Où est passée la bataille de 2009 pour la Poste ?

Souvenons-nous ! En 2009, le gouvernement Fillon faisait passer une loi attaquant structurellement le service public postal. Elle a transformé La Poste en société anonyme d’une part. Elle a établi la concurrence sur l’ensemble de la distribution du courrier d’autre part, y compris les lettres de moins de 50 grammes, transposant la troisième directive européenne de marchandisation des activités postales.

Un profond mouvement d’opposition à cette nouvelle remise en cause du service public s’est manifesté à travers le pays, allant bien au-delà de l’attachement aux bureaux de poste auquel le pouvoir d’alors avait voulu le réduire. 

Les principales organisations syndicales, les partis de gauche, des associations ont alors lancé une « votation citoyenne ». Les plus de 2 millions de signatures collectées ont montré le rapport de force existant pour faire échec au projet du gouvernement. Nous y avons contribué tout en critiquant le choix de cette forme d’action.

Pour mener la bataille pour la reconquête du service public de La Poste, tirons les enseignements de 2009.

Le fait d’organiser une « votation », avec toute la gauche, renvoyait implicitement tout changement à la perspective des élections de 2012. Comme sur les retraites l’année suivante, la personnification de la politique au service du capital sur Sarkozy a eu le même effet. Cela a court-circuité, au moment où c’était le plus favorable, la construction du rassemblement dans la lutte pour gagner un premier recul du pouvoir.

Les initiateurs de la « votation » ont par ailleurs évacué l’un des deux volets du projet de loi, dont l’autre dépend pourtant étroitement : la concurrence européenne, la fin du monopole publique historique de La Poste, pour ne garder que le changement de statut.

Cela s’ajoute à un autre problème. Comment prétendre défendre la Poste avec le PS et la gauche maastrichienne ? Au niveau national, depuis la loi Quilès de 1990 démantelant les PTT, en passant par la privatisation de l’entreprise sœur France-Télécom, au niveau européen par leur vote en faveur les directives, ils ont contribué de façon déterminante à la casse du service public.

Avec sa recherche prioritaire de l’unité des organisations sur le rassemblement dans les luttes, sa perspective électoraliste, ses ambiguïtés sur l’Europe, la « votation » n’a pas permis la mobilisation décisive : celle des postiers, en convergence avec les agents des autres services publics, sur l’objectif immédiat de retrait du projet de loi.

En 2012, quelle est la situation ?

Le président et le gouvernement ont changé. Mais plus aucun des initiateurs de la « votation » ne pose la question de l’abrogation de la loi de 2009. Il est amusant de retrouver les déclarations solennelles de François Hollande faisant voter un vœu contre le changement de statut de La Poste par le Conseil général de Corrèze qu’il présidait.

La Poste a changé de statut mais son capital continue d’être détenu intégralement par le secteur public : l’Etat et la Caisse des dépôts et consignations. Le PDG Bailly n’a pas encore osé la provocation d’ouvrir le capital aux salariés. Le retour au statut d’établissement public peut être décidé en quelques jours.

L’emploi et les conditions de travail des postiers se sont encore gravement dégradés. La situation sociale, dont les suicides constituent des cas extrêmes (nous savons combien il faut être prudent dans ces situations humaines) est très tendue. Le nouveau gouvernement a dû constituer une  « commission du grand dialogue » (sic !). Le rapport de son président, Jean Kaspar, ancien secrétaire général de la CFDT, auxiliaire du processus de privatisation, sonne comme une provocation. Il préconise un ralentissement du flux de suppressions d’emploi…

L’échec de la lutte générale de 2009 pèse. Mais, dans le même temps, il ne se passe pas une semaine sans que des luttes se développent contre une déstructuration d’un centre de distribution ou la fermeture d’un bureau, le plus souvent avec un soutien actif des usagers. Le potentiel de mobilisation existe. Les luttes sauvent des emplois, gagnent des titularisations. Elles ont, enfin, réussi à faire condamner plusieurs fois la direction de La Poste pour les heures supplémentaires non rémunérées à la suite de l’allongement des tournées des facteurs.

Du côté de la Banque postale, le processus de banalisation-privatisation se heurte à la crise financière. Le gouvernement prétend constituer une banque publique d’investissement, développer le Livret A (dans le détail, ce n’est pas ça). Il a aussi besoin de rattacher à la Banque postale les ruines de Dexia. Autant de contradictions qui peuvent servir d’arguments pour reconquérir les services financiers de La Poste.

Tout cela constitue des points d’appui pour la reprise d’un mouvement national. D’autant plus que le rejet de l’UE, de ses traités et de ses directives illégitimes s’est encore accru.

Bien sûr, cela ne se décrète pas, cela se travaille politiquement, dans l’entreprise, dans le syndicat, dans la population.

Nous proposons que le maximum d’organisations du PCF mette à l’ordre du jour la reconquête du service public postal, l’abrogation de la loi de 2009, la réintégration de la Banque postale dans sa maison-mère, le rétablissement de son monopole public sur la distribution du courrier.

 

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