JJ pour Vivelepcf, 21 mars 2016
Dans le projet de loi Valls-El-Khomri, un mauvais coup en cache toujours un autre.
Une disposition, parmi les quelque 50 articles du projet, a particulièrement été commentée dans les médias : le plafonnement des indemnités prud’homales pour licenciement abusif. Son abandon lors de la supposée réécriture de la loi par Valls et Hollande et son remplacement par un barème indicatif ont été fortement mis en avant. Ils ont largement servi à expliquer le ralliement complice de la CFDT qui en avait fait un casus belli « social ». De son côté, le Medef hurle, comme sur commande.
Mais personne ou presque ne signale et ne dénonce que le projet de loi transformé prévoit toujours la suppression des planchers des indemnités prud’homales. Or cette disposition frapperait les salariés dans des cas bien plus nombreux que l’hypothétique plafonnement (qui, de toute façon, allait sans doute être invalidé pour inconstitutionnalité).
Pour l’instant, le code du travail stipule qu’un licenciement reconnu par le conseil des prud’hommes sans cause réelle et sérieuse est indemnisé par l’employeur, pour un salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise de plus de 11 salariés, au minimum du montant de six mois de salaire brut.
Si la loi Valls-El-Khomri passe, les juges prud’homaux représentant à parité les patrons seraient évidemment tentés de négocier avec les juges représentant les salariés des indemnités sur une base très inférieure à ces 6 mois. C’est aussi une base qui disparaîtrait, entre un patron et un salarié, dans la négociation d’une rupture conventionnelle du CDI et la fixation de la prime (procédure de licenciement déguisé que nous continuons à dénoncer).
Pour le salarié lésé, qui obtiendrait seulement 3 mois de salaires aux prud’hommes, pour contester et espérer récupérer les 6 mois d’indemnité accordés actuellement de droit, il faudra passer par un juge professionnel puis éventuellement faire appel. Des procédures qui durent de deux à quatre ans, sans assurance de gagner !
On comprend aisément combien cette disposition du projet Valls-Khomri va faciliter la vie des patrons qui veulent se débarrasser de tel ou tel de leur salarié et quel moyen de pression nouveau elle leur donne dans l’entreprise.
Il est temps, avant la journée nationale de grève du 31 mars, d’alerter très largement les salariés. Bien plus sont concernés par la suppression du plancher que par la suppression du plafond des indemnités prud’homales. Ne manquons pas non plus de confondre, dans les entreprises, les syndicats de collaboration !