Vivelepcf, 28 novembre 2012 

Aux législatives de juin dernier, le candidat du PS, Philippe Kemel, a été élu avec 118 voix d’avance sur la candidate du FN, Marine Le Pen, dans la 14ème circonscription du Pas-de-Calais (Hénin-Beaumont, Carvin…).

C’est aussi la circonscription où le Front de gauche avait décidé de parachuter Jean-Luc Mélenchon. La direction du PCF a alors obtenu un revirement étonnant de la direction de la fédération du PCF du Pas-de-Calais. Celle-ci est passée, en quelques jours, d’héritière des positions fédérales contre l’effacement du PCF à soutien actif de sa nouvelle formule, le Front de gauche. Le secrétaire fédéral, Hervé Poly, devenu suppléant, s’est montré le serviteur loyal, sans défaut, de Mélenchon tout au long de la campagne.

Malgré cela, malgré le ralliement d’élus socialistes de la circonscription, malgré les prestations de personnalités de gauche (Guy Bedos…), Mélenchon est arrivé derrière le maire PS de Carvin.

Bien des observateurs ont souligné comment sa croisade populiste autant que politicienne, superficielle et parisianiste a même servi Marine Le Pen, surtout après le ralliement « sans conditions » à François Hollande. Le point de vue communiste, en tout cas, indépendant, était absent.

Au plan national, après les présidentielles, la candidature Mélenchon dans le Pas-de-Calais a servi d’étiquette et de profession de foi aux autres candidats du Front de gauche, provoquant un premier dégonflement électoral.

Le FN a déposé un recours en invalidation de l’élection. Le Conseil constitutionnel doit statuer dans les semaines qui viennent.

118 voix d’écart, ce n’est rien, d’autant que toutes les forces politiques avouent que les procès-verbaux des bureaux de vote sont un peu approximatifs. Le Conseil constitutionnel dispose donc d’une grande latitude pour une décision qui sera très politique.

Pour l’instant, les rumeurs annoncent plutôt une validation par le Conseil de l’élection de Philippe Kemel. L’annuler, alors que la politique antisociale de son parti commence à battre son plein et que l’UMP est en pleine crise, ce serait faire le jeu de l’extrême-droite, offrir une tribune à Mme Le Pen, très tôt dans le quinquennat.

Mais les voies du Conseil constitutionnel sont impénétrables ! Et certains commencent à s’inquiéter gravement, en premier lieu… les tenants du Front de gauche, ainsi qu’ils le montrent dans les médias. Si une nouvelle élection doit être organisée dans les deux mois, comment Jean-Luc Mélenchon pourra-t-il se faire porter pal ?

Les dilemmes de Mélenchon

Il ne peut pas ne pas se présenter.

En juin, il est venu jouer le matador à Hénin-Beaumont. Après la claque électorale, pour limiter les dégâts politiques, il a dû jurer grands dieux qu’il ne lâcherait rien dans ces terres jusqu’alors inconnues. S’il ne revient pas faire rempart à Marine Le Pen, il se déconsidère.

Mais s’il se représente, il risque la mort politique et celle du Front de gauche.

A nouveau candidat, Mélenchon risque fort de porter la responsabilité de l’élection de Marine Le Pen.

En effet, il n’a qu’un créneau possible, dans sa posture politique, celui de la contestation à gauche de son ex-parti, le PS : une contestation arrogante dans les mots mais complaisante dans les propositions. A Hénin-Beaumont et Carvin, il sera obligé d’attaquer le député PS sur sa probité, sur les affaires qui agitent la fédération PS du Pas-de-Calais. Mais sur le fond, Maastrichien avéré, partisan de l’UE « sociale », il laissera le terrain à nouveau à la démagogie de Marine Le Pen.

Eliminé à nouveau au 1er tour (surtout si le PS, réconcilié dans le 62 a pu recomposer ses réseaux clientélistes), ou au second par Marine Le Pen, Mélenchon encourt un échec majeur, rédhibitoire, pour lui-même mais aussi pour le Front de gauche.

La direction du PCF perçoit bien le danger, à quelques semaines de son congrès.

Pour poursuivre le processus d’effacement et de transmutation réformiste du PCF, après l’épisode des « collectifs antilibéraux », Marie-George Buffet, Francis Wurtz, Pierre Laurent… sont allés chercher Mélenchon pour constituer le « Front de gauche ». Ils ont placé leur destin, sinon celui de notre Parti, entre les mains d’un opportuniste trotskyste, mitterrandien, socio-démocrate, pro-UE…  Peu a importé le coût, même en termes d’élus, avec la perte de la moitié des conseillers régionaux et des députés PCF. Même la frénésie médiatique électorale retombée, Mélenchon demeure le 3ème opposant potentiel à Hollande, après Fillon et Copé, avec  17%, dans un sondage BVA. Pierre Laurent obtient 1%.

Dans cette période de préparation du congrès du PCF, un désaveu de la personnalité Mélenchon mettrait à mal la poursuite imposée de cette stratégie. Sans Mélenchon, plus de Front de gauche : la direction du Parti se retrouverait directement en face de ses reniements !

Pour sauver la mise, si jamais le Conseil constitutionnel invalidait, quel recours ?

En mai et juin, Mélenchon, sauveur, a traité les communistes locaux, 100 fois plus importants que son PG, avec condescendance, en substance : « vous avez été des nuls mais merci de coller mes affiches ». La Fédération du Pas-de-Calais du PCF a cédé aux pressions de la direction du Parti et joué totalement le jeu de Mélenchon.

Maintenant, elle est en situation de lui sauver la mise. Secrétaire fédéral, ex-suppléant de Mélenchon sur la circonscription, Hervé Poly  avance dans la presse, notamment dans l’hebdomadaire du PCF « Liberté 62 », la nécessité d’une candidature commune à gauche contre le FN.

Voilà Mélenchon sorti d’affaire ! Ses alliés communistes préfèrent aller avec le PS dès le 1er tour ! Lui, il n’y peut rien. Il doit respecter son allié et son inféodation au PS.

Dans l’alignement derrière le PS, comme derrière Mélenchon, le plus grave est l’abandon des positions communistes, de notre organisation dans les quartiers et les entreprises, dans une terre comme le Pas-de-Calais où notre parti représente tant. Mme Le Pen distribue aux portes de la Française de mécanique sans être refoulée par les salariés. Elle prend garde de ne pas attaquer l’héritage communiste mais de cibler le PS. Elle reprend, sans avoir à ressortir ses vieux relents nationalistes, l’opposition à l’UE.

Dans la stratégie du Front de gauche, le PCF choisit l’effacement ! Pour sauver la mise à Mélenchon et à l’opération nationale qui prive le pays, les travailleurs, leurs syndicats, de leur force politique révolutionnaire historique, le PCF.

De petits calculs électoraux traduisent de pauvres mais graves compromissions.

Ne laissons pas faire ! Au nom du PCF !