Hommage à Marcel Paul, 30 ans après sa mort

Le 11 novembre 1982, Marcel Paul décédait. Notre site rend hommage à l’ancien ministre communiste de la production industrielle à qui on doit la nationalisation d’EDF et de GDF, à l’ancien militant et dirigeant syndicaliste et communiste de l’énergie, au héros de la Résistance qu’il poursuivit jusque dans l’enfer de la déportation, au camp de concentration de Buchenwald, à la tête du Comité clandestin des intérêts français avec ses camarades de tous les pays.

 

Nous reprenons ci-dessous le texte du vœu au Conseil du 14ème arrondissement, finalement abouti en 2005, pour la dénomination d’une Place Marcel Paul à Paris

Intervention de Camille MARQUES, conseillère d’arrondissement communiste, à la réunion du Conseil du 4 avril 2005.

Chers collègues,

La création d’une place Marcel Paul à Paris répond au vœu réitéré à maintes reprises des élus communistes. Elle vient enfin combler une lacune injustifiable : l’absence dans la capitale d’un nom de rue honorant la mémoire et l’œuvre du grand résistant-déporté, de l’homme d’Etat de premier plan qu’était Marcel Paul. Que la future place Marcel Paul se situe dans le 14ème honore notre arrondissement.

C’est un juste retour des choses. Pour lui, d’abord. Enfant abandonné, il a fut trouvé place Denfert-Rochereau le 14 juillet 1900 et porté à l’Assistance à ce qui devait devenir l’hôpital Saint-Vincent de Paul. Pour les habitants du 14ème, ensuite. Marcel Paul fut l’élu de notre arrondissement au Conseil de Paris de 1935 à 1938. Dans cette période de crise, ouvrier lui-même, il agit inlassablement, il se démène pour la défense des travailleurs parisiens, ceux de nos quartiers, ceux de Plaisance en particulier, alors l’un des secteurs les plus miséreux de Paris.

Permettez-moi de citer quelques-unes des innombrables propositions qu’il a défendues avec les élus communistes avec opiniâtreté face à une majorité réactionnaire. Certaines ne sont pas sans faire écho, souvent malheureusement, à nos débats d’aujourd’hui :

-réalisation de centres sociaux, de piscines, de bains douches, de lavoirs municipaux.
-création d’un nouveau square, déjà, à Plaisance
-organisation d’une soupe populaire dans tous les arrondissements
-amélioration de la garde et de l’éducation des enfants avant l’âge scolaire
-Municipalisation du service des assistants d’hygiène scolaire.
-étrennes pour les enfants des chômeurs.
-Création d’hôpitaux pour les vieux.
-Création d’une commission d’enquête sur la société du gaz de Paris.

Et bien d’autres. Cet acharnement, cette passion à servir les intérêts des travailleurs les plus démunis, les victimes du système économique, la cause du peuple, Marcel Paul devait bientôt être amené à les consacrer au pays tout entier.

La reconnaissance tardive par la Ville de Paris de la personnalité de Marcel Paul tombe opportunément en cette année de 60ème anniversaire de la libération des camps de concentration et de la capitulation sans conditions de l’Allemagne nazie.

Marcel Paul entre dans la clandestinité dès 1940. Il est alors à Nantes où il participe aux débuts de l’organisation de la résistance bretonne puis à la création de l’OS, l’Organisation secrète, qui allait être l’initiatrice des futurs FTP, francs-tireurs et partisans. Le 13 novembre 1941, il est arrêté par la police de Vichy. Il est successivement interné à la Santé, à Fontevraud puis à Compiègne avant d’être déporté à Buchenwald via Auschwitz en avril 1944, classé NN par les nazis, “ Nuit et brouillard ”, ceux qui ne devaient en aucun cas revenir.

Au fond l’enfer de Buchenwald, Marcel Paul a joué un rôle décisif dans l’organisation de la Résistance française. Animé de l’esprit d’Union nationale de la Résistance qui continuera de caractériser son action toute sa vie, il est à l’origine de la constitution du “ Comité de défense des intérêts français ” dans le camp. Avec le colonel Mahnès, il parvient à réaliser l’union des 33 groupes de résistance dont les déportés français sont issus. Au cœur de la barbarie nazie, l’organisation, la solidarité sont essentielles pour survivre. En liaison avec les Résistants d’autres nationalités et particulièrement allemands, Marcel Paul contribue à sauver nombre de vies françaises, sans distinction d’obédience. Marcel Dassault, parmi d’autres, a su rendre hommage à de nombreuses reprises à l’action de Marcel Paul.
Dans quelques jours le 11 avril, on célèbrera le 60ème anniversaire de la Libération de Buchenwald à laquelle la brigade française d’action libératrice, dans le cadre de l’organisation internationale de la résistance du camp a héroïquement contribué. Toute sa vie, Marcel Paul a continué à se dévouer pour ses compagnons de souffrance dans le cadre de la Fédération nationale des déportés, internés résistants patriotes, FNDIRP qu’il a fondée. Son action exemplaire d’élu parisien exemplaire, sa participation héroïque à la Résistance suffisent amplement à justifier la création d’une place Marcel Paul.

Mais c’est aussi évidemment l’homme d’Etat, l’ouvrier Homme d’Etat et son œuvre qu’il convient de célébrer. De retour des camps, Marcel Paul reprend immédiatement ses activités militantes syndicales et politiques. Depuis les années 30, il est dirigeant de la fédération syndicale CGT de l’éclairage, il le redevient. Elu député, dirigeant du Parti communiste, il est nommé par le Général de Gaulle ministre de la production industrielle le 21 novembre 1945. Il le reste jusqu’en décembre 1946, le temps d’accomplir un des pans majeurs du Programme du Conseil national de la Résistance : la nationalisation du secteur de l’énergie, de l’électricité et du gaz.

Il réussit le tour de force de regrouper 1300 compagnies privées en 2 grandes entreprises nationales, EDF et GDF. Il se bat et obtient la nationalisation de toutes les activités du secteur, de la production, du transport et de la distribution. Cette unité est nécessaire pour garantir le développement du pays en lui fournissant un équipement énergétique moderne et une énergie bon marché, en imposant à cette activité, essentielle à toute l’économie, à la vie de chacun, la logique du service public et de l’intérêt général. Marcel Paul, qui a connu lui-même les ravages du chômage, de la précarité, de la misère, profondément animé de l’esprit de progrès social, gagne également le statut exemplaire des électriciens et gaziers, et une organisation des œuvres sociales d’EDF-GDF tout aussi exemplaire. Ce véritable modèle social inspirera et imprégnera toute les conquêtes sociales des décennies ultérieures.

Cet héritage reste infiniment précieux pour la France d’aujourd’hui, même si l’œuvre de Marcel Paul est menacée comme jamais encore depuis 1946. Aujourd’hui, malgré l’ampleur de la mobilisation des électriciens et des gaziers du printemps dernier, le soutien majoritaire de la population, la privatisation partielle d’EDF serait programmée avant la fin de l’année, celle de  GDF pour le début du mois de mai. Mais à lire la presse, elle serait reportée pour ne pas influencer (dans quel sens, je vous laisse deviner) le référendum sur le projet de “ constitution ” européenne. Il serait encore reporté si le NON l’emportait. Permettez-moi de le rappeler, la nationalisation de l’énergie est inscrite dans le préambule de la Constitution française de 1946, intégrée dans la Constitution de la 5ème République…

Dans cette période, l’inauguration de la Place Marcel Paul sera d’une actualité brûlante.

Chers collègues, elle célébrera l’œuvre d’un militant communiste qui a su servir au plus haut niveau l’intérêt national.