, à subordonner à notre perspective anticapitaliste et socialiste.

Matérialistes, nous devons rejeter les conceptions transcendantes diffusées par le capital selon lesquelles il faudrait « sauver la planète ou le climat » érigés en divinités.

Non, notre conception de l’écologie (qui comprend la défense du cadre de vie, la lutte contre les pollutions, la surexploitation des ressources naturelles, les dérégulations des transports, la spéculation urbanistique etc.), c’est-à-dire de l’interaction entre l’Homme et le reste de la nature, part de la réponse aux besoins de l’Humanité, avec la meilleure affectation – durable – des ressources naturelles et du travail humain.

« L’affaire » du réchauffement climatique, ses conséquences, doit être remise à sa place, dans le cadre de cette préoccupation fondamentale. Qui n’en est pas une pour le capitalisme, dans sa recherche du profit maximal à court terme.

L’affaire écologique, les manipulations idéologiques capitalistes, demandent tout autre chose qu’une réaction électoraliste adaptée !

Voir la partie du texte de congrès (2016/18) «Reconstruire le Parti de classe. Priorité au rassemblement dans les luttes » sur cette question.   

Avant les annonces de Macron/Situation politique – 15 avril 2019 – quelques considérations générales (Propositions de ruptures/luttes/Réféendums/Gilets J) par Emmanuel Dang Tran (1/3)

Avant les annonces de Macron/Situation politique – 15 avril 2019 – quelques considérations générales (Propositions de ruptures/luttes/Référendums/Gilets J) par Emmanuel Dang Tran (1/3)

Ce texte reprend les analyses préparées pour le Conseil national du PCF des 16 et 17 mars 2019 et actualisées. Ci-dessous la première des trois parties (Luttes en France). En quelques minutes au CN, je n’ai évidemment pas eu le temps de développer…  EDT

Le point de départ de notre discussion [au CN du PCF] devrait être ce constat : la politique structurelle de casse sociale et démocratique, aggravée par Macron, se déroule tranquillement. Le mouvement social ne l’entrave pas, voire même, avec les Gilets jaunes et le Grand débat, le pouvoir arrive à l’instrumentaliser à ses fins.

Le CICE est transformé en 20 milliards d’euros par an de nouvelles exonérations de cotisations sociales patronales. Le prélèvement à la source, prélude à la gravissime perspective, dénoncée par la CGT, de fusion de la CSG et l’impôt sur le revenu, semble passer, malgré son impact et l’impossibilité du gouvernement à le justifier. Le budget militaire explose sans véritable contestation etc.

Ces semaines même, le pouvoir fait passer la loi Blanquer contre le lycée, le bac et l’égalité d’accès à l’université, la loi Buzyn contre l’offre publique de soins, la loi « mobilités » qui prépare, entre autres, après la contre-réforme de la SNCF, le démantèlement et la privatisation de la RATP. Avancent dans les tuyaux la nouvelle casse des retraites et celle de l’assurance chômage, la nouvelle attaque contre le statut de la fonction publique. La liste est sans fin.

Parti communiste, notre objectif devrait être de remettre au centre les enjeux principaux, de développer et organiser les luttes contre les contre-réformes gouvernementales. A l’approche des élections européennes, le lien devrait être encore plus évident avec les véritables propositions de rupture avec l’UE du capital que le Parti devrait porter.

J’entends aujourd’hui combien la stratégie proposée par la direction est loin de ces priorités.

J’avais bien aimé, au dernier CN, l’expression « subvertir le grand débat national ». Mais ce n’est pas ce qui a été fait. Au contraire, vos décisions ont fait rentrer le Parti dans le jeu du gouvernement, dans la forme et dans le fond.

Avec les « cahiers de doléances », le Parti est devenu collecteur pour le « Grand débat », légitimant l’opération d’enfumage. Qui plus est, il s’est inscrit dans l’échelon municipal, voulu par le gouvernement, pour minimiser les enjeux nationaux et orienter le débat vers les élections municipales de 2020. La direction du Parti a choisi de se caler sur le calendrier annoncé par Macron, jusqu’à aller déposer ce matin-même [16 mars 2019] les doléances au premier ministre, tout heureux d’accueillir une délégation.

Sur le fond, les 10 propositions remises restent globalement au niveau superficiel cadré par le Grand débat et n’affrontent pas directement les plus graves contre-réformes en cours ou à l’ordre du jour. La proposition sur les salaires était indispensable et est bienvenue, comme celle de la revalorisation des retraites sur l’indice des salaires (et non des prix). Mais pour le reste…

Des camarades, dans le pays, avaient précédemment dénoncé l’absurdité, qui se retourne contre nos luttes (non reprise dans les 10 points), de proposer un « prélèvement à la source » sur les multinationales, à la fois techniquement inconcevable, et politiquement désastreux, car légitimant le prélèvement à la source sur les revenus des ménages.

Aujourd’hui, même s’il n’est pas que symbolique, il n’y a pas de raison de se focaliser sur l’ISF, sans pousser sur le prélèvement à la source et la CSG. De même, mesurons combien la médiatisation de l’évasion fiscale détourne l’opinion vers un niveau supranational.

Comment direction du PCF, pouvez-vous continuer à légitimer les aides, les cadeaux au patronat ? La « modulation » de l’impôt sur les sociétés, la redistribution du CICE aux PME : tout cela finit dans le profit capitaliste. Les comptes de la Sécu s’améliorent du fait des contre-réformes passées et de la « croissance » : aussitôt, par les « concessions » aux GJ, le gouvernement redistribue l’argent au patronat.

Pourquoi demander la nationalisation d’une grande banque privée et d’une seule (dans quelles conditions) ? Déjà, que proposons-nous pour la Banque postale ? Ensuite, même si cela remonte un peu, nous ne pouvons occulter que la « Gauche plurielle » a été le gouvernement qui a le plus démantelé le secteur public et semi-public financier avec une caution « communiste ». Enfin, si la proposition du Parti doit avoir une efficacité dans les luttes, elle ne peut, pour moi, que revendiquer la nationalisation de toutes les banques.

Avec le « Grand débat national », le pouvoir est parvenu à cadrer la contestation. Comme d’autres (ex : Philippe Martinez), je considère que Macron s’est montré le premier et l’un des plus habiles des « populistes ». Avec son grand débat avec le « peuple », en réalité, le pouvoir échange avec sa propre idéologie dominante. Il fait les questions et les réponses.

Je ne dirais pas, comme le texte des « 10 propositions du PCF » que le « Grand débat » est une concession de Macron aux Gilets jaunes. En érigeant les « Gilets jaunes » en porte-parole du peuple et de la contestation – les vraies-fausses concessions de Macron en décembre et la répression ont été des instruments de cette politique -, le pouvoir a choisi un « partenaire social » qui ne met pas en cause ses contre-réformes fondamentales, qui le légitime, qui renforce les oppositions politiques qui ne lui nuisent pas.

Le débat sur les « Gilets jaunes » a traversé tout le Parti. Avec, à mon avis, trois options : l’illusion, l’opportunisme et surtout la possibilité ou non de s’en saisir comme d’une opportunité.

Les dernières réunions du CN ont traduit, comme dans l’ensemble du Parti, que nous sommes globalement bien conscients de l’extrême diversité des Gilets jaunes, notamment géographique, de la pénétration, souvent, d’éléments – disons  « poujadistes » – dans ses noyaux, des limites de leurs revendications générales. L’illusion a été l’exception parmi nous.

Je ne m’étends pas sur l’opportunisme que nous devrions tous proscrire. L’électoralisme a orienté le positionnement de politiciens, même de gauche, suivant leur cible électorale (centre-ville, banlieue, zones «périphériques »).  Suivant les sondages, beaucoup ont pensé profitable de soutenir les Gilets jaunes (d’autres non, dans d’autres régions !). Maintenant que le mouvement dégénère, ils s’en détachent… Passons !

Le débat principal, justifié, entre communistes, a eu lieu sur l’opportunité ouverte par le mouvement « Gilets jaune », la possibilité, sinon de l’orienter, du moins de s’appuyer sur lui pour développer les luttes sur les revendications essentielles.

Deux éléments semblaient y inviter. Les GJ, et – c’est différent – le soutien dans l’opinion, ont indiscutablement traduit la colère sociale, dont celle du monde du travail. Le mouvement des GJ a fait rentrer quelques dizaines milliers de travailleurs, le plus souvent étrangers aux mobilisations sociales syndicales, dans une forme d’action collective. Malgré cela, j’ai été des communistes qui ont refusé de soutenir et cautionner le mouvement des Gilets jaunes, ce qui ne veut pas ne pas aller à la rencontre des individus et des groupes, sans préjugés et avec mes positions de communiste.

Les faits nous donnent de plus en plus raison, en mettant en évidence les limites fondamentales du mouvement GJ.

En dehors de la baisse des taxes sur les carburants, et peut-être du RIC, les revendications des GJ vont dans tous les sens, même au nom du « pouvoir d’achat » et restent très imprécises, comprenant un peu de meilleur et beaucoup de pire. C’est pourquoi, ils ont pu être soutenus aussi bien par Besancenot, Dupont-Aignan, Mélenchon, Le Pen ou Tapie.

La diversité et le flou des GJ rendent difficile leur identification. C’en est déjà une, par défaut. On a bien vu aussi, c’est fondamental, que ce mouvement n’attaquait pas le patronat et les exploiteurs ni dans ces formes d’action ni dans ces idées dominantes, mais cultivait souvent l’hostilité à l’organisation syndicale.

Les GJ, dans leur faiblesse d’identification, présentés comme expression du peuple, ont été investis par de nombreux groupes opportunistes. Il est difficile de reconnaître dans les insulteurs de Finkielkraut les occupants des ronds-points. En définitive, le pouvoir, son idéologie dominante et ses médias arrivent à parler au nom des GJ, via telle ou telle figure. Ils ont trouvé un interlocuteur, une « opposition » sur mesure dont ils ont renforcé le statut aussi bien par les fausses concessions sociales de décembre que par la répression.

Grâce au GJ, Macron est maître du calendrier et de l’ordre du jour du débat politique national. Il coordonne ses conclusions du « grand débat » avec la campagne des Européennes. Nous pouvons notamment nous attendre à voir la question de l’immigration et des migrants investir la place publique. Nous devons nous y préparer.

La caution aux GJ apportée tôt par la direction du Parti, avec plus de recul, par certains syndicats, n’ont pas aidé à renforcer les mobilisations sur les revendications de ruptures que nos organisations devraient porter. Elles se sont plutôt trouvées effacées dans une contestation globalement représentée par la Gilets jaunes. Mais la question n’est plus de savoir s’il est opportun que des « Gilets rouges » tendent la main aux « Gilets jaunes », mais comment les luttes contre chaque contre-réforme de Macron se renforcent.

Dès la journée de grève du 19 mars, nous allons faire le maximum pour que les mobilisations syndicales de travailleurs portent ces revendications de ruptures et de résistances aux contre-réformes structurelles du pouvoir. Et, à mon avis, ce doit être très au-delà des « 10 propositions » d’aujourd’hui.

Toujours à la remorque du débat dominant avec le GJ, une des 10 propositions réitère le soutien au « référendum d’initiative citoyenne », avec désormais un garde-fou sur le périmètre des sujets possibles (en contradiction avec le principe du RIC). Pour sa part, en réponse, Macron a agité l’idée de convoquer un référendum, après les conclusions de son « grand débat », peut-être le même jour que les Européennes. Toute cette campagne a un sens pour le pouvoir, éloigné de nos préoccupations de communistes. Elle rentre entièrement dans sa stratégie populiste et démagogique: « la vérité sortirait de la bouche du « peuple », c’est pour cela que ne le laisse pas s’exprimer directement ». Il n’y a pas mieux pour occulter la lutte des classes !

Quand on évoque un référendum, on ne peut pas ne pas penser à la victoire du NON au traité européen en 2005 et à comment le vote populaire (en l’occurrence de classe) a été bafoué. Il est plus que regrettable que la proposition n°10, concernant l’Europe, ne pose toujours le refus de l’application en France des traités, directives et règlements européens. A quoi bon agiter l’idée RIC alors ? Macron a bien intégré cette dimension. Explicitement, il répond que son élection en 2017 a réglé la question en faisant élire le président du Oui à l’UE contre Le Pen. Et s’il faut le refaire, les élections européennes sont là devant nous avec un bulletin OUI-en Marche et un bulletin NON-Rassemblement national. Le calcul est habile.

Macron peut-il aller jusqu’à organiser un référendum le 26 mai et sortir renforcé par un Oui majoritaire ? Sur quel sujet ? A priori, c’est impossible pour un président soutenu seulement par les  20 à 25% qui pensent qu’ils n’ont pas intérêt au changement. Mais, en réfléchissant bien, il y a peut-être un sujet imparable. Rassurez-vous, je ne suis pas conseiller de l’Elysée !

Et si Macron convoquait un référendum sur la priorité à la lutte contre le réchauffement climatique ?

Suite dans le post suivant

Communistes, pourquoi nous ne soutenons pas les initiatives et l’organisation des « Gilets jaunes »

Position collective, pour vivelepcf.fr, 17 novembre 2018, proposée par Corinne Bécourt, Emmanuel Dang Tran et Dominique Negri.

Le mouvement des « Gilets jaunes » bénéficient, depuis plusieurs semaines, d’une complaisance médiatique flagrante. Pour les tenants de l’idéologie dominante et le gouvernement lui-même, il est présenté comme la principale contestation à la politique du pouvoir. Nous le contestons. Nous y voyons, au contraire, un exutoire, habile et dangereux, à la colère populaire face à la politique que poursuit et aggrave le pouvoir Macron-Philippe au service du capital et du grand patronat.

Les « Gilets jaunes », mouvement plus ou moins faussement spontané, se gardent bien de pointer ces vrais profiteurs. Ils sont même soutenus, sponsorisés matériellement, par des pans entiers du patronat. La revendication principale qui ressort, portée par les pétitions et appels sur les « réseaux sociaux » est minimaliste : la « baisse du prix à la pompe ». Les « Gilets jaunes » désignent leur principal adversaire : l’Etat, l’impôt et, derrière lui également, de manière indifférenciée, la dépense publique même quand elle est sociale.

Dans ces conditions, il est logique qu’une grande partie de la droite et de l’extrême-droite se soient placées dans les « Gilets jaunes ». Il n’y a pas à parler de « récupération » ou « d’instrumentalisation » mais de compatibilité.

A gauche et à l’extrême-gauche, un certain embarras, que nous comprenons, domine. La colère devant la hausse des prix des carburants est légitime. Elle rentre dans des politiques globales que nous n’avons cessé de dénoncer. Pour autant, il nous semble que toute complaisance avec les instigateurs des « Gilets jaunes » et leur agitation du 17 novembre est malvenue et potentiellement dangereuse.

Certains se disent que le mouvement sera éphémère. C’est douteux. La baisse des prix va effectivement probablement arriver puisque que les cours mondiaux du pétrole viennent de chuter de 20% en un mois. Le pouvoir va aussi faire semblant de concéder de petites aides qui ne seront, en fin de compte, que de nouvelles subventions au marché de l’automobile… Mais si ce n’est pas de nouveau sur l’essence et le gasoil, l’idéologie dominante saura faire repartir – aidée désormais de la fiction de spontanéité participative que sont les réseaux sociaux – un autre mouvement populiste du même type, aux mêmes relents poujadistes. Soucieux de porter une cohérence de fond, communistes, nous ne pouvons rentrer dans des jeux de postures à court terme.

D’autres se proposent de participer aux actions des « Gilets jaunes » mais en y ajoutant et en essayant d’imposer leurs propres mots d’ordre. Nous pensons que c’est une illusion. L’hégémonie idéologique dans le mouvement ne quittera pas les populistes et les médias dominants. Quant aux tentations de certains politiciens de gauche, qui veulent faire « peuple » et flatter leur clientèle, en préparation des prochaines élections, elles sont plus déplacées que jamais.

Ces constats ne nous empêchent en rien, dans la clarté sur les « Gilets jaunes », de développer nos arguments et propositions de lutte, en relation avec la colère face à la hausse des carburants.

1-Nous dénonçons depuis toujours les impôts indirects, dont la taxe sur les produits pétroliers et, en premier la TVA. Ils sont injustes au point de pénaliser proportionnellement davantage les petits revenus que les gros : un impôt dégressif ! Le prétexte écolo des hausses récentes, même cautionné par le présentateur  TV et patron du cosmétique Hulot, ne tient en rien. Ces hausses doivent être annulées. La mal-nommée « Contribution au service public de l’énergie », prélevée sur nos factures d’électricité, va encore augmenter de 12% en 2019 pour atteindre 7,8 milliards d’euros, au nom de « l’écologie » et pour faire payer la solidarité envers les plus pauvres par les autres usagers moins pauvres. Ces impôts doivent tendre à être supprimés (c’est un contresens de réclamer, comme Ian Brossat, une taxation équivalente du kérosène, et, ainsi, de légitimer l’existence de ces taxes).

2-La hausse des carburants pose directement le problème du marché de l’énergie et de sa privatisation totale. Outre le transport, le chauffage est l’autre dépense énergétique qui frappe directement tous les ménages. Le processus de privatisation de GDF, démantelée, et d’EDF a conduit à une envolée des prix sans rapport avec les coûts. On fait payer aux usagers en France les investissements financiers douteux à l’étranger et les profits. Les magnats du pétrole se gavent, à commencer par Total, qui va vers 10 milliards d’euros de profit en 2018, reversés largement en dividendes à ses actionnaires. La hausse du prix du litre de fuel ou de gasoil, c’est d’abord Total et ses concurrents qui l’empochent ! Une politique de contrôle public des prix, de nationalisation et renationalisation s’impose.

3-Le droit à la mobilité. On ne peut pas séparer le poids pour les ménages de la hausse du gasoil et de l’essence du besoin de transport.  La spéculation immobilière repousse toujours plus loin des centres d’activité des catégories entières, là où sévit le plus la désertification en services publics et en commerces etc. La politique de privatisation latente des transports en commun amène des fermetures de lignes SNCF, des augmentations de tarifs, une dégradation générale des services comme la grève des cheminots de ce printemps l’a pointé. Et maintenant, le pouvoir rackette les automobilistes, d’abord les plus pauvres. Pour nous, communistes, cette nouvelle injustice doit amener à une riposte globale pour le droit à la mobilité et le service public des transports.

4-Plutôt que de « pouvoir d’achat », parlons des salaires, directs et indirects (cotisations sociales, retraites, services publics etc). Le coût pour les ménages des hausses de prix du carburant est souvent insupportable. Il représente seulement une partie des prélèvements indus sur les salaires (retraites, pensions et allocations), comme l’explosion des loyers ou des prix de l’immobilier. C’est un aspect d’une politique de classe du pouvoir qui vise à toujours plus détourner l’argent, le financement des conquêtes sociales vers le profit capitaliste. Toutes les préoccupations des travailleurs se confondent : elles doivent converger. Exigeons des hausses de salaires ! Refusons les hausses de CSG, la CSG elle-même, le prélèvement à la source ! Non au CICE (« crédit d’impôt compétitivité emploi » de Hollande), transformé par Macron en baisse de cotisations patronales à la Sécurité sociale : c’est 40 milliards d’euros détournés pour la seule année 2019 (doublement) !

Voilà les sujets de lutte vers lesquels nous voulons, communistes, développer la colère légitime contre la hausse des carburants. Le mouvement des « Gilets jaunes » et le pouvoir s’efforcent de faire l’inverse, d’évacuer les questions politiques de classe.

Nous avions dénoncé les précédentes agressions du gouvernement contre les automobilistes pauvres et/ou ruraux. Nous comprenons mieux aujourd’hui dans quelle offensive idéologique elles se situent. La hausse exorbitante du contrôle technique massacre des centaines de milliers de ménages pauvres dépendant de la voiture, pour aucun bénéfice sinon pour les garagistes. La décision d’Edouard Philippe de réduire à 80km/h la limite de vitesse sur les routes secondaires a interloqué. La justification par la baisse du nombre d’accidents est incertaine, vu l’allongement des temps de parcours. Plus crédible est apparue la nécessité de limiter les risques d’accident devant la politique de sape des dépenses (décentralisées) d’entretien des routes et la multiplication exponentielle des nids de poule. Mais politiquement, cette mesure secondaire, symbolique, a ciblé une partie de la population : les ruraux, les habitants des « périphéries », les plus pauvres, ceux qui réagissent légitimement le plus aujourd’hui à la hausse des carburants. Les mêmes, plus ou moins, sont frappés par les politiques élitistes de la municipalité de Paris qui exclut de la circulation en centre-ville les véhicules plus anciens, encore ceux des plus pauvres et au prétexte de l’écologie.

La focalisation du débat sur les taxes sur les carburants permet politiquement au pouvoir, outre d’éluder le clivage de classe, de mettre en avant un vrai-faux clivage « écologique ».  Les travailleurs, suivant leur degré d’exploitation, leur lieu d’habitation, leurs besoins de transports, sont invités à s’opposer, entre eux,  sur le niveau des sacrifices à consentir au nom de l’écologie au capitalisme peint en vert.

Evacuons tout de suite – nous serons amenés à le refaire souvent et mieux – toute ambiguïté sur notre position « écologiste » : Communistes, nous faisons une priorité de la préservation et l’amélioration du cadre de vie de l’humanité, en France et dans le monde. Pour autant, nous n’entendons pas gober la propagande du capital sur l’apocalypse climatique au nom de laquelle les travailleurs devraient accepter tous les sacrifices. Des idéologues patronaux ne cachent pas que le capitalisme « vert » et la propagande qui l’accompagne sont une voie de sortie à la crise globale du capitalisme, un moyen de reconstitution du taux de profit par une surexploitation accrue et consentie.

Sur le plan politicien, ce débat, dangereusement biaisé, peut profiter à l’extrême-droite et aux autres populistes qui ne sont pas rentrés dans le consensus des taxes écologiques et l’écologie moraliste personnifiés par l’ex-ministre Hulot.

Certains de nos camarades s’impliquent dans la mobilisation des « gilets jaunes ». Nous comprenons et même partageons leurs motivations. Mais, après réflexion, nous pensons qu’ils font erreur. L’absence, sur ce sujet comme sur quasiment tous les autres dans la préparation du 38ème congrès, de position nationale claire du PCF, mise en débat largement, les malheureuses positions électoralistes de certains dirigeants, handicapent l’expression et l’action collectives des communistes, si nécessaires. Les syndicats de tradition révolutionnaire ont clairement refusé de cautionner les « Gilets jaunes ». Cette position nous rassure mais pose aussi la question principale. Pourquoi n’a-t-on pas cherché à développer les convergences d’intérêt et de luttes, parfois évidentes, autour de la lutte des cheminots : contre les directives UE de concurrence, pour le droit à la mobilité, pour la défense des statuts du travail ? Quelles convergences de lutte va-t-on créer contre la CSG et la nouvelle étape de la casse du financement de la sécurité sociale ? Quelle mobilisation, militants progressistes, construisons-nous contre la politique de guerre et de surarmement (sabrant, au passage, le « pouvoir d’achat ») répétée par Macron le 11 novembre?

L’organisation des « Gilets jaunes » ne sent pas bon. La perspective ne peut être de se mettre à la remorques de ce populisme ni, en même temps, de remettre en selle une « gauche » d’alternance et de collaboration d’ici 2022, en passant par les élections européennes de 2019. La question centrale, pour nous communistes, est, plus que jamais, le développement des luttes de classe et de leur convergence.

L’affaire Benalla ne doit pas faire perdre de vue que c’est la politique que poursuit Macron que nous devons combattre, non sa personne et son image.

Article EDT pour le site « vive le pcf », 10 août 2018

L’affaire Benalla a tenu en haleine les médias, les politiciens, les parlementaires pendant toute la deuxième quinzaine de juillet et même au-delà : beaucoup plus de bruit que pour les ordonnances Macron de casse du code du travail ou que pour la réforme ferroviaire, malgré la durée de la lutte de cheminots. Cette seule constatation fait déjà réfléchir.

Bien loin de nous l’idée de minimiser l’affaire. L’enquête doit aller jusqu’au bout. Mais il est maintenant clair qu’elle fera des choux maigres des vidéos peu reluisantes d’Alexandre Benalla, de l’examen au scalpel des passe-droits dont le proche collaborateur de Macron a bénéficié etc.

On est très loin du scandale d’Etat, qu’on le veuille ou non. Personne n’a d’ailleurs imaginé sérieusement que le Président tomberait à l’occasion. On est très loin des sinistres barbouzeries, souvent criminelles, qui ressortent de l’histoire des septennats des années 60 à 80 et déjà un peu des quinquennats suivants, couvertes ou suscitées par ces « grands » présidents que vénèrent les politiciens à la manœuvre aujourd’hui (Mélenchon se revendique de Mitterrand !)…

Depuis 10 ans au moins, on assiste bien à un renforcement, d’une part, de la politique de répression et d’intimidation du mouvement social, d’autre part, à une privatisation partielle des forces de sécurité. Mais le cas Benalla l’illustre de façon tout à fait marginale. Il n’est pas inconcevable qu’un président choisisse son garde du corps en chef parmi ses proches.

Surtout, rappelons-nous que c’est sous Valls qu’encore un pas a été franchi dans la répression d’Etat des manifestations et des luttes. Militants, nous l’avons subie et la subissons depuis les manifestations de 2016 contre la loi El-Khomri, entre gazage lacrymogène systématique et gratuit, encerclement musclé voire violent des manifestations, nouvelles formes de provocations policières etc.  Cette décision politique assumée est allée de pair avec la montée des provocations et violences des « black-blocks » lors de certaines manifestations. En même temps, certains militants sont  tentés par des formes de manifestation comprenant une part de violence ciblée et symbolique. Nous devons poursuivre la réflexion sur ces évolutions. La manifestation du 1er mai 2018, concurrente de la manifestation syndicale, en a été précisément une illustration. Les agissements filmés de Benalla l’ont suivie.

La lutte contre le terrorisme n’a été qu’un prétexte au tournant répressif de Valls-Hollande, utilisé lors du vote de l’état d’urgence en novembre 2015. Quelques communistes l’ont dénoncé dès le départ. Notre site « vivelepcf » avait rappelé les interventions des députés communistes dénonçant, déjà en 1955, le caractère répressif et antisocial de l’institution de l’état d’urgence, en France comme en Algérie. En revanche, André Chassaigne et Pierre Laurent, à l’Assemblée et au Sénat, s’étaient ralliés à « l’Union sacrée » sécuritaire.

Les voici cet été 2018 engagés dans une nouvelle union, à gauche, avec les députés PS et FI pour déposer une motion de censure contre le gouvernement sur le cas Benalla. Ils ont également, comme les députés FI, voté la motion de censure déposée par la droite sur le même épisode. Ces prises de position sont lourdes de signification sur la stratégie poursuivie par la direction du PCF et ses porte-paroles.  

Une motion de censure est acte politique institutionnel fort de condamnation sur le fond de toute la politique d’un gouvernement.  Il n’a de sens, pour nous communistes, que comme point d’appui aux luttes. Une motion de censure contre les ordonnances Macron, contre la loi anti-SNCF aurait été bienvenue, mais impensable avec ceux qui ont accompagné la Loi El-Khomri et la « réforme » ferroviaire de 2014.

Les motions de censure sur l’affaire Benalla rabaissent le débat politique sur des questions de personnes, de comportement, et évacuent la question de l’alternative. On est aussi loin des questions institutionnelles réelles. La motion de censure Faure-Chassaigne-Mélenchon est d’ailleurs quasiment identique à celle de la droite Jacob-Vauquiez. Ce n’était surtout pas une raison pour que les parlementaires PCF aggravent leur choix en votant cette dernière (ce que n’ont pas fait Faure et les parlementaires PS, mais ce qu’ont fait les « Insoumis » après s’être répandus, dans les couloirs de l’assemblée, en manœuvres politiciennes tout azimut, y compris avec les LR).

Entre 1990 et en 1992, le Parti avait décidé que ses députés, à défaut de pouvoir déposer à eux seuls une motion de censure, voteraient celles déposées par la droite contre les gouvernements Rocard puis Bérégovoy. Mais il s’est agi de deux questions essentielles, gravissimes, que nous combattions, en toute clarté, sur la base de positions strictement opposées à celle de la droite : l’établissement de la CSG puis la destructrice « Politique agricole commune ». Rien de comparable entre ces actes politiques courageux et le vote de circonstance d’août 2018!

Le personnage de Macron, et sa mise en scène, suscitent l’agacement, le rejet, parfois la haine, ce que nous comprenons et partageons spontanément. Mais comme parti communiste, nous devons diriger ces sentiments, quand ils traduisent une opposition de classe, vers l’organisation des luttes contre sa politique.  Ce n’est pas le rôle du PCF de participer à un jeu de de chamboule-tout virtuel qui n’aboutit qu’à renvoyer l’aspiration au changement vers une nouvelle farce électorale présidentielle en 2022. On est loin de la contestation réelle des institutions…

En 2007, un philosophe sortait un livre d’opportunité, dont le titre simple est resté dans les mémoires : « de quoi Sarkozy est-il le nom ? ». Comme Macron aujourd’hui, Sarkozy était diabolisé, avec une personnalité qui s’y prêtait et s’y complaisait. A quoi l’anti-sarkozysme a-t-il mené ? A l’avènement de Hollande, avec sabotage réformiste des luttes et grandes mobilisations  pour le service public de La Poste ou contre la casse de la retraite à 60 ans.

De quoi Macron est-il le nom ? Comme Sarkozy, comme Hollande, il est d’abord le nom, sur l’emballage, de la politique au service du capital, de l’UE.

Macron est aussi le nom d’une opération politicienne plus inédite. Elle a été organisée par le système en France, avant les élections de 2017 (déjà l’affaire, déjà médiatiquement disproportionnée, Pénélope Fillon). Avec Macron, le système a réussi à esquiver la crise du système de l’alternance gauche/droite dans le cadre d’une crise plus globale de la démocratie bourgeoise. Macron a été érigé en une 3ème force du système, appuyé par ceux qui pensent qu’ils n’ont pas intérêt au changement. L’opération a été validée par une petite majorité relative, face au repoussoir FN.

Avec Macron, le patronat a trouvé un moyen d’aggraver encore sa politique antisociale dans la stricte continuité Sarkozy et Hollande avec qui Macron avait collaboré. Le brouillage des repères politiques leur a permis de procéder, jusqu’à présent, avec une certaine facilité. Mais logiquement, sous Macron, la même politique suscite le même mécontentement, la même colère populaires. Des luttes sociales importantes s’élèvent.

Depuis juin 2017, c’est la course à l’échalote, derrière Macron, pour se positionner en premier opposant. Sans grand résultat. La médiatisation de l’affaire Benalla, à défaut de traduire un tournant, sonne l’heure des recompositions politiques concrètes et le début du retour de forces politiciennes d’alternance, à droite, comme à « gauche », avec 2022 dans le viseur, en passant par les élections européennes de 2019.

Une droite cherche à se droitiser sur les questions de société et de personnes – partageant entièrement la politique économique et sociale de Macron – éventuellement en recyclant tout ou partie de l’ex-FN (certains ne sont pas privés d’un jeu infâme sur les origines sociales de Benalla, « gars des cités »).

Une nouvelle gauche plurielle commence à se reconstituer, avec des composantes institutionnelles ou populistes, qui se retrouvent des affinités. Le souvenir de la gauche au pouvoir s’éloigne. La partie du PS qui a rejoint Macron redonne un semblant de virginité au reste.

Il n’est pas du tout dit que la 3ème force autour de Macron sorte perdante de la restauration des forces d’alternance. L’affaire Benalla, sauf rebondissements improbables, va s’essouffler sans l’avoir vraiment touchée. L’opinion s’y perd et s’ennuie dans les versions des uns et des autres protagonistes qui pourraient se neutraliser. Souvenons-nous aussi que Mélenchon avait – avant de se rétracter – traité de fascistes les manifestants du 1er mai que Banalla a affrontés…

Cibler à outrance le personnage de Macron laisse sa politique globalement indemne. Les affiches du PCF qui habillent le Président en Louis XIV confèreraient presque de l’autorité à Macron. Le boycott par Mélenchon de son discours de politique générale à Versailles le 9 juillet « le roi-président » a épargné au leader insoumis une contradiction sur le fond.

Car Macron a montré, dans son discours-programme de Versailles, non seulement qu’il était capable de se montrer moins arrogant, quand il le fallait, mais surtout que le pouvoir assume dans sa cohérence tout le programme de contre-réformes structurelles revendiquées par le patronat, l’UE et le capital. 

Pour Macron, la défaite de la lutte des cheminots est consommée. Nous considérons qu’elle se poursuit sous une autre forme et peut encore s’étendre à d’autres services publics, à condition d’analyser les échecs et de mettre enfin au centre la défense et la reconquête des monopoles publics face à la politique de concurrence de l’UE. Dans la suite de ses ordonnances contre le droit du travail, Macron veut abattre tous les statuts du travail, dont, en premier maintenant, celui de la fonction publique. Dans le même mouvement, il déclare la guerre à l’assurance chômage. La hausse de la CSG en un élément en se substituant à des cotisations chômage. Avec le passage au prélèvement à la source, elle annonce aussi un nouveau démantèlement du financement solidaire de la sécurité sociale par la cotisation. En concordance, Macron poursuit un plan ordonné de transfert au privé des prestations de l’Assurance maladie, de la prise en charge de la dépendance (EHPAD), une nouvelle remise en cause du système de retraite. Au centre de son discours, Macron fait une priorité de la rénovation du cadre capitaliste européen pour lui rendre son efficacité contre les acquis sociaux et démocratiques nationaux.  Il veut encore augmenter les dépenses militaires et affirmer la vocation de gendarme auxiliaire du monde de l’impérialisme français.

A peine quelques jours après cette véritable déclaration de guerre au monde du travail et au peuple, l’attention, l’engouement,  l’initiative des cadres de la vie politique sont totalement captés par l’affaire Benalla et les perspectives politiciennes qu’elle ouvre.

Loin de faire la part des choses dans cette affaire, les porte-parole du PCF se sont également engouffrés dans l’opportunité de recherche de coalitions et recompositions politiques dans les institutions. La personnification du pouvoir, l’anti-macronisme à outrance, permettent de s’afficher et de s’intégrer dans un cartel d’opposants, sans faire les délicats sur leurs positions réformistes, leur pratique et leur perspective d’accompagnement du système. La stratégie qui a quasiment éliminé notre parti comme force indépendante (1,23% des inscrits en juin 2017), et le prive de son rôle dans la lutte des classes, est plus que jamais à l’ordre du jour des groupes dirigeants avant le 38ème congrès du PCF.

Communistes, notre place, celle de notre Parti, est dans les luttes, dans l’organisation de la riposte, sur des positions de rupture, des positions de classe, à tous les aspects de la politique du pouvoir, dans le rassemblement que nous devons privilégier, celui qui part des luttes.

38ème congrès du PCF: PRESENTATION de la motion  » PCF: Reconstruire le Parti de classe. Priorité au rassemblement dans les luttes »